En 2011, le premier semestre a été médiocre mais compensé en partie par un second semestre meilleur. Les analystes ont même cru à une sortie de crise. L’année 2012 a contredit leurs perspectives. Les premiers mois ont encore été difficiles, tant et si bien que les affréteurs ont préféré miser sur la seconde partie de l’année pour affréter leurs navires. « En mai, note le rapport BRS, un changement radical d’opinion s’est opéré sur le marché des FFA. Étant donné que de nombreux acteurs utilisent les taux papiers comme guides pour les taux d’affrètement à terme, les contrats physiques ont aussi commencé à baisser. » Un changement dans l’opinion qui tient principalement à la perception de l’économie mondiale, quand l’Europe et la Chine tournent au ralenti. En effet, la production chinoise d’acier n’augmente que de 0,5 %, contre 8 % à 10 % dans les années précédentes. L’arrivée sur le marché de nouveaux fournisseurs de minerais en provenance d’Afrique de l’Ouest a mis les exportations brésiliennes sous pression. De plus, les sorties de minerais ont été plus fortes depuis l’Australie que les autres fournisseurs comme le Brésil pour la Chine, ce qui se traduit par une baisse des tonnes/miles et, par voie de conséquence, une croissance de la demande moins forte que celle de l’offre. Dans le match entre l’Australie et le Brésil pour la fourniture de minerais, l’Australie sort vainqueur. La baisse des tonnages depuis le Brésil a réduit la demande en tonnes/miles.
En outre, en 2012, les armateurs qui ont pu garantir des niveaux de consommation à vitesse lente ont pu obtenir des primes. Les navires « super Eco Ships » ont fait une percée dans la construction neuve. Autre élément nouveau dans le secteur des vracs secs, des navires désarmés pour le long terme ont fait leur apparition.
Enfin, la majorité des Valemax sont entrés sur le marché. Ces unités de 400 000 tpl aggravent sérieusement la situation des navires de 300 000 tpl sur le marché du spot.
Les Panamax: seconde année de contraction
En 2011, le marché des Panamax a été « plus sain que prévu », note le rapport BRS. En 2012, avec l’arrivée de nouveaux navires, le ralentissement était prévisible. Avec l’entrée sur le marché des commandes, les démolitions de navires et le report de livraisons, la flotte des Panamax a progressé de 15,7 % en 2012. Au global, pendant l’année, les baisses se sont faites sur quelques jours, permettant aux traders de jouer pleinement leur rôle. Il n’en reste pas moins qu’en termes de taux de fret, le marché des Panamax s’est encore contracté, pour la seconde année consécutive, de 51 % après une baisse de 44 % en 2011. Pour les analystes de BRS, si les fondamentaux du marché des Panamax sont demeurés, les caractéristiques ont sensiblement été modifiées. Alors qu’auparavant, le marché de l’Atlantique a toujours été meilleur que le Pacifique, en 2012, la donne a été inversée. En outre, l’environnement économique s’est modifié. Les navires âgés ont dû prendre en compte les plus récents dont la consommation est nettement plus réduite et dont la flexibilité de la taille des cargaisons a pénalisé les armateurs de post-Panamax. Un tableau sombre qui s’est noirci avec la surcapacité endémique du secteur. Une noirceur qu’il faut tempérer par une augmentation lente de la demande. Si la Chine ralentit, elle a malgré tout conservé une croissance de sa production d’acier. L’Europe, pour sa part, a augmenté sa consommation de charbon pour compenser les arrêts des centrales nucléaires. Dans ce contexte, 2013 aurait dû continuer sur la lancée. La situation est tout autre. Le marché s’est contracté et les livraisons attendues en 2013 ne devraient pas améliorer la situation. BRS affiche un mince espoir avec une lueur au bout du tunnel par la courbe de contango.
Une situation meilleure, seulement en apparence
« Les Supramax et les Handysize ont su tirer leur épingle du jeu », note le rapport de BRS. Si les taux sont meilleurs qu’attendus, la réalité du marché a montré un bouleversement avec une nette domination du marché Atlantique sur le Pacifique. Plusieurs raisons participent à cette situation, pour les analystes de BRS. En premier lieu, les livraisons nouvelles pèsent sur le marché. Ensuite, le minerai de fer indien, élément porteur de ce marché, a disparu. Enfin, la baisse des consommations en minerais de fer, bauxite et nickel de la Chine. Au dernier trimestre de l’année, la tendance s’est inversée avec une reprise des importations indiennes de charbon et la reprise économique en Chine qui ont rétabli à parité les deux bassins. Hausse sur le Pacifique, mais aussi baisse sur l’Atlantique avec les exportations de céréales qui ont marqué le pas en raison de la sécheresse aux États-Unis. En 2013, le marché pourrait connaître de nouveaux développements grâce à la bonne récolte sud-américaine et aux frémissements d’une reprise nord-américaine et chinoise. « L’horizon pourrait commencer à s’éclaircir, cependant le chemin restera difficile et pourrait mener certains au bord du gouffre », conclu le rapport BRS.
Le marché des FFA: la baisse des lots
En 2012, le marché des FFA a baissé en volume. Une diminution de 5 % à 928 171 lots (un lot représentant 1 000 t ou une journée d’affrètement), surtout remarquée au premier et quatrième trimestre. Un phénomène qui s’est principalement démontré sur le marché des Capesize, alors que les Handysize, Panamax et Supramax sont restés stables sur l’ensemble de l’année. Les marchés liés au fret ont connu une augmentation.
Les différentes plates-formes d’échange, comme BaltEx, Cleartrade ou BRS ArtB n’ont pas attiré les liquidités souhaitées, souligne le rapport BRS. Et pourtant, la technologie est en place. Elle ne cesse de se doter de nouvelles fonctionnalités, mais les utilisateurs préfèrent encore les transactions téléphoniques à l’utilisation de nouvelles technologies. De plus, depuis la crise du transport maritime en 2008, les entreprises publiques chinoises ont interdiction d’utiliser les produits dérivés. Les premiers FFA libellés en RMB se sont négociés en décembre. L’entrée sur le marché de ces produits aura un impact sur le marché des FFA, sans qu’il soit encore possible de prédire à quel niveau. Dès le début de l’année, les taux des chartes ont affiché des niveaux bas qui ont immédiatement eu des effets sur le marché des FFA. L’espoir d’un retour à de meilleurs auspices s’est rapidement évanoui, note le rapport BRS. Avec des taux encore faibles au début de l’année, « on peut s’attendre à ce que les FFA soient, en 2013, d’un niveau similaire à celui de 2012 ».
Les conséquences de la crise du financement
En 2012, le Baltic Dry Index a atteint des planchers avec une moyenne à 920 points. Un niveau bas qui a largement déprécié les actifs des armateurs et incité les acquéreurs à se placer sur le marché de l’occasion. Ainsi, le nombre de transaction a augmenté de 16 % à 364 en 2012. De plus, les armateurs grecs, auparavant « boulimiques de navires neufs », se sont tournés vers l’occasion. En outre, la difficulté de trouver des financements s’est ajoutée. La Société Générale s’est débarrassée de ses crédits navires quand la Commerzbank a décidé de se retirer complètement de ce marché. Les institutions financières qui restent sur le marché exigent des garanties et des marges plus importantes. Dans ce contexte arrivent des financeurs d’un nouveau genre: les fonds spéculatifs ou le capital investment. À l’Est, en Chine, Corée et Japon, la situation est inversée avec l’ouverture à des armateurs étrangers de financement de navires d’occasion par des organismes comme la Cexim ou la China Development Bank, avec néanmoins des contraintes.
La bonne nouvelle dans ce marché reste le niveau de démolition des navires. Elle a augmenté de 30 % à 572 navires. Un phénomène qui a principalement touché les milieux des Panamax, Handysize et Handymax dont les augmentations ont été respectivement de 76 %, 44 % et 103 %. Les prix de la démolition ont incité les armateurs à se débarrasser de leurs navires obsolètes. En fin d’année 2012, les prix à la démolition ont perdu environ 20 %. L’effet bénéfique de la démolition pourrait s’estomper dans les prochains mois.
Le marché de l’occasion pour les Capesizes a continué de baisser. Un navire de 172 000 tpl âgé de cinq ans a perdu 18 % de sa valeur en 2012 à 29,7 M$. Pour un navire de 10 ans, sa valeur a perdu 26 % à 20 M$. Une baisse du prix qui ne s’accompagne pas forcément d’une baisse des volumes. En 2012, le marché de l’occasion des Capesizes a augmenté pour passer à 60 transactions, soit 25 % de plus. C’est en Extrême-Orient que les acheteurs se trouvent avec une forte présence des Coréens, des Chinois et des Japonais. Les Grecs ont aussi joué un rôle sur ce marché, mais de façon moins soutenue. Quant aux navires envoyés à la démolition, leur prix a varié en fonction du prix de la tonne lège rendue sous-continent indien qui est passée de 495 $/t à 403 $/t. Le marché de l’occasion des Capesizes pourrait se redresser grâce au ralentissement des livraisons nouvelles.