La « carambouille » de l’Atlantic-Star

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Construit en 1984 à la Seyne-sur-mer, l’Atlantic-Star est resté désaffecté à Marseille pendant plus de deux ans. Comme pour tous les paquebots de cette époque, il contient des quantités importantes d’amiante, rappelle l’ONG Robin des Bois.

Il appartenait à l’armateur espagnol Pullmantur, filiale de Royal Caribbean Cruise Line. Son exploitation était devenue prohibitive. L’Atlantic-Star, toujours aux mains d’intérêts espagnols, est resté sous le pavillon maltais jusqu’au 1er mars.

La Belinda Shipholding Corp., basée aux îles Marshall, devient alors son propriétaire. Il passe sous le pavillon du Togo et est rebaptisé Antic. Cette compagnie sert uniquement de plate-forme de revente pour la démolition de vieux navires à passagers européens, estime Robin des Bois. En 2009, elle a pris possession du Kapetan-Alexandros-A, ferry construit en 1962, appartenant à un armateur grec et battant pavillon maltais. La Belinda Shipholding Corp. l’a immédiatement rebaptisé Alexandros, fait passer sous pavillon de Sierra Leone avant de l’envoyer pour démolition en Turquie.

Le 19 mars, remorqué par le grec Ionion-Pelagos, l’Antic a quitté Marseille à destination « probable » de la Turquie pour démolition. Dès le 22 mars, le convoi annonce qu’il se dirige vers Port-Saïd, porte d’entrée du canal de Suez et tremplin pour la démolition sur les plages d’Alang, en Inde. Les autorités et les associations indiennes sont alertées par Robin des Bois. Début avril, le vent tourne à nouveau, et le convoi se dirige vers Aliaga, en Turquie.

Vers l’Inde ou la Turquie, le dernier voyage de l’Atlantic-Star est entaché d’illégalité. L’Espagne, Malte, la France « se sont organisés pour ne pas assumer leurs responsabilités au regard de la réglementation européenne sur l’exportation de déchets dangereux. Le départ de l’Atlantic-Star n’a pas fait l’objet de notification en application de la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontaliers des déchets dangereux et de leur élimination ».

Stratégie gagnant-gagnant

Dans cette affaire, la France a une double responsabilité. D’une part, le paquebot étant parti de Marseille, la France est donc le dernier État du port. D’autre part, fin décembre, la commande aux chantiers STX France de Saint-Nazaire d’un paquebot géant par Royal Caribbean Cruise Line a été assortie d’une clause annexe très spéciale, affirme Robin des Bois: la « reprise » de l’Atlantic-Star. Au lieu de procéder à son démantèlement en Europe, avec toutes les contraintes financières et techniques d’un désamiantage rigoureux et de l’élimination des autres déchets dangereux, STX France a cédé le vieux paquebot à Skandinor, une filiale de STX Europe, dont le siège est en Norvège. En fin de cascade, c’est la Belinda Shipholding Corp. qui se retrouve juridiquement propriétaire du paquebot et qui assume la responsabilité d’une démolition hasardeuse.

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