L’exercice n’a jamais été réalisé et mérite de s’y arrêter, selon le président du groupe Faststream, spécialiste de l’emploi dans la marine marchande. Cette étude a visé à analyser les aspirations des marins lorsqu’ils décident de poser leur sac à terre. « Qu’il s’agisse d’assureur, de courtier, de juriste ou d’architecte naval, ces bureaux n’ont pas une nécessité d’embaucher des marins, mais ils peuvent en tirer un grand bénéfice », souligne en introduction Mark Charman, président de Faststream. Le premier enseignement révèle que 69 % des marins affirment qu’ils emprunteraient la même voie si cela était à refaire, alors que les officiers sont plus réservés avec 50 % de réponses dans ce sens. Il ressort des réponses des sondés que leur vie est à bord. Ils sont 85 % à préférer réaliser leur carrière en navigant. Les métiers sédentaires qui attirent ces marins sont en premier lieu ceux qu’ils ont l’habitude de côtoyer pendant leur vie embarquée, ce sont les postes de directions des opérations, d’expert et de gestionnaire de flotte. En queue de peloton, les assureurs, les juristes et le courtage ne sont pas du goût des interrogés. « La réalité est que ces professions, même si elles n’attirent pas les marins, ont besoin de leurs compétences, explique le président du cabinet de conseil. Ces sociétés doivent appliquer une stratégie marketing pour convaincre ces personnes de rejoindre leurs rangs. »
Un changement de vie difficile
Après avoir mené une vie à bord avec une hiérarchie claire et ponctuée par des formations pour accéder aux postes de commandement, un navigant voit le passage à la sédentarité comme un saut dans le vide avec une grande part d’inconnu. De plus, note l’étude, une grande partie de ces personnes ne réside pas habituellement dans les grands centres maritimes internationaux. Le passage de la vie de navigant à celle de sédentaire signifie alors un changement de vie pour toute la famille. « Ils sont donc peu nombreux à vouloir franchir le pas », souligne l’enquête.
Pour les sédentaires, l’accueil d’anciens navigants dans leurs équipes est perçu comme un atout pour 92 % des interrogés, dont 35 % sont persuadés que cet apport est vital. Du côté des marins, le passage de la vie à bord à celle du bureau, avec le stress de s’y rendre tous les jours, une hiérarchie parfois plus diffuse et une vie de famille différente, sont des éléments négatifs.
Cette étude a montré que les spécialistes des machines ont une plus grande confiance en leur métier que les officiers de pont. « Cela ne reflète pas la réalité », précise l’étude. Les deux professions ont chacune des aptitudes à mettre en avant, différentes mais utiles. Pour les officiers de passerelle, la recherche d’un emploi dépend plus largement des liens de l’entreprise avec le maritime. Quand les navigants sont interrogés sur les salaires auxquels ils peuvent prétendre, leur perception du marché est faussée, note l’enquête.
La perception qu’ont les sédentaires du personnel navigant est presque unanimement qu’il forme des salariés compétents. Parmi les 1 436 bureaux sédentaires interrogés, seuls 5 % indiquent que des marins ont souffert pour s’adapter.
Le choix du pays conditionne le salaire
Une fois prise la décision de poser son sac à terre, le marin doit faire le choix de sa nouvelle résidence. Entre l’Europe et l’Asie, quel rivage choisir pour avoir les meilleures opportunités? Ils sont 37 % à penser que c’est en Asie qu’il faut se rendre contre 26 % pour l’Europe. Une idée reçue que Faststream combat. Certes, depuis quelques années Singapour engrange un nombre important d’emplois. Il reste que la place de Londres demeure le premier pole d’emploi dans le maritime, selon le journal britannique Tradewinds qui a recensé quelque 15 000 emplois directement liés au maritime. Les métiers à terre sont mieux payés en Asie, pensent la majorité des employés sédentaires des sociétés maritimes. La réalité est plus complexe, note Faststream. Les salaires avant impôts sont plus élevés aux États-Unis. Pour les emplois techniques, l’Asie et l’Europe sont sur un pied d’égalité, alors que les commerciaux sont mieux rémunérés en Asie. Une position que Faststream appuie avec des exemples. Un expert serait payé 91 000 $ aux États-Unis contre 81 290 $ en Asie et 69 492 $ en Europe. Pour un affréteur, dont le rôle est avant tout commercial, son salaire est de 141 400 $ aux États-Unis contre 121 200 $ en Europe et 153 000 $ en Asie. Le tableau des salaires de cette étude démontre surtout que l’Europe est souvent à la traîne. L’Asie rémunère mieux les affréteurs, les courtiers et les directeurs des opérations. Les États-Unis sont plus généreux avec les gestionnaires de flotte, les experts et les superintendants.