À la date du 17 juillet, l’Association internationale des ports et rades (International Association of Ports and Harbors, IAPH) recense 20 ports maritimes dans lesquels les navires peuvent se brancher à quai afin de ne pas utiliser leurs générateurs diesel et réduire ainsi leurs émissions de polluants et autres gaz à effet de serre. Sans surprise les États-Unis arrivent en tête avec Los Angeles, Long Beach, San Francisco, San Diego, Seattle, Juneau (Alaska) et Pittsburg. À l’exception du dernier, ils proposent tous de la haute tension (6,6 kV/11 kV); Long Beach offrant également du 480 V. Pittsburg est en 440 V. La fréquence du courant américain est 60 Hz.
Arrive en 2e position, la Suède avec Göteborg, Helsingborg, Stockholm et Pitea. Le dernier est en haute tension (6,6 kV); le premier est en bitension (6,6 kV/10 kV et 400 V). Helsingborg et Stockholm sont en basse tension (respectivement 400 V/440 V et 400 V/690 V). Les trois ports finlandais ne proposent que de la haute tension (6,6 kV) tout comme Anvers, Lübeck, Oslo et Rotterdam.
Le document ajoute qu’il existe des projets d’électrification de quais havrais, marseillais et à Civitavecchia. L’IAPH constate la dispersion des normes et des besoins ce qui rend souvent les installations incompatibles.
Ainsi, 63 % des porte-conteneurs de moins de 140 m utilisent du 50 Hz, 94 % des unités de plus de 140 m, du 60 Hz. Mais la tendance au 60 Hz semble se généraliser pour les autres types de navires, surtout les paquebots. Les puissances nécessaires aux navires varient considérablement. De 1 200 kW à 8 000 kW pour un porte-conteneurs de plus de 140 m, 95 % d’entres eux ayant un besoin maximal de 5 000 kW. Pour les paquebots de plus de 200 m, les deux extrêmes sont 7 500 kW et 11 000 kW avec une pointe à 9 500 kW pour 95 % des navires.
Pour ceux qui font toujours escale aux mêmes postes à quai (pétroliers, paquebots, rouliers) et qui n’ont pas usage de grue ou de portique, la connexion à quai est plus aisée. En revanche, les porte-conteneurs ont besoin d’un plus grand nombre de points de branchement. L’installation de ces derniers est cependant gênée par les voies de roulement des portiques.
Normes électriques internationales
Depuis le vote positif de mai dernier à la Commission électrotechnique internationale, il existe deux normes qui concernent le branchement électrique des navires. L’une concerne les « systèmes haute tension de raccordement des navires à quai » (CEI/ISO/IEEE 80008-1 Ed1); l’autre, les prises de courant pour ces systèmes (CEI 62613). Par définition, la première norme ne concerne que les tensions alternatives de plus de 1 000 V et dans le cas présent, deux tensions en particulier: le 6,6 kV et le 11 kV. Les caractéristiques des tensions à fournir sont définies ainsi que celles des différentes parties composant le système (transformateur, circuit de protection, commutateur, etc.). Sont prévues des dispositions spécifiques aux rouliers, paquebots, porte-conteneurs, méthaniers et autres navires citernes. La seconde norme comporte deux parties: les règles générales et les règles de compatibilité et d’interchangeabilité dimensionnelle pour les appareils destinés à être utilisés par différents types de navires.
Le Havre, des études en cours
À l’initiative du Grand port maritime du Havre, des contacts sont pris en 2007 avec Louis Dreyfus Armateurs (LDA) afin d’étudier la faisabilité de brancher à quai le ferry Norman-Leader (navire conçu pour la ligne Le Havre-Portsmouth). Ce projet qui a rapidement recueilli l’adhésion de LDA prévoyait également, l’adaptation du terminal de Grande-Bretagne, situé au cœur de la ville, pour mettre en œuvre cette nouvelle facilité offerte au navire.
Le projet a correctement progressé techniquement et financièrement sans aboutir car, en 2011, LDA n’a pas pris livraison du navire à cause du non-respect par le chantier Technologies Marines de Singapour, de certaines spécifications contractuelles. Un nouveau projet d’alimentation électrique au quai Hermann du Pasquier est en cours d’étude.
Le GPMH a été sollicité pour fournir l’infrastructure d’alimentation électrique à quai pour des rouliers. Les études de faisabilité sont faites mais il reste encore à valider les étapes suivantes de ce projet.
Bornes électriques
Pour accompagner le développement du trafic fluvial, il est prévu d’équiper non seulement le futur terminal multimodal de bornes électriques (livraison fin 2014) mais aussi d’équiper en bornes d’alimentation électrique des postes à quai existants. Ce projet s’intègre dans une étude plus générale afin de mettre en place, le cas échéant, de nouvelles facilités pour permettre l’accueil des barges, péniches ou automoteurs fluviaux dans le port du Havre. Le développement du fluvial comme du ferroviaire, modes de transports massifiés favorables à l’environnement, représente l’un des engagements du GPMH avec un objectif de part modale globale de 25 % en 2020.
Au Havre, la basse tension est expérimentée depuis longtemps pour les navires de servitude. Le GPMH dispose en permanence d’une dizaine de ces unités (drague(s), remorqueurs, vedettes de surveillance, etc.). Dès qu’elles sont à leur quai, elles se branchent sur le réseau local, évitant ainsi des émissions atmosphériques « inutiles ».
M.N.
La Méridionale bientôt sous haute tension?
Dès que la Compagnie méridionale de navigation sera assurée de son avenir de transporteur sur la Corse, le projet de branchement à quai de ses rouliers mixtes pourra démarrer. En attendant, le port et l’exploitant peaufinent les détails techniques et administratifs.
Au bout de quelques années de réflexion sur la faisabilité de brancher électriquement les navires à quai afin qu’ils n’utilisent pas leurs générateurs, il est apparu que la clientèle « idéale » était les rouliers mixtes desservant la Corse, explique Sophie Rouan, responsable du département voyageurs énergie au Grand port maritime de Marseille (GPMM). Leurs escales sont fréquentes, longues et toujours effectuées au même quai. De plus, leurs besoins électriques sont « moyens » contrairement aux paquebots qui, en outre, utilisent souvent du 60 Hz. Enfin, les ferries de la continuité territoriale changent peu. La SNCM a durant quelque temps étudié le dossier puis l’a refermé compte tenu d’autres priorités plus prégnantes.
Des rouliers moins exigeants
Dans le même temps, la CMN a étudié également le sujet d’autant plus facilement que ses rouliers mixtes sont moins exigeants en puissance électrique que les grands ferries de la SNCM. Techniquement, cela convenait bien au GPMM. Au fil des réunions, le projet s’est affiné, puis a été chiffré. Équiper les trois postes à quai qu’utilisent les rouliers mixtes de la CMN en 11 kV, 50 Hz avec une connectique montée sur portique représente un investissement de l’ordre de 1,5 M€ pour le port. Auquel il faut ajouter un peu plus de 2 M€ pour équiper les trois navires.
Selon les relevés d’émissions réalisés à bord des rouliers, cela fera économiser par an, pour l’ensemble de la flotte, la production de 49,5 t. de COV (composés organiques volatils); 4,3 t. de SOx; 49,3 t. de NOx; 7,7 t. de particules (tous diamètres confondus) et 6 864 t. de CO2. Et rien dans les centre-villes corses car même pour ces navires, la production électrique locale ne permet pas, à ce jour, ce genre de luxe.
Si techniquement et administrativement, le GPMM est quasiment prêt à démarrer, la longue saga qu’a connu la délégation de service public concernant la desserte maritime de la Corse a ralentit le projet d’électrification des postes à quai de la CMN. Aux dernières nouvelles, les bénéficiaires de la DSP pourraient être désignés à la mi-2013. Un an plus tard, l’électricité pourrait être disponible sur les quais. Idéalement, les navires devraient avoir été équipés pour s’y brancher.
À Marseille comme ailleurs, les connexions basse tension de certains quais existent depuis des années. Au GPMM, elles aliment les navires en réparation navale, à flot ou à sec, et pour les navires en hivernage.
Navires moins polluants, escales havraises moins chères
Début le début d’année, une quarantaine de compagnies maritimes a signé la charte d’engagements proposée par le Grand port maritime du Havre, visant à la réduction des émissions atmosphériques des porte-conteneurs et autres rouliers. À la fin de l’année, les dix plus « vertueuses » se verront offrir une réduction de leurs droit de port pouvant aller jusqu’à 10 %. Un bilan de l’opération sera tiré à la fin d’année afin de déterminer la suite pour 2013.
Le GPMH a ainsi rejoint le programme ESI (Environnemental Ship Index) mis en place dans 13 autres ports européens qui cherche à inciter financièrement les transporteurs maritimes à en faire plus que le minimum obligatoire en termes de réduction des émissions atmosphériques de leurs navires. Un fonds dédié a été créé au Havre pour financer les récompenses de la bonne volonté. Cela permet également d’améliorer l’acceptabilité sociale de l’activité portuaire, si d’aventure, ses émissions plus ou moins néfastes venaient à être connues.