L’année 2011 aura été exceptionnelle pour le trafic ro-ro à Montoir, doublé grâce à la ligne Montoir-Gijón lancée en septembre 2010, et dont les résultats auront dépassé les espérances. 2012 voit le trafic de la ligne se maintenir, stabilisé, drainant une clientèle à 80 % espagnole ou portugaise implantée à l’ouest d’une ligne Gijón-Valladolid-Madrid. De janvier à juin 2011, la ligne a enregistré 11 352 équivalent poids lourds (en cumulant véhicules neufs et camionnettes) contre 12 164 à la même période en 2012, alors que le trafic passagers est passé de 19 901 à 20 824 passagers.
« Après sept mois d’exploitation le taux de remplissage a atteint presque 75 %. Aujourd’hui on est à 80 %. On a peu avancé, note Antoine Person, secrétaire général de Louis Dreyfus armateurs.La raison est double. D’abord, un déséquilibre: on a plus de camions montant vers le Nord qu’à la redescente. C’est dû à la faible part du trafic international du marché français du transport, et au fait que les camions passés à la montée rechargent ailleurs et repassent par l’autre façade, ou reviennent de l’Atlantique en piquant vers Barcelone. » Autre hiatus, les week-ends affichent complet, mais impossible de séduire en milieu de semaine où les taux de remplissage plafonnent de 30 % à 40 %. « On a fait des offres au retour à vide à 100 €, au lieu de 450 € en montée. Sans succès malgré tous nos efforts. C’est manifestement plus une option de schéma logistique qu’une question de prix. » Pour parer à cet alea, LDA a envisagé un second navire, mais l’hypothèse reste en stand by. « Le week-end, ce serait une bonne chose, mais les résultats de milieu de semaine font plus qu’effacer l’éventualité… » Restent les gestes commerciaux classiques, rabais au nombre de camions, formules d’abonnements, négociation entre quatre yeux avec chaque client. La solution pour Antoine Person: que l’État subventionne l’autoroute de la mer et ses navires comme infrastructures de transport, avec un fond de cale garanti, comme les autoroutes terrestres. Il préconise aussi que la subvention à l’armateur, pour tirer un tarif plus intéressant que la route, profite aussi au chargeur et au transporteur.
Aujourd’hui, au regard des critères d’aides publiques et européennes, les passagers sont plutôt encombrants. Selon les règles européennes, les subventions ne doivent financer que du fret. Le trafic passager constitue un cinquième de la recette et vient en déduction des bilans présentés par l’armement pour toucher ces subventions, la ligne ne devant pas faire de bénéfices dans la période aidée. L’armement est face à un dilemme: la part passagers n’ayant pas été intégrée par le plan de financement, ce pourrait être la cerise sur le gâteau. « Au contraire, c’est plombant. On en a même monté les prix pour ne pas faire beaucoup de passagers, mais on a toujours », soupire Antoine Person.
Le port fournit les infrastructures, rampe et surface logistique, l’armement a passé un accord avec les deux États, français et espagnol, qui se sont engagés pour sept ans, jusqu’en 2017 avec un calendrier dégressif des aides. Ils ont octroyé chacun 15 M€ sur les quatre premières années, à quoi s’ajoutent 4 M€ du fonds européen Marco Polo.
Inquiétude du moment lié à la crise ibérique et européenne: « On a des faillites de clients, et des ardoises non réglées qui nous obligent, pour préserver la santé de la ligne, à refuser de charger certains clients en difficulté. Mais on reste optimiste sur les principes: quand le prix est bon, ça fonctionne. Les résultats sont stables malgré la crise. »