À défaut de tenter d’évaluer les motivations de ses candidats, l’École nationale supérieure maritime offre aux élèves de 1re année un stage de voile dans une école prestigieuse, celle des Glénan. Une façon de constituer un groupe, peut-être. Cette innovation pédagogique a “interpellé” le Syndicat national du personnel des Affaires maritimes (SNPAM) dans une note du 15 juin. L’absence d’objectif pédagogique liée à ce stage et la grande faiblesse des ressources financières de l’ENSM inquiète le SNPAM. Mais les sujets d’inquiétude sont nombreux et a priori partagés par l’UNSA Développement durable. Cette dernière évoque dans une sorte de trac daté de juin une « situation proche de la faillite ». Elle demande que la situation financière de l’ENSM soit « enfin clairement présentée » et que le « non-renouvellement aveugle des contrats ENSM, déjà engagé, soit gelé ».
L’alerte avait été sonnée dès la fin d’année dernière: une « décision modificative urgente (DMU) de 61 000 € a été autorisée afin de permettre la rémunération du personnel en 2011 », indique le compte rendu du Conseil d’administration (CA) de novembre rédigé par les représentants des personnels, enseignants ou non, et les élèves. Sans compter cette DMU, la perte de fonctionnement pour 2011 est de plus d’un million d’€. Il était question « d’adopter au plus vite des mesures de redressement de ses comptes d’exploitation. »
« Il faut maintenant réduire les dépenses de fonctionnement de l’ENSM causées notamment par l’éclatement des services », a expliqué le Directeur général. Il reconnaît, selon le compte rendu, « qu’une partie du déficit de 2011 est structurelle alors que le but de l’ENSM était de réduire les coûts de fonctionnement des 4 ENMM ».
Dans sa note du 15 juin, le SNPAM souligne que l’ENSM est « déjà dans l’incapacité de payer ses factures », 240 k€ impayés à ce jour, « elle ne sera pas en mesure de payer les salaires du personnel d’ici à la fin de l’année civile. […] Cette semaine, les contractuels du Havre ont été informés qu’aucun d’eux ne sera renouvelé administratif et professeur. […] Pour Le Havre, le sentiment est que tout est fait par la direction pour rendre la gestion du site impossible et arriver à la conclusion que le site doit fermer ».
En novembre, la connaissance des patrimoines fonciers de l’École a donné lieu à des échanges contrastés et l’inévitable question de la multiplicité des sites pour former chaque année 160 officiers de la filière A et 60 de la filière professionnelle est revenue sur le tapis. À ce sujet, Eudes Riblier, président de l’École, a, selon le compte rendu du CA, rappelé les changements de position de la tutelle: à la création de l’ENSM, il est question de quatre sites, puis en novembre, la ministre demande que l’on réfléchisse à n’en conserver que deux. Les centres appelés à disparaître « seraient » St-Malo et Le Havre. Un audit très confidentiel devant être réalisé à ce sujet. La Direction des Affaires maritimes a refusé de prendre à sa charge les 80 000 € que représente le coût de cet audit devant être « exclusivement » mené par un organisme public.
Ces problèmes que rencontrent les élèves pour trouver des stages embarqués commencent à mieux s’expliquer: certes les employeurs français ont réduit leur voilure mais le nouveau cursus des études a prévu que ces stages auront lieu qu’en été. Il y a donc forcément une saturation des capacités.
Mettre fin à la malédiction
Depuis au moins le début des années 90, la question de la multiplicité des sites de formation est régulièrement posée, notamment par le ministère des Finances, compte tenu de la faiblesse des effectifs et du surcoût de la formation. “Courageusement”, la décision politique sursoit à statuer. Une idée lumineuse avait été trouvée en “refilant” les bébés et leur eau de bain aux Régions. Pas de chance, quelqu’un s’est aperçu dans la haute administration que les Régions n’ont pas de compétence en matière d’enseignement supérieure. Retour à la case départ. Nouvelle idée: une seule école quatre sites, au moins au début. Le 3 juillet, le nouveau ministre de tutelle exprime le souhait de conserver les quatre sites. La veille, il a expliqué aux membres de l’association TDIE, que la “coloration” de son action politique allierait « pragmatisme et efficacité ». Les membres du gouvernement sont « au service de l’intérêt général », leur rappelle la charte de déontologie, et non pas à celui d’intérêts régionaux. Pour éviter tout soupçon de partialité régionale tout en alliant pragmatisme, efficacité et visibilité internationale, il ne serait pas totalement vain d’examiner l’installation d’un seul site dans les pré-alpes dauphinoises, du côté de Port-Revel, avec obligatoirement une cogestion privée/publique