« On ne pourra bientôt plus faire des relèves d’équipage en France! Sans parler du cas de marin blessé ou rapatrié, qu’il faut le remplacer par un marin d’un autre port qui n’a pas de visa Shengen », dit Serge Pierre, consignataire Sealogis à Dunkerque. La profession râle contre les obstructions administratives à ces changements d’équipages non européens. Les armements et leurs représentants jugent les Français bien trop stricts pour les marins, comparés aux Belges et Néerlandais. Ça coince à Roissy où Chinois, Africains, Latino américains n’obtiennent plus directement de visa, même de courte durée, à l’aéroport. Il faut passer par l’ambassade, après une lettre d’invitation de l’agent, des formulaires, pléthore de renseignements à fournir. Pour Jean-Pierre Scouarnec, p.-d.g. d’Euro Docks Services à Rouen, « cette règle n’est vraiment pas faite pour le shipping. Les marins sont mobilisables à tout moment par les armateurs. On peut avoir besoin d’un changement d’équipe dans le week-end, alors que les ambassades, où il faut réclamer les visas, sont fermées ». La réactivité des armements butte sur les délais pour obtenir un rendez-vous à l’ambassade de France du pays d’origine du marin. Seule dérogation – « et pour combien de temps? », se demande Serge Pierre –, les Philippines, où la multiplicité des îles rend difficile de se rendre à la capitale Manille. « Il n’y a pas d’immigration chez les marins. À part lors des printemps arabes sur des navires égyptiens, et encore, rien à voir avec les visas, puisqu’ils se contentaient de ne pas rejoindre le bord à l’escale », ajoute-t-il.
Pour tenter d’assouplir ces entrées et sorties de France, la Facam, Fédération des associations de consignataires de navires et agents maritimes, a rencontré le gouvernement en avril. Un contact est prévu avant le 14 juillet avec le nouveau ministère. Pour le moment, la diplomatie française a établi une procédure d’accélération de l’obtention d’un accord de visa des marins dans ses ambassades et consulats à travers le monde. Pas suffisant pour la Facam, qui souhaite une obtention en 24 heures, plaidant que le suivi des marins par les consignataires garantit contre leur évaporation dans la nature en assurant leur prise en charge de Roissy au bord, à l’arrivée, et du quai à leur avion, à la sortie.