Dès le mois de novembre, alors qu’il était reçu par le député-maire de Boulogne-sur-Mer, le futur président de la République n’a pas fait mystère de la nomination de ce dernier à la tête d’un ministère de la Mer en cas de victoire. Mais lors de la formation du gouvernement, Frédéric Cuvillier a été le premier surpris à l’énoncé de son poste qui inclut le domaine des transports. Le ministre délégué n’est pas novice en matière de transports maritimes et d’économie portuaire. « Il a été à rude école », commente Guy Lengagne, l’ex-secrétaire d’État à la mer de 1983 à 1986. Après avoir été son assistant parlementaire alors qu’il préparait sa thèse de droit public, le Boulonnais Frédéric Cuvillier (43 ans) lui emboîte le pas dans tous ses mandats: maire de Boulogne, président de la Communauté d’agglomération du Boulonnais, député depuis 2007 (il siège alors à la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire).
C’est encore vrai lorsqu’il cosigne Le défi maritime français, un document de 40 pages écrit dans le cadre de la campagne du candidat socialiste à la présidentielle. Cette publication, qui participe à la réflexion du PS sur les problématiques liées à la mer, n’est pas sans en rappeler une autre. En 1980, Guy Lengagne a cosigné un livre programmatique, certes plus épais, La mer retrouvée.
Une nomination porteuse d’espoirs
Sur le littoral du Nord-Pas-de-Calais, la réputation du ministre est faite. « Sa nomination est une excellente nouvelle pour la Côte d’Opale », assure Jean-Marc Puissesseau, président la Chambre de commerce de la Côte d’Opale. « Il nous permettra de réaliser les investissements nécessaires pour développer le port de Calais et mettre à niveau l’installation portuaire du port de Boulogne-sur-Mer. » Quant à l’aspect transports, les Calaisiens annoncent qu’ils « ne tarderont pas à évoquer avec lui le dossier de l’arrêt des Eurostars en gare de Calais Frethun ».
À Dunkerque, le ministre est aussi attendu de pied ferme. Ainsi, Franck Gonsse, le secrétaire général de la Chambre syndicale des ouvriers du port mensuels et intermittents (CSOPMI), dit compter sur une « forte volonté en matière d’investissements avec le soutien ministériel dans la lignée de… Thierry Mariani ». Il pense notamment à la création, dans le cadre du plan stratégique du Grand port maritime, des nouveaux bassins de la Baltique (pour les vracs) et du Pacifique (pour les conteneurs). « Les études ont été lancées. Il faut passer au plus vite au débat public », dit-il. 650 M€ doivent être investis sur la base d’un montage État/Région/Europe.
Franck Gonsse évoque également des investissements en matière de transports combinés, l’achèvement de l’électrification des voies ferrées et une flexibilité des procédures douanières pour rendre le port plus compétitif par rapport à ses voisins européens.
Autant de souhaits que l’on retrouve dans Le Défi maritime français. La tâche sera d’autant plus ardue que Frédéric Cuvillier y pointe la décentralisation portuaire de 2004 qui « a eu pour effet de la part de l’État […] de se désengager des ports d’intérêt national » et « d’organiser une concurrence entre ports français ». À Boulogne, la ville du nouveau ministre, Guy Len-gagne ne l’a pas digéré. « Il faut que l’État intervienne davantage, en concertation avec les collectivités locales », plaide-t-il. Tout en laissant poindre un ton dubitatif sur le pouvoir réel d’un ministre. Il en sait quelque chose.