Droit français contre droit international

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Le 24 mai au matin, un collège de 10 juges s’est réuni pour examiner le pourvoi en cassation des parties civiles et de Rina. Une audience publique avec plaidoirie des avocats. Le prononcé de la décision devrait être renvoyé à plus tard. Le pourvoi des parties civiles est destiné à obtenir des garanties de paiement de leurs indemnités. Elles refusent de voir Total échapper à ses obligations et craignent que les sociétés condamnées soient insolvables. Les thèses de l’avocat général en faveur d’une cassation s’appuient sur trois moyens. En premier lieu, les juridictions françaises ne seraient pas compétentes pour juger ce sinistre en raison de la survenance du naufrage dans la ZEE. La loi du 5 juillet 1983 ne serait pas applicable, ni des sanctions pénales. Ensuite, si les juges acceptent la compétence des tribunaux français, seule la juridiction civile serait compétente. Enfin, la réparation du préjudice écologique ne peut être obtenue du fait de son exclusion par les conventions internationales.

Des points qui font débat. Pour les parties civiles, la convention de Montego Bay de 1982 poursuit un double objectif de liberté de navigation et de qualité des mers. Leur avocat, Maître Jean-Pierre Mignard, souligne qu’il « faut avoir une lecture dynamique de ce texte de 1982 et non dogmatique afin de rechercher la volonté du législateur ». L’État de Malte n’a engagé aucune poursuite depuis 1999 et ne s’est opposé en rien aux procédures engagées en France. La position de l’avocat général, selon les parties civiles, « nie le droit des États côtiers à se protéger contre les pollutions de leur territoire ». Pour Armateurs de France, le lieu du naufrage hors de la zone de souveraineté de la France n’empêche pas l’État côtier de juger de l’affaire. La France dispose toujours de moyens pour juger de ce dossier en raison « de la gravité de son préjudice ou des manquements de Malte », État du pavillon de l’Erika. Surtout, précise Armateurs de France, « cela ne signifie pas que la France soit systématiquement incompétente pour juger des pollutions survenues sur ses côtes ».

La survenance du naufrage

L’autre point de divergence entre les deux parties porte sur le droit applicable. Pour Armateurs de France, la France peut appliquer son droit interne dès lors qu’il se conforme aux conventions internationales actuellement en vigueur, à savoir Marpol et la CLC. En l’espèce, s’indigne Armateurs de France, les juges ont mélangé procès pénal et procès civil. En appliquant le droit international, la France ne peut appliquer aussi le droit français s’il est plus sévère que les conventions internationales. « Une sévérité encadrée qui permet de préserver les marins de sanctions inhumaines ou excessives lorsque le droit de l’État-juge pratique des sanctions réprouvées par les droits de l’homme ». Le droit international permet aussi, selon Armateurs de France, de canaliser les responsabilités vers le seul armateur, responsable de la sécurité du transport. Le juge devrait poursuivre, dans ce cas, la personne morale. Or, dans le procès de l’Erika, il a poursuivi une personne physique, « se privant de possibilité de sanctionner plus lourdement l’armateur ». De plus, ce droit international évite toute responsabilité de l’affréteur qui ne peut être tenu responsable des fautes commises par le transporteur, sauf à le prouver. Et Armateurs de France dénonce le fait que l’instruction aurait été menée pour désigner le seul responsable solvable, l’affréteur. Pour les avocats des parties civiles, la loi française permet d’aller chercher les responsables de la pollution, « au-delà des apparences ». Et dans cette loi, l’article 8 dispose de sanctionner toute personne exerçant un pouvoir de contrôle ou de direction sur la gestion du navire. En l’occurrence, Total pourrait être tenu pour responsable. « Total, c’est le choix de la vétusté et des risques, continuent les avocats. Le capitaine est le seul maître à bord, après la compagnie pétrolière. » De plus, Maître Corinne Lepage souligne que la convention CLC détermine une responsabilité civile pour l’affréteur.

Préjudice écologique

Quant au préjudice écologique, que l’avocat général réfute, les parties civiles estiment que l’indemnisation s’est faite au titre « d’un préjudice moral de nature écologique ». Pour Armateurs de France, ce préjudice est plus philosophique que juridique. L’organisation des armateurs souligne que les dommages ont été intégralement réparés. Et pour finir, Armateurs de France souligne qu’en appliquant le droit international, les responsables auraient été sanctionnés et les victimes indemnisées. « On peut même espérer que les erreurs grossières de l’instruction auraient été évitées. » « La France a rendu vengeance certainement. La question de la justice, c’est-à-dire de la bonne application du droit, sera tranchée par la Cour de cassation. »

Prochaines commandes pour Louis-Dreyfus Armement

Venu exprimé sa perception du monde maritime lors du 4e rendez-vous de l’assurance transports qui s’est tenu à Paris les 22 et 23 mai, Philippe Louis-Dreyfus, p.-d.g. et principal actionnaire de LDA, a expliqué que dans les prochains mois, son groupe allait acheter pour environ 330 M$ de navires. Du même ordre donc que la commande annoncée en janvier 2011 qui portait sur quatre Capesize et quatre Handysize. LDA a vendu, au plus haut ou presque, une bonne partie de sa flotte de vraquiers quelques mois avant la crise de l’automne 2008. « Je suis optimiste en ce qui concerne le redressement des marchés. Il se produira en 2013 ou après, mais il se produira », a estimé Philippe Louis-Dreyfus. Le transport et la logistique des vracs secs représente environ 50 % du chiffre d’affaires du groupe. Les services maritimes aux industriels (transport des éléments des avions Airbus, câbliers pour Alcatel et autres navires géodésiques), les remorqueurs de haute mer et l’assistance à l’installation et à l’entretien des éoliennes offshore font le reste. Le transmanche en ferries est une activité « médiatique mais marginale » qui représente 3 % du chiffre d’affaires.

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