La forme de radoub no 10 part en croisière

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En 1975, la forme de radoub no 10 est inaugurée après quatre ans d’un chantier colossal de 500 MF. À l’époque, Marseille-Fos voit déjà son avenir en grand. Les installations de Fos surgissent à peine des marécages. Le pétrole coule à flots. L’année précédente de l’inauguration, le volume des hydrocarbures a dépassé les 94 Mt, 85 % du trafic total de 109 Mt. Un double record.

Avec ses dimensions de 465 m sur 85 m, les plans de la nouvelle forme avec quai accolé répondent aux dimensions des supertankers. Le rêve des géants des mers se brisera au premier choc pétrolier (1973). En 1974, la réparation navale marseillaise couvre 70 % du marché national avec plus de 6 000 ouvriers. Les formes existantes dont les plus grandes, les 8 et 9 construites au début des années 1960, avouent alors un taux d’occupation supérieur à 95 %. Deux ans plus tard, l’activité est profondément ébranlée. Face à l’irruption des chantiers asiatiques puis proche-orientaux, l’Union européenne organise la retraite de l’industrie navale. Le groupe Terrin, qui représente la moitié de l’activité marseillaise, disparaît en 1978. L’agonie se prolongera pendant 20 ans sur fond d’un conflit sociopolitique dont Marseille a le secret.

La forme 10 est réduite à un rôle ponctuel (jumboïsation, barge pétrolière, méthaniers) quand il ne sert pas de parking à paquebots d’une compagnie en faillite.

Lorsqu’en 2006 l’établissement public lance un appel à projets sur la plus grande forme d’Europe, c’est du bout des lèvres. « C’est plus un appel à idées », s’excuse Christian Garin, alors président du PAM. Pour mieux faire passer le morceau, la zone est découpée en quatre lots. Quatre candidats se présentent, mais deux au moins tournent le dos à son passé: un port de plaisance enterré et robotisé et une marina sortent des cartons. En 2007, c’est le groupe CMA CGM qui l’emporte avec un projet plutôt industriel de réparation de porte-conteneurs. Avant de se retirer en 2009. La base du premier armateur de France a été ébranlée par une grave crise. De toute manière, le tribunal administratif de Marseille a cassé l’appel après la saisie en référé d’un des candidats. L’établissement public devra reprendre la procédure à zéro, en 2010.

L’union des industriels navals de la croisière

Surprise, lors du dépouillement des offres, une solution inespérée se présente. On apprend fin janvier que l’établissement entre en négociation exclusive avec un groupement constitué des no 2 et no 4 mondiaux de la construction de paquebots, STX France et Mariotti, du no 1 de la réparation navale en Méditerranée, la société génoise San Giorgio Del Porto, et de sa filiale marseillaise CNM qui exploite les formes 8 et 9 du port de Marseille-Fos. Le groupement qui représenterait un poids lourd de la réparation et des refontes dans le secteur de la croisière prévoit, en plus, la possibilité d’ouvrir son capital à des armateurs de croisières.

« La signature d’un contrat pourrait être effective en mars », estime Jean-Claude Terrier, le d.g. du GPMM. « L’objectif est de remettre la forme 10 en service fin 2014 pour profiter de la mise en ligne en Méditerranée des toutes nouvelles unités en construction dans le monde et dont la taille est supérieure à 330 m. » « Déconnectés auparavant de leurs liens avec le port, les chantiers navals trouvent aujourd’hui avec la croisière une nouvelle raison. 65 % de la flotte mondiale croise en Méditerranée. Il ne s’agit pas d’un marché captif mais d’un marché cohérent », explique Patrick Daher, président du conseil de surveillance du GPMM. Mais avant de redémarrer, la plus grande forme de Méditerranée (bien avant Palerme: 390 m) aura besoin d’une sérieuse remise en état. Les réseaux sont à refaire, les grues à rénover et l’indispensable bateau-porte à consolider. La seule réparation de ce dernier est évaluée à 10 M€.

Sur le terrain, on veut aussi y croire. Depuis l’arrivée en octobre 2010 de la société génoise San Giorgio Del Porto qui a créé la CNM dans les formes 8 et 9, l’activité semble bien orientée. Pier-Enrico Beraldo, directeur adjoint du CNM, indique que « non seulement les infrastructures marseillaises intéressent énormément les armateurs, mais les navires de croisière que nous y avons traités appartenaient à des clients que nous avions déjà à Gênes et qui ont retrouvé ici les mêmes compétences et la même politique industrielle ». La mise en cale sèche du paquebot Costa-Deliziosa suite à un problème technique en décembre a impressionné les professionnels par son efficacité. Jérôme Amata, délégué CGT, reconnaît que « pour l’avenir de la profession, nous sommes en grande partie rassurés. Plus personne n’ose dire aujourd’hui qu’elle est devenue obsolète ».

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