« Ni un congrès scientifique ni un salon professionnel, mais une journée pédagogique à caractère scientifique. » C’est ainsi que résume Jean-Pierre Martineau, l’organisateur de la Journée science navale (JSN), qui la définit plutôt comme « une plate-forme d’échanges entre les différents acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche ». École navale oblige, certaines conférences (éco-conception des sous-marins, par exemple) ont bien plus traité de sujets purement militaires. Mais, désireux comme à l’accoutumée d’aborder des thèmes plus larges, les organisateurs n’en ont pas pour autant négligé des aspects plus spécifiques à la marine marchande. Lors de la table ronde organisée en fin de journée, Frédéric Pouget, directeur du pôle armement et maritime de Brittany Ferries, s’est d’ailleurs assis aux côtés de Michel Accary, directeur technique et innovation de DCNS. Et, dans sa conférence d’ouverture, le président du Gican, Jean-Marie Poimbeuf, a rappelé que les objectifs ambitieux du Grenelle de la mer concernent autant les marchés civils que militaires. « Pour concevoir un navire intelligent, économe, propre et sûr, le bouquet de technologies innovantes à mettre en œuvre entre 2012 et 2030 englobe un très large spectre », a-t-il résumé.
D’un côté, les matériaux et la construction d’un navire ainsi que son mode de propulsion devront tendre à le rendre plus économe, plus propre, plus opérationnel et plus sûr. Et cela passe par de l’allégement, de la réduction de traînée et du renouvellement dans les modes de propulsion (électrique, hybride, vélique, solaire…) tout comme dans la récupération ou l’optimisation énergétique. « L’objectif visé par rapport à la consommation actuelle de carburant est de 10 % à 20 % d’ici 2015 », a indiqué le président du Gican. Directeur général de Wärtsilä Ship Power en France, Jean-Michel Henry a quant à lui prôné l’utilisation du GNL. « Dans le défi technique face aux normes IMO Tier III et Seca, le gaz est aujourd’hui la solution la plus alternative, la plus évoluée, la plus propre, la plus facile à mettre en œuvre et la moins chère », a-t-il expliqué en citant entre autres les deux ro-pax commandés par Viking Line. En France, cette solution se heurte portant encore à la réglementation et à la logistique portuaire qui reste à mettre en place.
Quelle place pour l’homme
La propreté d’un navire passera, elle, par la détection et la dépollution (salissures des coques, fumées…), par la réduction des bruits et vibrations et la protection des mammifères marins. Plus ambitieux, l’objectif de réduction de l’impact environnemental sur le cycle de vie des navires atteint ainsi 50 % d’ici 2015. Un objectif qui passe par la réduction des déchets dans l’atmosphère, celle des déchets liquides et solides et l’éco-conception. « Notre ambition est d’anticiper et de dépasser les exigences réglementaires », a même souligné Jean-Marie Poimbeuf en citant, pour 2012, 50 % de CO2, 95 % de SOx, 80 % de NOx et 99 % de particules en moins ainsi que des teneurs en polluants deux fois plus faibles et 0 % de rejets.
D’un autre côté, les systèmes embarqués (pilotage/accostage automatique, détection d’évitement d’obstacles, prédiction des mouvements…) ainsi que le monitoring et l’aide à la décision auront pour objectif de rendre le navire plus intelligent, plus opérationnel et plus sûr. Lors de la table ronde qui a clos la journée, ce point particulier a d’ailleurs suscité des réactions. « Le marin est-il un ingénieur ou un navigant? », a interrogé un participant quand le remplacement des écrans actuels par de la « réalité augmentée » a été évoqué. « Il ne faudrait pas se retrouver dans un jeu vidéo, a fait valoir un autre. On ne peut pas rejouer quand on a raté son coup… » Parlant de « la mer qui bouge, la mer qui rouille, la mer qui mouille et qui fait justement le sel de la vie de marin », le directeur du pôle armement et maritime de Brittany Ferries a eu cette formule: « Navires du futur il y aura, mais hommes il faudra. » Mise de plus en plus à la même sauce que les navires marchands en termes de réduction de personnel embarqué, la Marine nationale s’est empressée d’acquiescer. Réfutant l’idée d’un envahissement des passerelles et des salles des machines par une panoplie d’automatismes, tous ont espéré un lien très fort entre les concepteurs de systèmes embarqués et les utilisateurs.