Costa-Concordia: l’échouement qui devrait faire date

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Vers 21 h 45 le 13 janvier, le Costa-Concordia, paquebot de 290 m et 8,20 m de tirant d’eau construit en 2006 par le chantier italien Fincantieri, heurte, par nuit claire et mer calme, un rocher qui se trouve à moins de 50 m de l’île du Giglio, dans l’archipel toscan. Formé par six îles, cet archipel est depuis 1996 le plus grand parc marin d’Europe. La coque se déchire sur 30 m selon certaines sources; sur une centaine de mètres pour d’autres. Le premier communiqué de Costa Croisières, filiale du groupe Carnival, premier opérateur de croisières dans le monde coté à New York et à Londres, indique que le navire est sorti de Civitavecchia et se dirigeait vers Savonne. « Le commandant qui se trouvait alors sur la passerelle […] a immédiatement compris la gravité de la situation et a entrepris une manœuvre pour la sécurité des passagers et des membres d’équipage. Il a lancé les procédures d’urgence afin de préparer une éventuelle évacuation […]. Malheureusement, cette opération a été compliquée par l’inclinaison soudaine du navire qui a rendu l’évacuation particulièrement difficile. » Faut-il comprendre que les portes étanches étaient ouvertes alors que le navire était en mer, si près de la côte? Cela constituerait une faute grave contraire aux exigences de la convention Solas. De nombreuses conversations informelles laissent entendre que les navires de charge, au moins, naviguent souvent portes étanches ouvertes car cela facilite les allées et venues de l’équipage. Toujours selon Costa, soumise comme tout le monde aux procédures de sûreté, le navire avait à son bord « environ » 3 200 passagers dont « environ » 1 000 Italiens, 500 Allemands et 462 Français, et « environ » 1 000 membres d’équipage, sans distinction entre le personnel de conduite pont et machine et les ADSG (agents des services généraux, cuisine et hôtellerie).

Selon les témoignages de passagers, recueillis par les agences de presse, l’évacuation a été pour le moins confuse. La proximité immédiate de la côte a cependant permis l’arrivée rapide des secours. La référence au 14 avril 1912, date de la collision du Titanic avec un iceberg, a été récurrente. Confirmé par le procureur en chef de la ville de Grosseto, le débarquement précipité du commandant Francesco Schettino (52 ans) a surpris. Il a été placé en détention provisoire pour avoir quitté le navire et mit la vie d’autrui en danger.

Le rapport du BEAmer attendu avec impatience

En Méditerranée, mer qui « plonge » très vite, la navigation au plus près de la côte est de pratique courante afin que les passagers puissent bénéficier de la vue. Le droit à l’erreur de navigation en est d’autant plus réduit.

Smit Salvage a été chargé de vider les soutes à combustible qui contiennent 2 380 t de fuel lourd. Dans le plus grand parc marin d’Europe, cette mission risque d’être largement surveillée. Il n’y a évidemment aucune raison de douter que le Bureau italien d’enquête technique sur les événements de mer mettra un point d’honneur à rédiger dans les meilleurs délais un rapport détaillé sur les circonstances de cet accident spectaculaire mettant en cause un paquebot italien exploité par un grand groupe italien. Les boîtes noires (Voice Data Recorders) seront, comme il se doit, précieusement conservées. L’Agence européenne de la sécurité maritime pourrait y veiller. De plus, le succès commercial de cette activité est probablement en jeu. Personne n’étant obligé de faire une croisière, si la clientèle européenne – et surtout américaine (qui constitue 60 % de la demande mondiale) – commence à avoir un doute sur sa sécurité, ce secteur du tourisme qui résiste mieux que les autres, aura un « sérieux problème de marketing », pour reprendre l’expression d’un ancien cadre supérieur de la construction navale française.

En France, les préfets maritimes ont plusieurs fois attiré l’attention sur leur incapacité à porter une assistance efficace aux paquebots de forte capacité en cas d’avarie grave survenant à une certaine distance de la côte. En mai 2009, lors du premier rendez-vous de l’assurance transports, les assureurs corps faisaient part de leur crainte en cas de sinistre majeur d’un grand paquebot transportant 5 000 passagers américains.

Parmi les précédents, le sinistre du Monarch-of-the-seas, échoué volontairement sur une plage de Saint-Martin en mars 1998, revient en mémoire. Les passagers ont débarqué dans le calme et dans l’ordre.

462 Français, confirme le ministère des Affaires étrangères

Selon le communiqué du 16 janvier du ministère français des Affaires étrangères, 462 passagers de nationalité française sont inscrits sur le manifeste de bord du Costa-Concordia. « Nous déplorons le décès de deux de nos ressortissants. Deux autres sont légèrement blessés. Nous sommes sans nouvelle de quatre passagers français pour lesquels le centre de crise poursuit les vérifications en liaison avec les familles », indique le quai d’Orsay.

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