Le réalisateur Marc Pivarez a suivi les onze marins estoniens et russes du porte-conteneurs Pirita, cabotant entre Rotterdam, Brest et Montoir. Une rotation par semaine. Des contrats de trois à cinq mois. Ces marins disent l’éloignement de leur famille, la naissance du bébé, les premiers pas, sans eux. « Pourquoi notre bébé ne bouge pas? » s’inquiète un marin philippin dans un seamen’s club relié à sa femme via skype. « L’image est saccadée ici aussi », déplore une femme à Manille. La connexion prend fin en un « Je t’aime » plein de lassitude.
Fédération de comités d’entreprises, le Centre de culture populaire a accueilli le réalisateur en résidence à Saint-Nazaire, ouvrant ce premier sillage au film aujourd’hui long de 22 mn, trois fois moins que la version finale.
Avec des escales à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, juste une dizaine d’heures, rares sont les marins à pouvoir descendre à terre. « Pas plus de 10 % au Havre », note Guy Pasquier, prêtre navigant, 15 ans de navigation comme électricien, sac à terre en 2008. Comment s’étonner que ces temps à quai, dans des terminaux derrière des grilles, où la présence humaine est minime, mènent les marins à parler si souvent de « vie en prison », d’« enfermement »? D’autant que le code ISPS a renforcé les contrôles. Avec des contrats plus longs, de six à dix mois et une tendance à durer plus longtemps, les Philippins parlent de « sacrifice », malgré les 2 000 $ par mois, trois fois moins qu’un marin européen.
Le film Le monde est derrière nous sera présenté le 26 janvier au festival « Premiers plans » à Angers au cinéma Les 400 Coups à 19 h 30. À partir de mai, un site internet fera de ces premiers montages un web documentaire.