Interrogé sur l’offre de Rodolphe Saadé de contractualiser l’évolution tarifaire (JMM du 21/10, p. 7), Jean-Louis Cambon, président de la Commission du transport maritime à l’ESC, note qu’elle fait « écho à d’autres prises de position de la part d’armateurs et de chargeurs sur le même sujet. Déjà, en avril, les participants à la Global Shipping Conference ont bénéficié des explications détaillées de Nicolas Sartini, responsable des lignes Europe-Asie de CMA CGM à propos du concept MAF, Market Adjustment Factor, progressivement introduit sur le marché Asie-Europe par la compagnie. Reposant sur l’adoption d’un indice de marché dont les extrêmes seraient écrêtés, l’accord joint des deux parties sur un niveau de fret (couvrant le coût industriel et un niveau de marge raisonnable) comme point de départ et la mise en place d’un facteur d’ajustement du fuel, ce système devrait en théorie permettre à chacun, chargeur comme armateur, de “rester dans le marché”, en gommant les embardées des taux que l’on connaît depuis toujours, après comme avant la fin des conférences maritimes ».
À contractualiser
Pour que ce système fonctionne il faut réunir plusieurs éléments, estime Jean-Louis Cambon:
– un cadre formel de contrat précisant l’ensemble des droits et obligations des parties avec des seuils de tolérance définis. Ainsi, le chargeur fournira des prévisions régulières et fiables et s’engagera sur un volume hebdomadaire avec minima et maxima.
L’armateur garantira la stabilité des éléments du service sur lequel le chargeur a bâti sa supply chain (fréquence, transit-time, capacité). Tout changement de service fera l’objet d’un préavis formel (à définir) et selon le cas pourra être une condition suffisante pour rendre l’accord caduc;
– un équilibre des pénalités: pas de deadfreight clause pour sanctionner les no-shows s’il n’y a pas une pénalité correspondante pour roll-over ou retards (à définir avec la tolérance);
– une clause de révision des éléments du coût industriel en cas de changement de flotte ou de tout facteur amenant une variation du coût industriel (fréquence à fixer);
– la libre négociation du format et du contenu de la clause d’ajustement des soutes;
– la mise en place de ce type d’accords libérerait des ressources pour les deux partis jusqu’alors consacrées aux négociations tarifaires, pour se concentrer sur des sujets d’intérêt communs et plus valorisants comme l’optimisation des positionnements ou la réduction de l’empreinte carbone.
« Le monde du transport conteneurisé est en train d’évoluer sur un grand nombre de dossiers. Rien de cela n’aurait pu être envisagé dans l’univers figé des conférences maritimes », conclut Jean-Louis Cambon.