La piraterie est un phénomène qui prend une ampleur sans précédent. « Elle génère un stress important pour le maritime, ce qui n’est pas sans effets sur l’économie de ce secteur », a indiqué Paul Tourret, directeur de l’Isemar lors de sa présentation à Iumi. Il a exposé en détail les chiffres de ce fléau notamment dans l’océan Indien. Au 18 août, l’IMB-PRC a recensé 314 actes dits de criminalité maritime ou de piraterie. Si cette dernière suscite toujours autant d’intérêt, elle touche 1 % des navires empruntant le détroit de Bab el Mandeb, au large du Yemen. Quelque cinq ou six bases terrestres ont été identifiées sur la côte somalienne où une dizaine de bandes agissent localement. Selon les chiffres exposés par Paul Tourret, 1 500 pirates évoluent dans l’océan Indien avec environ un gain de 400 $ par capture et par pirate. En plus de la situation du côté de la Somalie, l’essor des attaques à proximité du golfe de Guinée, du Bénin et du Nigeria constitue une nouvelle source d’inquiétude pour les mondes du shipping et de l’assurance. Le fléau de la piraterie touche les Européens et les Asiatiques principalement. Les premiers sont concernés parce que les navires qu’ils contrôlent ou qu’ils arment sont les principales victimes. L’Asie ressent ce phénomène puisque leur commerce international emprunte pour une large partie cette zone, soit pour approvisionner les économies asiatiques en énergie soit pour exporter la production vers les pays d’Europe. Deux raisons qui expliquent le poids important des Européens et des Asiatiques dans la lutte contre la piraterie par les marines militaires. Un coût global de surveillance qui s’élève entre 8 Md$ et 10 Md$ pour l’économie mondiale.
Gardes armés à bord
La nouvelle tendance est à autoriser les personnels armés à bord des navires. « Il a fallu du temps aux instances de Iumi pour accorder les gardes armés à bord des navires. Nous pensions que ce point appartient aux États et à l’OMI. Nous avons finalement accepté de voir des gardes armés à bord des navires », a indiqué le président de Iumi. À ce jour, aucun navire ayant à bord des hommes armés n’a été attaqué, ont relevé deux experts de Waltons & Morse LLP. Sur ce sujet, il reste aussi un gros travail à mener en matière de législation et de réglementation notamment, ont alerté différents intervenants. Alex Kemp, négociateur auprès de NYA International, société spécialisée dans les solutions de crise, a détaillé les différentes phases d’une prise d’otage de navires dans l’océan Indien. La société a traité plus de 350 cas de rançons depuis quelques années. Confronté quotidiennement à ces pirates, Alex Kemp se veut rassurant. « Les pirates ne sont pas des tueurs violents. La plupart du temps, ce sont des jeunes gens d’une vingtaine d’années. » Son premier conseil vise à prendre en compte un élément important. « Quand l’armateur est pressé par le temps de récupérer son navire, le pirate a tout son temps ». Une prise d’otage en 2005 s’étalait sur une vingtaine de jours. En 2010, elle dure 90 jours à 120 jours, voire 150. Si les gardes armés embarqués sur les navires constituent une réponse, les négociateurs pour libérer l’équipage et le navire entrent pour une large part dans la résolution de l’événement. « Nous ne sommes pas des James Bond. Notre objectif est de libérer le plus rapidement possible l’équipage et le navire en payant la somme appropriée », continue Alex Kempf. Et il donne le calendrier des actions à mener au cours de cette prise d’otage avec les évolutions de chaque partie entre la demande de rançon et la somme maximum à payer. « Nous ne sommes pas les payeurs et nous n’intervenons pas dans ce domaine. Nous sommes une tierce partie pour éviter toute escalade. » Gardes armés, négociateurs professionnels, marines militaires déployées, autant d’élément qui « nourrissent » une communauté. Pour tous les intervenants à la chaîne logistique, « il est de l’intérêt général de payer une rançon qui ne soit pas élevée », souligne Alex Kempf.