Créée en 1983, Soget a été bâtie sur un partenariat entre les douanes françaises et la communauté portuaire havraise. Toutes les composantes de cette communauté sont représentées: les clients du port au travers de l’Umep, les armateurs et agents maritimes avec le Ghaam, les transitaires par le STH, les manutentionnaires par le Segemo et le Grand port maritime du Havre. Spécialisée dans la logistique de l’informatique portuaire, Soget est aujourd’hui à un virage de son évolution. « Nous développons d’autres métiers à l’image de la coopération mise en place avec le Bureau Veritas pour répondre aux appels de guichet unique portuaire », explique Pascal Ollivier, directeur du développement. Le choix de se lier au Bureau Veritas tient essentiellement à la position de ce dernier au niveau international, continue le directeur du développement de Soget. En effet, le Bureau Veritas a développé une activité internationale de services auprès des gouvernements et acteurs du commerce international. Outre cette ouverture avec BV, Soget a noué des liens avec Microsoft. Ensemble, avec la société de Bill Gates, la Soget a créé « e-maritime », la nouvelle génération de guichet unique. « Nous sommes en train de passer d’une société de services à un éditeur de logiciel », précise Pascal Ollivier. La Soget va encore plus loin et a noué un partenariat avec le ministère chinois du commerce pour développer un système informatique de tracking entre les ports chinois et les ports français.
LA SOGET À L’ORIGINE DE L’EPCSA
« Depuis 2005, nous avons décidé d’ouvrir nos compétences à l’international sous l’impulsion de Jean Louis Le Yondre, président du conseil de surveillance de la société », continue Pascal Ollivier. Des coopérations avec des entreprises privées mais aussi des missions d’expertise auprès des organisations internationales. Les responsables de la société sont intervenus auprès de l’Organisation mondiale des douanes, de la Banque mondiale et de l’Organisation des États américains. C’est en intervenant comme expert dans ces institutions que la Soget a décidé d’enfourcher un nouveau cheval de bataille en créant, avec d’autres sociétés, l’Association européenne des systèmes communautaires (EPCSA, European Port Community System Association). L’objectif de cette association est avant tout de travailler en collaboration avec la Commission européenne sur les directives touchant à l’informatique douanière, maritime et portuaire. Née récemment, cette association regroupe déjà les sociétés des ports de Felixstowe, Hambourg, Brême, Rotterdam, Barcelone et, bien entendu, Le Havre. « Nous ne voulons pas modifier les choses mais simplement pouvoir intervenir en amont des directives pour faire en sorte qu’elles collent au plus près des réalités du terrain. » Et Pascal Ollivier d’expliquer son propos en prenant l’exemple de ICS (réglementation communautaire de déclaration préalable à l’arrivée de la marchandise). « Nous aurions fait les choses différemment de ce que la Commission a décidé. Nous devons maintenant nous adapter mais nous voulons aussi travailler avec la Commission pour inciter l’ensemble des ports de la communauté à être équipés en 2015 de guichet unique portuaire. »
TROIS ESPACES RÉGIONAUX DANS LE VISEUR
Lancée dans le développement sur le continent européen, la Soget n’en oublie pas pour autant d’étendre son aura tous azimuts. Dans son viseur, elle place trois espaces régionaux: l’Afrique, l’Amérique du Sud et la Caraïbe pour y implanter des guichets uniques. « Nous avons pris conscience d’un manque d’expertise dans la mise en place de guichets uniques. Entre la réforme sans cesse des procédures et les tâches quotidiennes des acteurs portuaires, il fallait organiser le changement au niveau national. Nous sommes intervenus auprès de la Banque Mondiale comme expert pour mettre en place les concessions de guichets uniques portuaires. » La Banque mondiale a une expertise reconnue de concessions pour les routes, les quais ou toutes sortes d’infrastructure, mais peu sur l’immatériel comme l’informatique portuaire.
DÉCLINER LES RÉALISATIONS HAVRAISES
Les guichets uniques entrent dans le cadre de partenariats public-privé. Les autorités portuaires et douanières ont compris que leur rôle doit s’arrêter devant l’exploitation de guichets uniques portuaires, ils ont donc pris l’option de concéder ce service à des sociétés privées. Déjà, Soget et BV ont noué des partenariats avec des acteurs locaux pour mettre en place un guichet unique dans le port béninois de Cotonou. « Nous voulons décliner ce que nous avons réalisé au Havre », explique Pascal Ollivier, à savoir d’unir dans un même destin l’ensemble de la communauté portuaire. Sur Cotonou, cette unité de la communauté portuaire a permis aussi de prendre conscience des potentiels de développement vers les pays enclavés d’Afrique de l’Ouest. Être opérateur ne signifie pas seulement créer et exploiter un système portuaire, mais aussi développer avec les acteurs locaux des nouveaux systèmes pour accompagner la croissance du trafic portuaire. La concession du Bénin a démarré, dans sa phase opérationnelle, le 1er juillet, alors que le contrat a été signé en novembre dernier. Ce système de concessions de guichet unique en concession avec Soget a d’abord été mis en place à l’Île Maurice dans le cadre d’un joint-venture avec le gouvernement. Ces deux expériences réussies sont un catalyseur pour la société pour continuer à se développer sur d’autres pays du continent africain. « Nous avons engagé des discussions avec une quinzaine de pays sur l’ouest et l’est du continent et dans l’océan Indien. »
Autre cible de la Soget, l’Amérique du Sud et les Caraïbes. Le canal de Panama doit normalement disposer de ses nouvelles écluses en 2014 pour accueillir des navires plus grands. « Dans ce contexte nouveau, tous les opérateurs locaux, qu’il s’agisse des autorités portuaires ou des opérateurs de terminaux, réfléchissent à leur positionnement dans la région », explique Pascal Ollivier. Une réflexion menée tant sur l’infrastructure que sur l’automatisation. Être capable pour un port de jouer un rôle de hub signifie qu’il doit disposer de trafics intérieurs mais aussi d’une offre logistique pour apporter une valeur ajoutée aux conteneurs transbordés. Trois ports jouent actuellement ce rôle dans la région des Caraïbes: Puerto Caucedo en République Dominicaine, Kingston en Jamaïque et Nassau aux Bahamas. « Dans ce contexte de réflexions, nous avons une carte à jouer. » Et Soget discute actuellement avec une dizaine d’îles dans la région. Pour se placer sur ces marchés en devenir, Soget développe même une offre destinée aux navires de croisières. Un module de traitement des données pour ces navires et les ferries devrait voir le jour dans les prochaines semaines. Outre les îles de l’arc caribéen, la société havraise est entrée dans une phase d’études avec des pays d’Amérique latine. « Nous négocions actuellement avec plusieurs pays des concessions de guichet unique », indique Pascal Ollivier. En outre, Soget a participé à des études au Pérou sur la mise en place de ces procédés pour le compte de la Banque Inter américaine de Développement. Face à ces changements importants, Soget prévoit d’équiper deux à trois places portuaires par an sur les prochaines années pour arriver à quelque 15 ports en 2015 dans le monde. Si la société regarde de l’autre côté des frontières son développement, elle n’en oublie pas pour autant son territoire de prédilection qu’est la France. « Elle représente un grand chantier pour nous. » Elle est présente au Havre, à Rouen, à Pointe à Pitre, Dunkerque, Calais, Caen, Honfleur et sur l’axe de la Seine. « Nous regardons sur tous les ports. Avec les besoins d’automatisation, nous pouvons apporter un plus à chaque port pour répondre aux exigences de ses clients. L’automatisation est un outil de marketing car il offre une meilleure compétitivité. » Alors, la société étudie actuellement des systèmes interportuaires dans le cadre des intégrations douanières, maritimes et portuaires régionales. Une interopérabilité qui s’étend jusqu’en Europe.