« En cette fin d’année 1985, tout paraît inciter a priori au pessimisme », estimait Patrick Gautrat, délégué général du CCAF (JMM du 19/12/1985, p. 3038). Les facteurs déséquilibrant le transport maritime sont les mêmes qu’en 1984: restée « considérable » dans le vrac sec et au pétrole, la surcapacité s’aggravera « certainement » en 1986 pour les lignes régulières. La persistance de commandes de construction neuves trop nombreuses – « surtout en Extrême-Orient » – de même que le ralentissement de la demande de transport constituent autant de contrepoids « néfastes aux rares signaux encourageants enregistrés çà et là: accélération du rythme des démolitions et réduction des désarmements ».
Les compagnies françaises ont fait face et pris leurs responsabilités, « et là réside sans doute le principal acquis d’une année qui aura vu se développer un effort d’adaptation se traduisant à la fois par la rationalisation des activités, la modernisation des outils et le redéploiement international, là où il s’imposait ».
Si les entreprises s’adaptent pour survivre, « les individus n’en saisissent pas encore toute la portée. Leur adhésion est pourtant essentielle […]. De même, les pouvoirs publics doivent-ils comprendre que le maintien d’une exploitation compétitive de navires sous pavillon français – problème à la fois financier, commercial, social et stratégique – relève aussi de leur responsabilité et donc d’un ensemble d’options politiques claires et acceptées par la Nation ».
Dans cette mutation mondiale, la France, dans l’Europe, a « encore ses chances si une volonté s’exprime », estimait François Rozan, président du CCAF (JMM du 2/1/1986, p. 6)
« Mais sans attendre que celle-ci se concrétise, les armateurs français, responsables de leur entreprise – et non du pavillon français – ne sont pas restés inactifs. Nous sommes allés dans le sens d’une plus grande liberté, d’une plus grande indépendance et d’une indispensable internationalisation pour rester compétitifs et sauver notre fonds de commerce. […] Pour maintenir ce pavillon français, il y a deux types d’actions […] indispensables. La première sur le plan national, c’est la définition d’une politique volontariste et réaliste et nous l’attendons. Mais sans attendre […], il faut que nous puissions élaborer, et c’est notre intention avec nos partenaires sociaux, une politique pour définir ensemble les nouvelles conditions de travail à bord des navires afin de nous adapter aux évolutions profondes du moment ». L’arrêté du 17 juin 1986 portait extension de l’immatriculation à Port-aux-Français. Il était remplacé en mars 1987 par un décret pris en conseil d’État, « plus complet et plus précis et surtout juridiquement plus “solide” » (JMM du 2/4/1987, p. 741).