Journal de la Marine Marchande (JMM): Quel bilan dressez-vous du port de Sète en 2010?
Robert Navarro (R.N.): L’an dernier, le port de Sète a progressé dans tous les domaines et s’affirme comme une plate-forme très performante au niveau national. Avec 3,4 Mt, le trafic est en hausse de 16 % par rapport à 2009. Les marchandises diverses augmentent de 45 %, les vracs liquides de 13 % et les vracs solides de 10 %. Longtemps abandonnée par l’État, la plate-forme se dote à présent d’outils industriels et logistiques. À travers la Région Languedoc-Roussillon (L.-R.), propriétaire du port de puis 2007, et l’EPR Port de Sète Sud de France, gestionnaire, la puissance publique investit 200 M€ d’ici à 2020 dans la remise à niveau de l’outil portuaire: remise aux normes des quais existants, création de près de 2 km de nouveaux quais pour améliorer la capacité d’accueil et diversifier les trafics. Les investisseurs privés suivent: nouvelle usine de Lafarge Ciments, terminal fruitier d’Agrexco (inauguration en mai 2011), création d’un pôle agro-industriel (déjà livré), développement d’un trafic de voitures (Hyundai, Renault, Toyota)… Mais notre stratégie ne s’arrête pas au développement d’un seul port. Nous misons sur la mise en réseau de nos quatre ports: Port-Vendres, Sète, Port-la-Nouvelle et, bientôt, L’Ardoise dans le Gard rhodanien. Ces interconnexions offrent une multitude de potentialités logistiques et économiques.
JMM: Quid du port de Port-la-Nouvelle?
R.N.: Il y aura, à Port-la-Nouvelle, autant de développement dans les cinq prochaines années que nous en avons eu à Sète depuis trois ans. Au terme des investissements prévus (environ 300 M€ d’ici à 2014, privés et publics confondus), la plate-forme audoise pourra accueillir jusqu’à trois navires de plus de 200 m. Le positionnement de Port-la-Nouvelle va être complètement modifié et intéresse les industriels. Nous allons avoir deux ports de Sète en L.-R.! Une base arrière, à vocation logistique, devrait être aménagée à Sallèles-d’Aude, sur le modèle du projet porté à Poussan, pour Sète, dans l’Hérault (100 ha). Il faut pouvoir reconditionner les produits réceptionnés. À Port-la-Nouvelle, deux gros dossiers industriels sont en cours de négociation dont un projet d’usine d’huile de palme. Ces deux projets concernent la création de plusieurs centaines d’emplois directs sur un foncier de 40 ha. Si on réussit le projet d’huile de palme, entre 150 et 200 chercheurs d’Agropolis International (Montpellier) iraient travailler là-bas. Et des wagons viendraient s’accrocher à ces deux locomotives.
JMM: Sur le port de Sète, vous avez repris la compétence plaisance (au 1er janvier 2011) d’une main de fer…
R.N.: La Région L.-R. veut juste mettre le port de Sète en conformité et en faire un port exemplaire, haut de gamme, à l’horizon 2020. L’EPR Port de Sète Sud de France (gestionnaire) va faire des propositions au printemps. Nous avons déjà injecté 1,5 M€ dans le curage et le nettoyage des canaux de Sète. Nous avons sorti des tonnes d’épaves, des dizaines de voitures… Il y avait de tout. Progressivement, tout le monde payera. Au fur et à mesure que les appontements seront au niveau, toutes les concessions seront revues.
JMM: RFF possède toujours les faisceaux ferrés sur le port de Sète. Leur transfert à la Région L.-R. permettrait de relancer le terminal de transport combiné. Où en sont les négociations avec RFF?
R.N.: Nous sommes passés d’un projet d’acquisition à une logique de mise à disposition sous forme de conventionnement. Pour l’euro symbolique, la Région L.-R. aurait à disposition la gestion et l’utilisation de l’ensemble des infrastructures ferrées du port de Sète pour 30 ou 50 ans, RFF restant propriétaire. Cette solution arrange tout le monde: les utilisateurs, l’EPR Port de Sète Sud de France, les entreprises et nous-mêmes. Sur ce dossier, j’espère aboutir avant l’été.
JMM: Le développement des croisières est un axe fort, avec l’accueil, du 12 au 15 octobre prochain, de l’assemblée générale de Med Cruise. Quel est votre avis sur cette filière?
R.N.: Accueillir l’AG de Med Cruise est un beau coup. Mais attention, il reste beaucoup à faire. À Sète, les quais n’ont rien de piétonnier, rien d’accueillant. Il y a très peu de boutiques, d’hôtels près des quais, de commerces, de restaurants de qualité… Bref, il manque des choses pour que les croisiéristes aient envie d’aller visiter Sète. Des réflexions sont en cours avec Thau agglo et la Ville. Quant à la gare Orsetti, qui est une verrue, elle sera rasée et reconstruite.