Un mois après le début de l’insurrection en Libye, les ports de l’est du pays demeurent à l’arrêt et les exportations de pétrole fortement ralenties. La situation sur le terrain entre les pro et antiKadhafi a évolué en une semaine. Les forces du colonel sont en train d’arriver aux portes de Benghazi, bastion des antiKadhafi. Les partisans du colonel ont en quelques jours repris notamment le contrôle des ports pétroliers de Ras Lanouf et Brega. Tout en menant une violente reconquête du territoire de l’est du pays, le clan Kadhafi a multiplié au fil des jours les appels pour rassurer la filière pétrolière internationale. Le régime libyen a assuré le 13 mars « avoir sécurisé ses ports » et appelé « les sociétés étrangères à renvoyer leurs pétroliers pour charger du pétrole brut ». Même son de cloche du côté de la Compagnie pétrolière nationale libyenne: « Les ports pétroliers libyens sont devenus sûrs après qu’il ait été mis fin aux actes de sabotage, et sont désormais opérationnels. » Shukri Ghanem, président de la Commission pétrolière nationale, a indiqué le 15 mars que « le gouvernement libyen honorera les contrats conclus avec les compagnies pétrolières occidentales mais pourrait revoir à l’avenir sa coopération en raison de la crise actuelle ». Une déclaration qui fait suite à un appel, le 14 mars, du dirigeant libyen en direction de la Russie, de la Chine et de l’Inde « à investir dans le secteur pétrolier libyen ». Depuis le début de l’insurrection, soit il y a un mois, seuls deux pétroliers auraient embarqué dans l’Est libyen du brut à destination de la Chine. Actuellement, les exportations de pétrole libyen sont évaluées entre 200 000 et 300 000 barils par jour (bj). En temps normal, ce sont 1,3 Mbj qui quitte la Libye pour l’Europe (80 %), la Chine et l’Inde (14 %), les États-Unis et le Brésil (9 %). Selon certains analystes, « le retour à la normale de la production de pétrole brut et des exportations pourrait prendre un an ». La baisse des exportations libyennes est compensée par une augmentation de la production en Arabie Saoudite. L’or noir des pays d’Afrique de l’Ouest peut aussi se substituer au pétrole libyen. Ces changements de provenance entraînent des évolutions temporaires des flux et pourraient avoir pour conséquence une forte hausse des coûts du transport, note Braemar Shipping Service (BBS). Le scénario le plus optimiste évalue un doublement des coûts, le plus pessimiste une envolée de 222,3 %. Les trajets Moyen-Orient-Europe ou Afrique de l’Ouest-Europe sont plus longs que ceux Libye-Europe. Il y a une forte probabilité pour que le pétrole du Moyen-Orient, via le canal de Suez, desserve prioritairement l’Europe du Nord-Ouest au détriment des États-Unis, avance BBS. Ce dernier pays deviendrait alors plus dépendant du pétrole en provenance d’Afrique de l’Ouest. Les modifications des flux concerneraient donc non seulement la Méditerranée mais aussi l’Atlantique. Du coup avec toutes ces évolutions, les navires utilisés pour le transport de la matière première devraient aussi changer. La situation devrait profiter aux Suezmax et aux VLCC, au détriment des Aframax. Selon BBS, ce sont entre 8 et 23 VLCC qui pourraient être nécessaires à ces évolutions temporaires des flux et entre 15 à 44 Suezmax. Les affrètements au voyage devraient sans doute être aussi privilégiés.
7 jours en mer
Vers une évolution temporaire des flux de transport du pétrole
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