Des projets qui avancent lentement

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Un projet industriel ne se fait pas en un jour. L’investissement est en général très élevé, sa durée d’amortissement court sur plusieurs décennies. De l’ébauche de l’idée aux premiers coups de pioche, un certain nombre de procédures doivent être respectées. Et les années passent. Pour un projet de terminal méthanier, trois étapes majeures doivent être franchies, relève Marc Girard, directeur général de Dunkerque LNG SAS, en charge du projet Dunkerque pour EDF. La première concerne « l’acceptabilité du projet par le public ». C’est notamment le temps du débat public et de ses réunions sous la direction de la Commission nationale du débat public (CNDP) avec la présentation du projet par un document écrit, le dossier du maître d’ouvrage, mais surtout des échanges avec les riverains. À ce jour, les débats publics ont bien eu lieu pour les quatre projets français. Pour Dunkerque, Antifer et le Verdon, les débats publics se sont tous tenus au cours des quatre derniers mois de 2007. Si les dates sont similaires, les degrés d’acceptabilité par les riverains sont variés. « Il existe un discours diffus au sein du public suivant lequel on se passerait bien de tout nouvel établissement industriel sur un territoire qui compte déjà un nombre impressionnant de sites Seveso. Néanmoins, ce discours paraît concurrencé par un autre qui met en exergue le taux de chômage important qui sévit sur le territoire et qui voit ce projet comme un facteur de création d’emplois et de croissance économique. L’acceptabilité du projet d’un port méthanier à Dunkerque paraît alors forte », conclut la CNDP dans son bilan du débat public du projet de Dunkerque. Il n’en va pas de même pour les autres. Pour Le Havre-Antifer, « si les enjeux essentiels tenant à l’économie nationale et européenne rencontrent une certaine adhésion, l’opposition au projet est trop évidente pour être contestée ». Pour le Verdon, « l’opportunité du projet est une question très débattue. Les partisans avancent en priorité les retombées positives qu’il peut avoir sur l’activité économique locale, tout en soulignant la nécessaire protection de l’environnement. Les opposants craignent avant tout que l’on porte atteinte à l’image de leur région. Et certains considèrent que la réalisation de trois terminaux concurrents pose problème ». Enfin, pour Fos Faster, dont le débat public a eu lieu du 6 septembre au 17 décembre 2010, « si les milieux économiques, le Conseil régional Paca, la CGT accueillent positivement le projet, il n’en va pas de même pour la majorité des acteurs […]. Les réticences sont nombreuses et concernent presque tous les aspects du projet ». Après les bilans des débats publics, les maîtres d’ouvrage disposent de trois mois pour faire connaître leur décision de continuer ou non leur projet, quitte à le modifier pour mieux le faire accepter par les riverains. Pour les projets Dunkerque et Le Havre-Antifer, les maîtres d’ouvrage ont décidé de poursuivre leur projet. Ils ont assuré avoir tiré les enseignements des échanges lors des débats et modifié une partie plus ou moins grande de leur projet en conséquence. « Suite au débat public, neuf projets sur 10 sont modifiés par les maîtres d’ouvrage », relève Philippe Deslandes, président de la CNDP. De son côté, le cas du Verdon apparaît particulier car le maître d’ouvrage 4Gas a certes, en juin 2008, confirmé « la poursuite du développement de son projet ». Mais, au cours de l’été 2009, la décision de Dominique Bussereau, alors secrétaire d’État aux Transports, également élu local, de ne pas renouveler la réservation de terrain sur le port à 4Gas, a porté un coup fatal au projet. En ce qui concerne Fos Faster, le bilan du débat public ayant eu lieu le 17 février, le maître d’ouvrage doit faire connaître sa position d’ici la mi-mai 2011.

Structuration du projet

La deuxième étape de la réalisation d’un terminal méthanier consiste en « la structuration du projet d’un point de vue industriel », poursuit Marc Girard. C’est le temps pour les maîtres d’ouvrage des dépôts des diverses demandes d’autorisations administratives: permis de construire, permis d’exploiter une installation classée Seveso, permis au titre du code des ports maritimes, de la loi sur l’eau, etc. La troisième étape du projet est celle du montage commercial et financier. Si c’est la troisième phase du projet, cela ne signifie pas qu’elle commence après les autres, au contraire. C’est un point déterminant travaillé en amont, explique Philippe Cracowski, président de Fos Faster LNG Terminal SAS. Ce projet a bouclé son débat public mi-février mais Shell et Vopak, les deux porteurs du projet, ont déjà des pistes de clients potentiellement intéressés. À l’issue de la décision du maître d’ouvrage, si elle était positive, il s’agit en effet de faire connaître au marché, au travers d’un processus d’open season, l’existence du projet pour permettre à tous les clients potentiels de se déclarer intéressés par rapport aux services qui seront proposés sur le futur site. Le porteur du projet connaît alors les attentes des clients potentiels du site, peut adapter les services du terminal aux besoins exprimés, définir le tarif. Sachant qu’un terminal méthanier comprend trois services principaux: l’accostage (slot), la capacité de stockage et la capacité d’émis- sion dans le réseau. En ce qui concerne le projet de Dunkerque, c’est cet appel au marché et le tour de table qui en résulte « qui est le point sensible aujourd’hui pour le projet de terminal méthanier à Dunkerque, indique Marc Girard. Nous avions réalisé un premier tour de table dans lequel figurait, parmi d’autres, notre filiale allemande EnBW. Suite à sa sortie en décembre 2010, EDF a dû lancer un deuxième appel au marché début février 2011. Il s’agit, entre autres, de donner l’opportunité à EnBW, qui n’est plus une filiale d’EDF, de confirmer son intention de rester partie engageante ou non pour 2 Mdm3. Ce deuxième appel doit aussi permettre à tout client susceptible d’être intéressé par un engagement dans le futur site de se manifester ». Pour le maître d’ouvrage du Havre-Antifer, Gaz de Normandie (GDN), société notamment détenue par Poweo, c’est l’appel au marché qui n’a pas donné les résultats escomptés. « Nous avons respecté toutes les procédures administratives et légales. GDN a investi 22 M€ dans les études d’ingénierie et d’impact environnemental depuis 2007. Mais il n’est pas possible de porter tout seul un projet d’un montant de plus de 800 M€. Nous avons besoin de partenaires industriels. La réservation du terrain à Antifer étant parvenue à son terme début janvier 2011, nous avons choisi de ne pas la prolonger. Mais notre projet à Antifer reste pertinent et nous demeurons sur les rangs pour le prochain appel à proposition du Grand port maritime du Havre », précise Ivan Roussin, directeur de la communication de Poweo. De son côté, Gilles Fournier, président du conseil de surveillance du GPMH, assure qu’Antifer « est un bon endroit pour faire un terminal méthanier et le GPMH garde ses terrains libres pour un tel projet. Quand nous jugerons que la conjoncture est redevenue positive, peut-être dans trois ou quatre ans, nous relancerons un appel d’offres ». Il faut surtout noter que les projets de terminaux méthaniers en France ont été lancés dans une période faste pour le gaz naturel avec une demande très forte, des prévisions à l’avenant, tout un discours sur les avantages du gaz dans le cadre de l’après-pétrole et dans un contexte de protection de l’environnement. Puis la crise économique de mi-2008 est survenue avec pour conséquence une baisse de la consommation du gaz, notamment industrielle, et des prix de cette matière première.

Enfin, une certaine frilosité des investisseurs s’est instaurée par rapport aux projets industriels et leurs coûts particulièrement élevés.

Projet Fos Faster

Le porteur du projet est la société Fos Faster LNG Terminal SAS. Elle associe le groupe Vopak LNG Holding BV à hauteur de 90 % et la société des pétroles Shell (10 %). Le terminal méthanier serait implanté à Fos-sur-Mer, à l’extrémité sud de la zone du Caban. Le projet comprendrait un appontement, deux réservoirs et une usine de regazéification. Dans ce cas, la capacité annuelle d’émission serait de 8 Mdm3 de gaz naturel, soit 6 Mt de GNL. Une extension à 16 Mdm3 serait possible et nécessiterait la réalisation d’un deuxième appontement, de deux autres réservoirs et d’un équipement de regazéification supplémentaire. À 8 Mdm3, le trafic annuel serait de 90 méthaniers.

Projet Dunkerque

Le porteur du projet est la société Dunkerque LNG SAS pour le compte d’EDF. Le terminal méthanier serait installé au sein du Grand port maritime de Dunkerque (GPMD).

Il serait prévu deux postes de réception, deux systèmes de déchargement, trois réservoirs, une unité de regazéification. La capacité oscillerait entre 6 Mdm3 et 10 Mdm3. 80 à 120 méthaniers (260 000 m3) par an pourraient être réceptionnés sur le site, soit un navire tous les 4 ou 5 jours.

Projet Le Havre-Antifer

Le porteur du projet est la société Gaz de Normandie (GDN). Cette dernière associe Poweo (34 %), la Compagnie industrielle maritime (CIM, 17 %), E.ON Ruhrgas (24,5 %) et Verbund (24,5 %). Le terminal méthanier serait situé sur la commune de Saint Jouin Bruneval mais dans l’emprise du port du Havre-Antifer. Le projet comporterait un appontement et deux ou trois réservoirs. Le site pourrait accueillir les plus gros méthaniers, les Q Max (260 000 m3). La capacité annuelle d’émission s’élèverait à 9 Mdm3 de gaz naturel, soit 7 Mt de GNL.

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