Un peu plus de trois semaines après le début de l’insurrection en Libye entre la partie est du pays et le pouvoir central, il est difficile de faire un point précis de la situation. Les combats entre les « rebelles de l’Est » et les « forces pro-Kadhafi » sont intenses sur la côte orientale de la Libye, là où sont implantés des ports en lien avec les infrastructures pétrolières installées à proximité, c’est-à-dire dans le bassin de Syrte. Des combats sont aussi signalés à l’ouest du pays tandis que le calme règne dans la capitale Tripoli. Sur la côte, les affrontements ont pour conséquence l’arrêt des activités dans au moins deux ports de l’Est: Ras Lanouf et Marsa El Brega. Le plus grand port libyen, Es Sider, serait toujours opérationnel ainsi que celui de Tobrouk. La ville de Ras Lanouf aurait été bombardée à plusieurs reprises en début de semaine par les forces pro-Kadhafi, mais la raffinerie et le terminal n’auraient pas été frappés. Les deux camps ont assuré depuis le début de l’insurrection en Libye, à la mi-février, vouloir « préserver l’intégrité des infrastructures pétrolières et économiques du pays ». Un engagement qui semble pour l’instant respecté. Avec l’arrêt de la raffinerie de Ras Lanouf, ce sont environ 200 000 barils de pétrole par jour (bpj) qui ne sont plus produits. Selon des estimations de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la production de la Libye pourrait avoir diminué d’au moins la moitié, soit 800 000 bpj. La Libye, membre de l’Opep, produit environ 1,6 Mbpj, soit moins de 2 % de la consommation mondiale. Près de 85 % des 1,6 Mbpj libyen sont destinés à l’Europe (Italie, Allemagne, France). Le reste part en Asie, principalement à destination de la Chine. Malgré les assurances répétées de l’Arabie Saoudite, membre de l’Opep, d’augmenter sa production pour compenser la baisse de celle de la Libye, les prix du brent se sont envolés aussi bien à New York (près de 120 $) qu’à Londres (près de 115 $) en début de semaine.
Le prix du brent s’envole
Le baril a ainsi renoué avec des niveaux de prix qui n’ont plus été atteints depuis septembre 2008. « Les inquiétudes des pays consommateurs sont principalement psychologiques. Il n’y a pas de pénurie sur le marché », a relevé Mohamed Ali Khatibi, représentant de l’Iran à l’Opep. L’Iran préside actuellement cette organisation. Si ce point peut être exact, il faut aussi noter que, pour les raffineries européennes, le pétrole libyen est précieux du fait de sa composition particulièrement légère en soufre et donc plus facile à transformer. L’or noir saoudien ne possède pas ces mêmes caractéristiques et ne peut donc remplacer exactement le pétrole libyen. Les conséquences de la chute de la production libyenne ne sont pas non plus mineures en ce qui concerne le transport de produits pétroliers. Selon la lettre hebdomadaire de Gibson Research, la crise libyenne bouleverse déjà le secteur des Aframax en Méditerranée. Mais elle pourrait également affecter celui des VLCC et des Suezmax. Ces derniers étant privilégiés au détriment des VLCC pour desservir aussi bien l’Est que l’Ouest à partir de la Méditerranée.