Ce ministère est « bien le ministère de la Mer, il est aussi le ministère des Transports et le ministère des Énergies renouvelables, deux thèmes que je sais chers à beaucoup d’entre vous ». (…) « En accord avec le Premier ministre, je souhaite que cette politique [maritime] soit forte et ambitieuse. Qu’elle soit enfin à la hauteur des atouts maritimes de notre pays. » D’où un passage obligé par la ZEE française et sa place dans le monde.
Adopté lors du Cimer du 8 décembre 2009, le « Livre Bleu, bâti sur les conclusions du Grenelle [de la mer] constitue le socle de la politique maritime que nous entendons mettre en œuvre. Une politique maritime “intégrée”, allant de la surveillance de la qualité de l’eau rejetée en mer jusqu’à l’exploration des fonds marins et au développement industriel, en passant par la protection des zones humides et du littoral ».
En ce qui concerne le transport maritime, « mon ministère continuera d’apporter un soutien déterminé aux armements et à l’emploi français, notamment au travers des aides sociales et fiscales. Mais je veux également que nous développions les autoroutes de la mer, dont la première a été lancée en septembre dernier entre Nantes et Gijón », a expliqué la ministre sans faire la moindre référence à la triste fin du service Toulon-Civitavecchia.
« Je serai également très attentive au renforcement du registre international français (RIF) dont nous fêtons les cinq ans. Conçu dans le but de défendre la compétitivité du pavillon français, il est également un élément essentiel de défense de l’emploi maritime. Avec une augmentation importante du tonnage global, ce registre a atteint son objectif, grâce notamment à la mise en place à Marseille dès février 2006 d’un guichet unique destiné à faciliter les formalités d’inscription. […] Sur le modèle du RIF, j’ai demandé à la direction des affaires maritimes de préparer, dès 2011, la création d’un guichet unique pour les navires [de plaisance] de moins de 24 m pour mettre un terme au chevauchement des procédures administratives maritimes et douanières. […] Je souhaite rapidement aboutir sur la création d’une filière française de démantèlement des navires en fin de vie. Cette filière devra être civile et militaire, et je renouvelle ma confiance dans la mission que mon prédécesseur a confiée au secrétariat général de la mer. Il nous faut également des navires plus innovants, plus rapides (à l’heure du slow steaming généralisé? ndlr) et moins polluants. Le grand emprunt, qui comportera un volet important de recherche sur le véhicule du futur, prévoit 100 M€ pour améliorer la performance environnementale de nos navires. Nous travaillerons avec vous et avec l’Ademe pour construire ensemble le “navire du futur”, un navire qui réponde à vos besoins. » Un navire à construire en Chine pour répondre aux besoins de CMA CGM, alors (lire article ci-contre).
Une réforme portuaire « courageuse et nécessaire »
Après le passage sur les énergies marines renouvelables qui ont pris du retard, le ministère a salué la « courageuse et nécessaire » réforme portuaire. « Depuis une vingtaine d’années, les ports français n’ont cessé de perdre des parts de marché sur leurs concurrents européens. Toute une partie des marchandises à destination de la France est débarquée à Anvers ou Rotterdam, puis acheminée par la route. Dans ce contexte, réformer l’organisation de nos ports, de leurs missions, de leur mode de gouvernance et de leurs moyens était une urgente nécessité pour accroître la compétitivité et l’efficacité de nos ports ».
Pour achever cette réforme, « il va falloir résoudre la question des détachements des personnels des ports dans les entreprises de manutention. C’est une étape essentielle pour assurer l’unité de commandement des personnels employés par les opérateurs de la manutention ». Il s’agit là de l’étape « décisive » de la réforme « et sans doute la plus délicate. Elle suppose en effet de régler précisément les conditions de transfert de personnels. Nous le ferons avec détermination, dans le dialogue et la concertation. […]
« La loi du 3 août 2009 […] fixe pour les marchandises acheminées vers ou à partir des ports un objectif de doublement de la part de transport par les modes alternatifs à la route. Cet objectif, ici encore, sera tenu. » Le ministère entend également favoriser la solidité des bases sur lesquels repose le développement économique. Il faut donc d’une part aider la recherche. Le Conseil d’orientation de la recherche et de l’innovation pour la construction et les activités navales (Corican) sera donc mis en place « très prochainement » après un « léger décalage ». […]
« Ce conseil sera une première étape dans la définition d’une politique de recherche maritime que je porterai en plein accord avec Valérie Pécresse et Éric Besson. »
L’ENSM, cette « grande école », doit « préserver la spécificité de l’enseignement maritime [supérieur] et lui donner « un souffle nouveau et un rayonnement international. C’est un projet ambitieux qui vise à attirer plus de jeunes vers les métiers de la mer, afin d’accompagner les évolutions du monde maritime et de notre flotte de commerce. »
Concernant la prévention et la répression des pollutions marines, « je m’engage à mettre en œuvre dans les plus brefs délais le paquet “Erika III”, relatif à la sécurité maritime et à prévention des pollutions accidentelles par les navires. J’ai également demandé que les navires abandonnés dans nos ports par des armateurs peu scrupuleux – je pense notamment à ceux abandonnés dans le port de Best – puissent être saisis et vendus. La loi sera prochainement modifiée dans ce sens. »
La suite du discours a porté sur la « gouvernance » de la politique maritime intégrée, par façade maritime.
Entendu ça et là
« La CGT n’a pas le monopole du conservatisme à Marseille », a noté Jean-Claude Terrier, président du directoire du Grand port maritime de Marseille à la suite qu’une question relative au rôle joué par Sète et Toulon sur l’évolution des mentalités portuaires marseillaises. « Il n’est pas dans la tradition portuaire française d’expliquer ses idées au public », a poursuivi Jean-Claude Terrier, ajoutant que cela constituait une erreur de nos jours. « Mesurer la puissance maritime d’un État à l’aune de la superficie de sa ZEE est curieux », a estimé, lors d’une conversation privée, un chercheur retraité de l’Ifremer se souvient que la ZEE des îles Kiribabi compte 3,6 M km2 avec une population estimée en 2008 à près de 110 400 habitants. La puissance maritime de l’archipel des Kiribabi menace-t-il pour autant le Brésil (3,661 Mkm2) ou la Chine (3,877 Mkm2)? Vaste débat. « Le premier défi des prochaines années concernera l’alimentation, même en Europe », a souligné Jean-Yves Perrot, p.-d.g. de l’Ifremer.