Marseille-Fos s’immerge dans le conflit

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La tension continue de monter autour du port de Marseille. Le 12 octobre, journée nationale, a vu la paralysie de toutes ses activités. Les consignes de la FNPD (shift, week-end, heures supplémentaires) sont scrupuleusement observées par les agents du GPMM et les dockers. Lancé le 27 septembre par la section syndicale CGT des bassins Est, le blocage des terminaux pétroliers perdure. Dix-sept jours plus tard, les 220 agents du GPMM de ce secteur se voient même rejoindre dans la grève par les salariés des quatre raffineries de l’étang de Berre. L’armada des 56 pétroliers et gaziers immobilisés en rade de Fos risque d’attendre longtemps. Avec les transports, l’énergie est un des leviers du mouvement syndical contre la réforme des retraites. Le 12 octobre, lors la manifestation intersyndicale à Marseille, agents grévistes du GPMM et salariés des quatre raffineries figuraient ainsi en tête de cortège.

Curieusement, ce n’est pas contre eux, même s’ils réclament « l’intervention des forces publiques pour débloquer les accès portuaires », que le collectif « Touche pas à mon port » porte le fer. Ce faux nez de l’Union patronale locale, créée quelques heures auparavant son entrée en scène, accuse les 34 grutiers du terminal conteneurs de Marseille-Mourepiane dans une opération de communication qui a réussi à faire le « buzz ». Refusée par le quotidien local La Provence, la page de publicité parue dans Les Échos a été largement reprise par la presse. Au nom de « l’information due aux Marseillais », l’affiche envoie les grutiers du GPMM sur l’île aux « meilleurs jobs du monde » avec pour avantages « 8 semaines de congés payés par an, 18 heures de travail hebdomadaire, 4 000 € de rémunération brute par mois, emploi garanti à vie ». Des chiffres et une mise au pilori qui seront contestés par les intéressés.

Le ton humoristique de la pub contraste avec la véhémence et la fureur des représentants du collectif. « Ça fait plus de trente ans que ça dure. L’État ne doit pas laisser faire une poignée de cégétistes en train de détruire le port… » dénonce Jean-Luc Chauvin, président de l’Union patronale, tout en se prévalant « du ras-le-bol des Marseillais » devant le désastre économique annoncé. La crainte du collectif est en fait que l’amalgame se fasse avec la réforme des retraites, « les agissements des grutiers, sous couvert d’un pseudo-intérêt collectif, vise à défendre leurs intérêts personnels ». Pour cela, ses représentants demandent « l’avancée de la mise en application de la réforme portuaire au 31 décembre 2010 ». La pression monte à Marseille-Fos sans qu’aucun espace de dialogue ne semble s’ouvrir.

Trois ans après…

En mars 2007, un conflit bloque les terminaux pétroliers pendant 18 jours. La privatisation prévue de l’exploitation du terminal méthanier, GDF2, alors en construction, donne lieu à un formidable bras de fer entre partisans du « tout service public » et ceux de la refondation portuaire. La menace d’une pénurie de pétrole et, surtout, la campagne des présidentielles qui bat alors son plein font pencher la balance du côté de la CGT. La grève la plus longue enregistrée à Marseille-Fos depuis 1992 (manutention) s’achève par un spectaculaire revirement de la direction de GDF et des pouvoirs publics qui laissent les patrons amers. La victoire syndicale sera à la Pyrrhus. Elle servira de détonateur à la réforme portuaire. Quelques mois après, une fois Nicolas Sarkozy installé à l’Élysée, le train de la réforme des ports autonomes dont le statut « archaïque » doit « évoluer », est lancé. Les responsables portuaires et économiques marseillais qui ont poussé à la roue sont aux anges. Trois ans plus tard, tout semble recommencer. Dans un contexte social et économique encore plus dégradé.

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