Au 30 septembre 1986, la Corée du Sud était déjà le deuxième constructeur du monde avec 2 Mtjb, mais loin derrière le Japon avec 5,7 Mtjb, selon le Lloyd’s Register. À l’époque, les chantiers coréens disposent d’une capacité annuelle de 4,2 Mtjb et emploient près de 100 000 personnes. Ils importent plus de 35 % des composants de leurs navires, dont les deux tiers du Japon, et bénéficient de tarifs préférentiels pour l’acier. Ainsi, selon l’Institut japonais de recherche maritime, une plaque d’acier standard fabriquée au Japon est vendue 30 % plus cher qu’en Corée. En outre, un VLCC construit en Corée coûte 27 % de moins qu’au Japon en raison de la différence des coûts salariaux. Malgré une productivité de trois fois et demie supérieure, la main-d’œuvre japonaise est six fois plus chère que la coréenne. Par ailleurs, le 1er juillet de la même année est entrée en vigueur en Corée une nouvelle loi sur les chantiers privés. Ceux-ci ne bénéficient plus des aides de l’État qui, lui, a supprimé l’autorisation de construction neuve. De son côté, l’Association des constructeurs de navires étudie des programmes de rationalisation. Toutefois, le démantèlement d’installations est exclu, car un trop grand nombre d’entre elles ne sont pas encore amorties.
Avec le temps, l’écart entre le Japon et la Corée du Sud s’est considérablement réduit. Selon le Lloyd’s Register, le premier a livré 2,8 Mtjb au premier trimestre 1996, la seconde 2 Mtjb et la Chine seulement 0,2 Mtjb. La même année, le ministère sud-coréen du Commerce, de l’Industrie et de l’Énergie élabore un plan de développement pour faire du pays le premier constructeur naval du monde. Ce secteur doit devenir un modèle de compétitivité pour toute l’industrie. Le plan prévoit de faire passer son ratio de recherche et développement de 2 % à 5 %, d’accroître la part du financement étranger et de renouveler la flotte.
Adaptation et rationalisation
Les chantiers sud-coréens ont préféré s’adapter aux demandes diverses des armements, alors que leurs concurrents japonais ont choisi de standardiser leurs navires dans les années 1990. Ainsi en 2006, le chantier Daewoo Shipbuilding and Marine Engineering (DSME) emploie environ 2 000 ingénieurs pour la conception des navires. Il dispose d’une cale de 541 m de long et 131 m de large, où sept unités peuvent être construites simultanément: très grands vraquiers, porte-conteneurs, pétroliers et plates-formes spécialisées. Plus de 1 500 entreprises sous-traitantes fabriquent les divers éléments de navires pour les chantiers, qui ont aussi pu réaliser des économies d’échelle grâce à leurs vastes installations. En outre, un navire-citerne de 300 000 tpl nécessite moins de 84 000 tôles, contre plus de 100 000 dans les années 1980. D’après l’Association des constructeurs de navires de Corée (Koshipa), les trois grands chantiers DSME, Hyundai et Samsung peuvent construire des méthaniers en 18 mois et des navires FPSO en moins de trois ans. À titre indicatif, un méthanier coûtait 200-300 M$ en 2006 et un FPSO plus de 1 Md$.
La crise économique de 2009 a frappé de plein fouet les chantiers sud-coréens, notamment par les annulations de commandes étrangères. Selon le courtier BRS, les banques ont été invitées à les aider au maximum. En outre, certains chantiers ont décidé de délocaliser une partie de leur production de navires standards en Asie du Sud-Est, de mettre en sommeil quelques cales et même de réorienter leur production vers d’autres activités industrielles.
Enfin, les dirigeants des grands chantiers participent aux conventions annuelles Jecku (Japan, Europe, China, Korea, United States), dont la prochaine se tiendra en octobre… en Chine!