Démarrée en novembre 1993, l’expérience du Caribia-Viva, mis en ligne par Corsica Ferries, fut de courte durée, se soldant par un échec en mars 1994. En mai 1997, des consignataires et des transitaires antillais reprenaient le flambeau avec le concours de Viking un opérateur havrais qui mit en service le roulier Clipper-Caraïbes. Le service Trans Terminal Caraïbe renaissait. Mais les pratiques malthusiennes des dockers martiniquais compromettaient singulièrement l’équilibre économique de l’exploitation. L’affaire « vivota » tant bien que mal jusqu’à la reprise en location-gérance le 1er février 2001 du fonds de commerce de TTAG par Marfret à hauteur de 60 %, Plissoneau, agent maritime et manutentionnaire de Martinique, détenant 20 % comme la SETP qui associait SCT et la Somacotra de Violette Ramaye. Le Neptunia puis le Nicea furent mis en service. TTAG se transforma en Ferrymar. En décembre 2008, quelques mois avant la crise de février 2009, arrivait le Marin, immatriculé au Luxembourg. Au même moment, le groupe antillais Loret, spécialisé dans les concessions automobiles mais en quête de diversification, mettait en service un ferry de 600 passagers d’une capacité de 300 à 400 m.l. Il n’a pas survécu à la crise sociétale de février à mars 2009 qui secoua les Antilles avec 44 jours d’inactivité. Pour les mêmes raisons, Ferrymar a été également lourdement touché, si bien qu’en fin d’année, il fut décidé de passer de deux à une rotation hebdomadaire compte tenu non seulement de la diminution du trafic interîles, mais aussi « d’une surenchère de la main-d’œuvre dockers en Martinique », explique Frédéric Reignier, chef de l’agence de Fort-de-France. L’espoir existe toujours de remonter à deux rotations durant l’été afin de répondre aux fortes demandes de transport de boissons. D’autant qu’en juin, le navire était correctement chargé avec 850 à 900 m.l. La réduction des rotations a amené les transporteurs routiers qui sont les principaux clients de Ferrymar, à bien mieux remplir leurs camions. Le premier semestre devrait être à l’équilibre.
Les effets curieux du développement économique insulaire
Au début, se souvient Frédéric Reignier, les flux étaient à peu près équilibrés: les usines d’une île produisaient pour les clients de l’autre et inversement, essentiellement des produits alimentaires et des boissons. La population guadeloupéenne, archipel compris, est estimée à 404 000 habitants au 1er janvier 2010; celle de la Martinique, à 402 000. Mais au fur et à mesure, des usines ont franchi les 140 km qui séparent les îles dites sœurs, limitant singulièrement les éventuelles économies d’échelle. Et le déséquilibre s’est installé, probablement durablement.
Un appontement coûteux à exploiter
Depuis octobre 2006, un nouvel appontement roulier a été mis en service à Fort-de-France d’une longueur de 80 m. Avec l’arrivée du Marin en décembre 2008, roulier équipé d’une rampe arrière axiale, Ferrymar a été contraint de faire escale à cet appontement; ce qui génère des frais de pilotage et lamanage considérablement plus élevés. En effet, pour amarrer correctement le roulier, il faut porter une aussière sur une bouée, et le tarif de pilotage-lamanage s’en ressent. Afin de diminuer les coûts et lorsque le trafic portuaire le permet, la compagnie demande, après l’accord de la capitainerie, à ce que son navire soit placé perpendiculairement au quai (en med mooring), ce qui constitue une opération plus longue et plus délicate, mais dont la tarification est sensiblement inférieure à la précédente.
Ponctuellement, le Marin « feederise » des conteneurs entre Saint-Martin et les Antilles françaises, afin d’apporter une activité supplémentaire à Ferrymar. C’est une bouffée d’oxygène dans l’attente de la reprise du marché intra-antillais, sachant qu’il n’existe aucune subvention d’exploitation pour cette activité qui assure, selon le transporteur, la continuité territoriale, véritable mission de service public.