Les pilotes au secours des langues en voie de marginalisation

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Pour clore le 96e congrès de la Fédération française des pilotes maritimes, le président Frédéric Moncany de Saint-Aignan a commencé son discours en anglais; façon d'illustrer ce qui « risquait » d'arriver d'ici deux à trois ans entre les pilotes, les remorqueurs, les lamaneurs et les officiers de port dans tous les ports de l'Union européenne. Sans parler des nombreux navires « non-Solas » qui transitent dans les ports de commerce et pour qui l'anglais est une langue très étrangère: bateaux de pêche, de plaisance ou de servitude. Ce projet inquiète les pilotes du point de vue de la sécurité des opérations portuaires.

Exceptionnellement, la FFPM n'a pas vu arriver le « boulet » que constituent certains amendements proposés par le rapporteur du projet de résolution du Parlement européen faisant suite à la proposition de directive rédigée par la Commission et concernant les formalités déclaratives applicables aux navires entrant ou sortant d'un port européen. L'amendement 7 bis note que « les exigences linguistiques nationales constituent dans bien des cas un obstacle au développement du réseau navigable. Le point 14, alinéa 4 du chapitre V de la convention Solas doit être appliqué étant donné que les États membres sont parties contractantes à cette convention. Cette disposition désigne l'anglais comme langue de communication ».

La motivation est de haute tenue, car chacun sait que la principale motivation d'une place portuaire est de limiter son développement économique. Cependant, on se souvient encore comment l'autorité portuaire de Hambourg bloqua, au nom de la sécurité, l'installation des remorqueurs du néerlandais Kotug tant que leurs équipages ne parleraient pas le « Hoch Deutsch ». Pour tourner la difficulté, Kotug recruta des officiers de l'ex-Allemagne de l'Est.

Les pilotes maritimes s'en moquent sans doute, mais l'amendement 9 ter est également remarquable et propose que la Commission « examine la possibilité de recouvrir à une langue unique dans les eaux intérieures européennes, à savoir l'anglais. »

Le retour de la libéralisation des services portuaires?

Autre sujet d'agacement d'autant plus grand que la directive devant être modernisée ne concerne que la mise en œuvre de la convention FAL de l'OMI, portant sur l'harmonisation et la simplification des formalités administratives imposées aux navires à l'entrée ou à la sortie des ports.

Ainsi, l'amendement 7 ter stipule « qu'il faut un cadre réglementaire clair en ce qui concerne la délivrance de preuves d'exonération en matière de pilotage. Les États membres doivent, dans la mesure du possible, appliquer des dispositions communes qui soient pertinentes, transparentes et proportionnées ». La justification officielle est la suivante: « Il n'est que trop fréquent que les États membres se fondent, pour décider de délivrer une preuve d'exonération en matière de pilotage, sur des arguments protectionnistes. Cela perturbe le marché intérieur et est dès lors inacceptable. Le rapporteur souhaite par conséquent souligner la nécessité d'un cadre réglementaire clair. »

Les premières tentatives pour faire annuler ces amendements ont échoué et la mobilisation des autres pilotes européens est plutôt faible, y compris ceux de Méditerranée. La FFPM souhaite cependant mettre en garde tous les parlementaires européens contre le caractère funeste de ces amendements lors de leur examen en séance plénière. Un blocage des voies navigables européennes en mai ou juin pourrait utilement renforcer l'effort de pédagogie. Rendus méfiants par les deux tentatives d'instauration de la directive sur la libéralisation des services portuaires, les pilotes français entrevoient dans ces amendements comme une volonté de sortir à nouveau le dossier.

Le pilotage hauturier menacé de disparition

La crise économique ayant réduit le nombre de navires transitant par la Manche, le pilotage hauturier français se porte mal. Il devrait prochainement passer de cinq à trois pilotes. Si le pilotage dans les détroits internationaux reste volontaire, la résolution OMI A486 (XII) recommande son utilisation dans la mer du Nord, en Manche et dans le Skagerrak. Or cette résolution est en cours de révision depuis 2009. La FFPM souhaiterait qu'elle rende obligatoire le pilote en Manche comme dans les bouches de Bonifacio. Faut-il pour autant maintenir trois pilotages hauturiers en Manche, le français, le britannique et le néerlandais?

En 2009, l'année s'est terminée par un volume total piloté en baisse de 2 % pour la métropole et les DOM-TOM. Avec cependant d'importantes diminutions dans certaines stations comme à Dunkerque ou à St-Malo. À l'inverse, Rouen s'est « bien » tenu avec un volume en très légère hausse. Au 31 décembre, la FFPM comptait 32 stations dont 2 dans les TOM et le pilotage hauturier. Ce qui représentait 350 pilotes (4 de plus qu'en 2008), 274 personnels navigants, 12 pilotes d'hélicoptères et 113 sédentaires. La moitié des pilotes maritimes a moins de 10 ans d'ancienneté. Il n'y a donc pas de problème de renouvellement des effectifs d'ici à cinq ans.

Se considérant comme le plus important employeur français de capitaines de 1re classe, la FFPM souhaite être membre du conseil de d'administration de l'École nationale supérieure maritime; école qui tarde à se mettre en place.

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