Des inquiétudes sur un ralentisse ment de l'activité pour les ports

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Les chiffres de l'Ufip (Union française de l'industrie pétrolière) démontrent des difficultés du raffinage depuis 2009. La marge brute de raffinage est de 15 ¤/t en 2009. Entre 1995 et 2008, elle était de 23 ¤/t en moyenne, avec une pointe en 2008 à 39 ¤/t. À cette date, le pétrole s'envolait avec un prix du baril supérieur à 80 ¤. Une situation dont l'industrie pétrolière a su tirer profit. Avec une capacité de raffinage proche de la demande, le différentiel était estimé aux alentours de 2 millions de barils par jour. En 2009, avec la crise économique, le paysage pétrolier mondial s'est assombri. Le différentiel entre la demande et la capacité de raffinage atteint 7 millions de barils par jour.

« En 2009, indique l'Ufip, la baisse de quantités traitées est de 13,2 % à 72 Mt. » En outre, les changements des équilibres entre les importations et les exportations est devenu criant. La France importe plus de gazole et exporte moins d'essence. « Chaque mois, depuis mars 2009, nous perdons 150 M¤ », continue l'Ufip.

Des 12 raffineries qui demeurent en activité en France, l'Ufip estime qu'il faudra en fermer un certain nombre. Selon l'Ufip, en Europe, il faudrait fermer entre 10 % et 15 % des raffineries sur le continent pour conserver une rentabilité du secteur.

Une décision sévère. La Raffinerie des Flandres, située dans la circonscription du port de Dunkerque, est encore au-devant de la scène médiatique. Lors de la présentation des résultats de Dunkerque Port, le 28 janvier, Martine Bonny, présidente du directoire, a souligné les effets de la cessation d'activité de la raffinerie. Les 10 Mt de brut reçus chaque année représentent quelque 10 M¤ de droits de port et 4,8 M¤ de recette douanières. « Dans l'hypothèse où le site est transformé en dépôt, nous n'aurions pas plus de 2 Mt », a rappelé Martine Bonny. Outre les trafics, toute l'industrie portuaire serait aussi touchée. Le pilotage, le lamanage et le remorquage auraient moins de navires à entrer et sortir et donc moins de revenus. Les agents consignataires perdraient environ 10 % à 12 % de leur activité. « Nous ne pouvons pas supporter une réduction de service par une réduction de voilure, cela signifie que nous entrerions dans une spirale infernale pour la sécurité de notre port. » Le port septentrional est devenu le symbole de cette lutte pour conserver le raffinage dans les ports. L'annonce par le groupe Total de fermer la Raffinerie des Flandres fait grand bruit. Une décision qui implique des effets pour le port.

Dunkerque n'est pas le seul touché par cette réorganisation du raffinage en France. Nantes Saint-Nazaire, Rouen et Marseille-Fos tirent en grande partie leurs revenus des trafics pétroliers.

pour Donges

Dans le port de Nantes Saint-Nazaire, la raffinerie de Donges participe à hauteur de 13,79 Mt, soit 46 % du trafic total. Une seconde année de diminution pour les entrées d'hydrocarbures dans le port ligérien. En 2008, la baisse de la consommation a déjà pesé sur les trafics de la raffinerie de Donges. En 2009, elle a subi un arrêt technique de deux mois pour entretien technique. Le poids économique de la raffinerie est d'autant plus important que le pétrole brut reçu à l'import, soit quelque 7,6 Mt, est traité pour ensuite être exporté sous forme de produits chimiques. À l'export, Le Grand Port Maritime de Nantes Saint-Nazaire expédie 4,1 Mt, dont 25 % de naphta et 22 % de fioul domestique. En 2009, ces chiffres ont accusé une baisse de 18 % sur l'import du pétrole et une hausse de 0,3 % sur les exportations. Le nombre d'escales de navires par an pour la raffinerie de Donges est de 682, avec une relative stabilité au cours des années. Le site de la raffinerie de Donges a accueilli 682 navires en 2009. La perte de ces escales serait pour le port annonciateur de difficultés tant sur les différentes professions portuaires comme le pilotage, le lamanage mais aussi les agents consignataires de navire. « Un sujet qui n'est pas à l'ordre du jour », explique un responsable de la raffinerie. Sur les trois ou quatre prochaines années, la raffinerie de Donges n'est pas menacée par une fermeture. Sur le long terme la raffinerie ne serait pas menacée, sauf décision différente. « Notre position est différente de celle de Dunkerque, explique un responsable du groupe. Nous sommes la seule raffinerie sur la côte atlantique en France. Dunkerque est encerclé par d'autres raffineries concurrentes. » Une position favorable pour le moment, qui assure au site de Donges des mois d'activité ainsi que pour le port de Nantes Saint-Nazaire.

En Méditerranée, la majorité du pétrole brut passe par le port de Marseille-Fos. Un port qui a bâti son développement notamment sur les hydrocarbures. Au cours des dernières années, le port a néanmoins enregistré des scores peu satisfaisants. Sur les quatre dernières années, de 2006 à 2009, le port a perdu 11,1 % de ce trafic lié aux raffineries. Avec 57,07 Mt, en 2009, il a perdu 10 %. Les entrées de brut et de produits semi-raffinés ont perdu 15 % à 38,3 Mt. Les importations de brut ont perdu, en 2009, 22,7 % à 10,6 Mt sur le port phocéen.

de Marseille-Fos

La sensibilité du pétrole est grande sur les rives de la Méditerranée. Les hydrocarbures représentent 69 % du trafic total. Les chiffres d'affaires du port créé par cette activité entrent pour 43 %. Si le port dispose d'un terminal pétrolier, dont l'avenir dans le cadre de la réforme n'est pas du goût des responsables de l'Ufip (Union française des industries pétrolières), les raffineries alimentées par le port sont situées en dehors de la circonscription portuaire. La mesure de l'effet d'une reconversion d'une partie de ces sites de raffinage serait, pour le port phocéen, une catastrophe économique.

Sur l'axe de la Seine, les raffineries implantées sur le site de Port Jérôme, dans la circonscription rouennaise, entrent sur le marché par le terminal d'Antifer. Ce schéma de coopération interportuaire fonctionne depuis plusieurs années. Le terminal d'Antifer, situé dans la circonscription du port du Havre, accueille chaque année quelques 40 % de l'approvisionnement français en brut. Sur la dernière décennie, le trafic de pétrole brut au Havre varie entre 31 Mt et 37 Mt. Les évolutions dépendent largement de la consommation nationale. Ces produits sont ensuite acheminés vers le centre pétrochimique de la vallée de la Seine, le premier bassin français pour ce secteur d'activité, selon les responsables des ports séquaniens.

Miser sur les biocarburants

À Rouen, le brut est réceptionné dans les deux raffineries de Exxon Mobil à Notre-Dame de Gravenchon et Petroplus à Petit-Couronne. La raffinerie d'Exxon Mobil reçoit généralement 75 % du brut transitant par le pipe line depuis Antifer. Celle de Petroplus réceptionne le solde, soit 25 %. Le trafic du Grand Port Maritime de Rouen est plus tourné vers l'exportation d'essence, notamment pour le marché américain, « avec une perspective de contrats pour les prochaines années », souligne le port. En outre, outre les importations de brut par pipe line, le port rouennais accueille en importation du gazole. Peut-on imaginer de voir ce centre pétrochimique disparaître ? Le schéma a été pris en considération lors de la présentation du plan stratégique Grand Port Maritime du Havre. Même si les responsables portuaires ont poussé le raisonnement à son extrême, ils ne prévoient pas de fermeture du terminal d'Antifer dans les prochaines années. Et pour le Grand port Maritime de Rouen, la situation n'est pas plus catastrophique. D'abord, les deux raffineurs ont investi de lourdes sommes dans leurs outils ces dernières années. Il serait économiquement difficile d'imaginer vouloir mettre un terme à ces usines après les avoir modernisées. Plus qu'une fermeture, sur le domaine rouennais, Exxon-Mobil envisage de se développer avec des projets sur les énergies de substitution. Le groupe devrait présenter dans les prochaines semaines, en Normandie, son programme de recherche et développement pour la production de biocarburant à base d'algues photosynthétiques. Des études sont menées actuellement aux États-Unis pour passer au stade industriel. En outre, le Grand Port Maritime de Rouen a déjà franchi le virage du biocarburant avec les usines de Saipol et de Tereos dont les flux de vracs liquides en sortie, et de vracs secs, permettent de diversifier les trafics. À Rouen, le scénario catastrophe d'une fermeture de raffinerie n'aurait donc pas le même effet qu'à Dunkerque. Une telle décision serait néanmoins catastrophique puisque le port réceptionne chaque année quelque 3 000 navires par an en moyenne. L'arrêt de ces trafics serait, tant pour les recettes financières du port que pour les professions de la communauté portuaire, un désastre économique.

L'analyse port par port des effets d'une réorganisation du raffinage en France montre le poids de ce secteur industriel pour les ports français. La décision du groupe total de fermer la Raffinerie des Flandres est avant tout économique. En retirant de la carte cette raffinerie, le groupe Total pourrait faire chuter tout le château et, par effet de souffle, replacer les ports français dans une situation de crise structurelle grave.

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