Une garde côtière expérimentale en Polynésie

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Beaucoup ne voulaient pas d'une garde côtière. Elle sera expérimentée en Polynésie, pays d'outre-mer au sein de la République, a annoncé le Premier ministre le 2 décembre lors des 5èmes Assises de l'économie maritime.

Après avoir assisté au départ du porte-hélicoptères Jeanne d'Arc qui entame son dernier tour du monde après 45 ans de service, le Premier ministre a présenté les grandes orientations de la future politique maritime du pays. Une politique qui doit être «optimiste et dynamique». Furent donc abordées les possibles solutions aux problèmes de la pêche.

La flotte de commerce a été rapidement traitée : « (...) Nous disposons d'une flotte de commerce d'un peu plus de 400 unités sous pavillon français. Mais on estime à 500 le nombre de navires de la flotte marchande contrôlés par des intérêts français mais qui battent pavillon étranger. Chacun ici connaît bien les causes de cette situation. C'est le fruit d'une longue histoire. Mais cela n'est pas parce que c'est le fruit d'une longue histoire qu'on doit s'en satisfaire. Nous avons pris un certain nombre de mesures fiscales et financières pour renforcer la compétitivité de la flotte française. Un nouveau registre d'immatriculations sous pavillon français a été créé par la loi du 3 mai 2005, à l'instar d'autres pays maritimes européens.

Alors je le sais bien, cette création n'a pas eu tous les effets attendus en raison du classement de ce registre comme « pavillon de complaisance » par

l'ITF. Quand on compare le régime du RIF aux autres registres internationaux européens, franchement, cette inscription est totalement (in)compréhensible.

Je tiens à rappeler que le RIF est étroitement contrôlé par l'État et que les pratiques de nos armateurs sont unanimement considérées comme respectueuses des engagements souscrits, notamment en matière de sécurité et de protection sociale. La persistance de cette inscription constitue un obstacle au développement de la flotte et de l'emploi correspondant. Il faut qu'elle soit levée par une attitude responsable de tous les intéressés.

L'extension de ce registre à la « grande plaisance commerciale » est certainement une voie qui doit être explorée».

la desserte de l'hinterland

Les ports de commerce ont été abordés un peu plus longuement . Ils « n'assurent qu'une part limitée des flux de conteneurs générés par notre économie nationale. C'est la raison pour laquelle nous avons engagé une réforme d'une profondeur considérable. Depuis la loi du 4 juillet 2008, des étapes décisives ont été franchies. Et je veux à cet égard saluer la responsabilité dont ont fait preuve tous les acteurs du secteur, en cherchant les voies et les moyens pour trouver des accords équilibrés. Nous avons recentré les ports sur leur rôle d'aménageurs du domaine public en y mettant en place une nouvelle gouvernance. L'unicité du commandement sur les terminaux portuaires, indispensable à une meilleure efficacité du travail, est en cours de mise en oeuvre. Le transfert des activités d'outillage vers des opérateurs privés devra être achevé au premier semestre 2010. De plus, des plans stratégiques ont été élaborés et adoptés par chaque port pour répondre aux nouveaux besoins d'investissements portuaires qu'ils auront identifiés, l'État va débloquer les crédits supplémentaires nécessaires. Mais l'attractivité d'un port ne se limite pas à ce qui se passe sur ses quais. Nous savons bien qu'elle dépend largement de la qualité des liaisons avec son « hinterland ». Il faut dans ce domaine que nous accélérions le développement des dessertes terrestres massifiées, ferroviaires et fluviales, et donc que nous soyons en mesure d'investir là cela est nécessaire. L'engagement national pour le fret ferroviaire va y contribuer. Le gouvernement y investira 7Md¤ d'ici 2020. Dans cette perspective, j'ai confié à Roland Blum une mission parlementaire chargée d'analyser les besoins des réseaux ferroviaires et fluviaux qui desservent nos ports. Avec cette réforme des ports, nous nous sommes fixés des objectifs ambitieux : tripler les volumes de conteneurs transitant par les ports français d'ici 2015, attirer de nouveaux investissements et créer 30 000 emplois nouveaux, en grande partie dans les activités logistiques ».

Construction navale : vers des droits anti-concurrence ?

La construction navale a fait l'objet de « l'attention toute particulière » du gouvernement en cette période de crise, soulignait Français Fillon, ex-chef adjoint du cabinet de Joël Le Theule, ministre des Transports, de 1978 à 1980, rappelant que « la Commission européenne, consciente de la situation critique des chantiers européens, a prolongé jusqu'à fin décembre 2011 le régime de soutien sectoriel à l'innovation. De son côté, la France fera savoir à la Commission qu'elle souhaite que soit engagée une réflexion sur un instrument européen de défense commerciale.

Au-delà des mesures défensives sur la concurrence, le maintien de la construction navale européenne ne peut être assuré que par la mise au point de navires innovants. C'est un sujet sur lequel nous sommes mobilisés depuis plusieurs mois, il est vrai que la mise en place des nouvelles institutions européennes a pu créer un peu de vide dans le fonctionnement de l'Union. Mais il faut maintenant que l'Union européenne s'attaque aux vrais sujets. Nous avons besoin d'une nouvelle politique de la concurrence qui n'ait pas pour seul objectif d'empêcher les entreprises européennes de grandir. Mais qui ait au contraire pour objectif, d'aider les entreprises européennes à affronter la concurrence des autres continents. Car c'est là qu'est le sujet. La question ce n'est pas de savoir si la concurrence est parfaitement assurée entre la France et l'Allemagne. La question c'est de savoir si l'Europe a les instruments nécessaires pour lutter contre la concurrence extrêmement forte des pays du Sud-Est asiatique, de la Chine, de l'Inde ou du continent américain. Et puis nous avons besoin d'une politique d'investissement d'avenir. Cette politique que nous essayons d'initier en France avec le grand emprunt, c'est en réalité une politique européenne qui doit relayer cette initiative. Et on voit bien que sur cette question de la construction navale, c'est absolument essentiel aujourd'hui ». François Fillon voulut « dire un mot » de la construction nautique (...) « fortement touchée par la crise » et devenue un « pôle d'excellence français ».

Une école sur quatre sites

« En France, la formation aux métiers maritimes est assurée par des filières spécialisées. Je veux d'abord dire que ce choix, il n'est pas question de le remettre en cause, mais je veux aussi souligner que notre enseignement a besoin d'être adapté. C'est la raison pour laquelle le gouvernement a décidé de créer l'École nationale supérieure maritime, dont le principe vient d'être approuvé par le Parlement. Cette école sera implantée sur les sites des quatre écoles de la Marine marchande. Cette école aura le statut de grand établissement. Les écoles des Affaires maritimes qui forment les cadres civils et militaires des affaires maritimes, lui seront également adossées. Cette nouvelle école nous voulons qu'elle vise le plus haut niveau international. Elle formera des officiers de la marine marchande polyvalents, mais aussi des professionnels concernés par l'exploitation des moyens navals et la sécurité de la navigation. Son programme d'enseignement devra lui permettre de délivrer un titre d'ingénieur. Notre système doit aussi pouvoir offrir un enseignement de haut niveau en matière de construction navale. Cette fonction est notamment assumée par l'École Nationale Supérieure des Techniques Avancées. L'évolution

de cette école, dans le cadre renouvelé de l'enseignement supérieur, doit être pour nous l'occasion d'étudier la création d'un master de « Génie maritime » en liaison avec les écoles d'ingénieurs brestoises. Je sais que cela répond à une attente forte de votre part. Les armateurs français ont besoin de recruter rapidement de jeunes navigants, et les industriels ont besoin d'ingénieurs pour développer les navires de demain ». Le Premier ministre consacra un long passage au besoin de renforcer la recherche océanique, notamment via des programmes européens afin de réduire les coûts des navires océanographiques. Par contre, pour la recherche sur les énergies marines renouvelables (éolienne posée ou flottante ; hydrolienne ; etc.) il n'est nullement question de coopération européenne. Tout doit être fait ou refait en France et notamment à Brest où sera installée d'ici à la fin de l'année une « grande plate-forme technologique sur les énergies marines » ; plates-formes qui existent déjà en Allemagne et au Royaume-Uni. L'objectif de la France est d'installer en mer 6 000 MW d'ici à 2020, rappela François Fillon ; à comparer aux 20 000 à 25 000 MW prévus en Allemagne vers 2030.

Une garde-côtes expérimentale pour plus de visibilité

Après avoir rappelé la tenue d'un Cimer le 8 décembre, le Premier ministre a souligné « qu'il n'est pas question de remettre en cause » l'action civile de l'État en mer . « Conservons ce qui fonctionne bien ! Mais ça ne veut pas dire pour autant, qu'on ne puisse pas faire mieux. Je pense qu'on peut optimiser l'utilisation des moyens des différentes administrations. Et pour cela il est nécessaire de passer d'une logique administrative à une logique de mission. J'ai demandé dans cet esprit, que l'on réfléchisse à la création d'une fonction « garde-côtes ». Il ne s'agit pas de créer un nouveau service de l'État. Il s'agit d'abord de mettre en place un comité directeur de la fonction garde-côtes qui rassemblera les responsables de toutes les administrations agissant en mer, sous l'autorité du Secrétaire général de la mer. Nous allons créer un centre opérationnel de la garde-côtes, qui rassemblera les données de situation maritime provenant de toutes les administrations. Et nous allons expérimenter dans un premier temps, un centre unique d'action de l'État en mer, d'abord en Polynésie, là ou notre zone économique est la plus étendue. Et nous nous servirons de cette expérimentation pour poursuivre l'expérience. Je pense que la fonction de garde-côtes donnera plus de visibilité à l'action de l'État en mer, et permettra de mieux dialoguer avec nos partenaires européens ».

Pour finir, le Premier ministre voulait étendre les compétences du Conseil national du littoral « à la mer ». Vaste programme.

La force du tropisme maritime

Plus de 1 300 inscrits, trois membres du gouvernement dont le Premier ministre et la présidente du Medef s'étaient déplacés à Brest, pour assister aux 5èmesAssises de l'économie maritime et du littoral. C'est dire l'attraction que la mer exerce sur les Français. En effet, les seuls contenus, au moins ceux consacrés au transport maritime de marchandises et aux ports de commerce, n'auraient sans doute pas généré un tel enthousiasme.

Quelques « petites phrases » peuvent cependant retenir l'attention. Ainsi le président d'Armateurs de France, Christian Garin, estimait que le classement du RIF comme registre de complaisance était une « mascarade ». Il demandait un « arbitrage politique » car il « ne voyait pas trop bien ce que les armateurs ont encore à négocier » avec les syndicats. Si cette situation devait perdurer, elle conduirait à une « fuite des navires » du registre. De là à imaginer un réexamen de l'action militaire de l'État dans le golfe d'Aden, il n'y a qu'un bras de mer.

Dans le vrac sec, Philippe Louis-Dreyfus, p.-d.g. de l'armement éponyme craint que 2010 et 2011 soient pires que 2009 du fait du grand nombre de navires qui doivent entrer en flotte. Après avoir noté qu'en période de forte chute des taux de fret, les banquiers disparaissaient des colloques, Philippe Louis-Dreyfus, lui-même banquier durant 20 ans, soulignait les rares aspects positifs d'une crise : elle favorise le retour au bon sens chez les armateurs et les banquiers ; et elle aide à se débarrasser des vieilles coques ; ce qui rend service à tout le monde. Par contre, celle-ci a marqué la disparition du respect de ses engagements contractuels et, en quelque sorte, de la confiance entre fournisseurs et clients. « Les ports sont à la hauteur de notre économie » rappelait Paul Tourret, directeur de l'Isemar. Représentant le Gican, Bernard Planchais, dg délégué de DCNS demandait la mise en place de droits anti-dumping contre les navires subventionnés par des aides d'État.

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