D u 14 au 17 juillet, s'est tenue à Libreville, la 7e assemblée générale ordinaire de l'Union des conseils des chargeurs africains (UCCA). Outre les problèmes prégnants d'arriérés de cotisations et autres aspects administratifs de toute AG, les 16 Conseils des chargeurs africains (cca) présents membres de l'UCCA et les trois susceptibles de le devenir ont également activement participé à la table ronde dont le thème central était : les cca face aux conséquences de la crise économique sur la chaîne de transport.
À en juger par l'adoption de la 11e résolution de l'AG, l'esprit de la fin des années soixante - début des années soixante-dix qui virent la création des conseils des chargeurs des États nouvellement indépendants et l'adoption du code de conduite des conférences, est toujours vivant : « (...) constatant l'augmentation unilatérale et abusive des taux de fret pratiqués par les armateurs ; et saluant la disparition de l'EWATA(1) » les membres de l'UCCA ont décidé « la mise en place d'un comité restreint chargé de définir un nouveau type de partenariat entre les pays africains et les armateurs ». Déjà lors des 4e journées du chargeur africain tenues à Kinshasa en décembre 2008, il avait été question de « recréer la mystique des années 75 et de promouvoir la refondation des conseils de chargeurs africains et du comité régional de négociation de taux de fret maritime ». Les conférences maritimes afro-européennes ont disparu depuis octobre.
À plusieurs reprises lors de la table ronde, il a été question de la lutte contre la vie chère en Afrique mais le coût du passage portuaire et celui des pré- ou post-acheminents furent peu évoqués. L'opposition aux transporteurs maritimes semble constituer une sorte de ciment unissant les cca qui sont pratiquement tous des structures publiques ou parapubliques, générant leurs propres ressources. La marchandise et les transporteurs maritimes participent donc directement au financement des cca. Les transporteurs les financent à double titre. D'une part, pour avoir le « droit » de desservir le pays, et d'autre part, par les amendes qu'ils doivent payer pour non-respect d'une réglementation abondante. Ainsi, le représentant de Delmas présenta à l'auditoire un document de 27 pages résumant à l'attention des agents de la compagnie, les multiples exigences des États de l'Afrique du l'Ouest et du Centre en matière de documentation. Vu d'Asie, cela semble bien complexe et susceptible de générer de nombreuses erreurs passibles d'amendes. Lors des journées de Kinshasa, l'harmonisation des procédures avait été abordée.
Selon une représentante d'un cca, chaque État africain ou presque dispose d'une loi exigeant que les taux de fret soient déposés auprès de son administration. Bien que toujours en vigueur, cette loi serait rarement appliquée. À qui la faute ? D'autant d'une pareille loi existe aux États-Unis et y est fermement appliquée.
Être présent à Rotterdam
Etre présent à Rotterdam en septembre
Plusieurs fois, fut souligné sans autre détail, l'intérêt pour les États africains d'être présents lors de la cérémonie de signature de la convention internationale sur les règles de Rotterdam en septembre prochain. D'ailleurs, cela a fait l'objet d'une recommandation officielle de l'UCCA. Celle-ci recommande « l'élaboration d'un document à présenter » lors de cette cérémonie et invite les cca à y participer massivement. En tant qu'organismes parapublics, les cca devraient pouvoir obtenir assez facilement un mandat de représentation de la part de leur État respectif, a-t-on expliqué en coulisse. Cette recommandation ne devrait pas favoriser le rapprochement souhaité avec les chargeurs européens, officiellement opposés à cette convention jugée trop favorable aux armateurs (JMM du 10/7 ; p. 4). Comme quoi, le chargeur est un être pluriel.
(1) Europe West Africa Trade Agreement. Cette conférence fut créée en janvier 2000 par Maersk-Sealand, P & O Nedlloyd, Nile Dutch Africa et West Afrika Dienste. Elle remplaçait l'EWAC. NDLR.
Source : Delmas
Pas de crise majeure dans les importations conteneurisées venant d'Europe
Si le thème de la table ronde de l'AG de l'UCCA était bien « l'impact de la crise économique sur la chaîne de transport : quelle stratégie pour les conseils des chargeurs », la réalité observée jusqu'à la fin mai amène à nuancer l'importance de la crise. D'une part, la 8e édition des Perspectives économiques en Afrique parue ce printemps note que si le taux de croissance de l'Afrique doit se réduire de moitié, il devrait rester de l'ordre de 2,8 %. Il serait donc bien supérieur au - 4,3 % attendues cette année pour le PIB des pays membres de l'OCDE.
D'autre part, Didier Raux, représentant la direction des lignes Delmas reliant l'Afrique au reste du monde, a présenté aux conseils des chargeurs africains (qui ne pouvaient pas l'ignorer puisque la plupart émettent des bordereaux de suivi de fret avant même l'embarquement) que tout n'était pas négatif. Ainsi, les importations conteneurisées africaines restent stable à +2 % à la fin mai 2009 ; certes après une croissance annuelle de 23 % à la fin 2008. Mais il existe des différences selon les zones d'origine et de destination finale (voir tableau). Par contre, les exportations africaines ont globalement chuté de 19 % à la fin mai 2009. Si Delmas ne précise par les valeurs absolues, une source maritime indique que dans le sens Europe/COA, le marché était estimé en 2008, à 639 000 EVP. À la fin mai, il enregistrait une croissance de 6 %. Par contre, en sortie d'Asie, du sous-continent indien et du Moyen-Orient, le volume 2008 était de 996 000 EVP. À la fin mai, il était en baisse de 2 %. Commentaire « anonyme » : « le marché historique Europe/COA qui a été dépassé depuis trois ans par le concurrent d'Asie, est resté en croissance stable depuis les dernières années. Alors que durant la même période, l'Asie/COA explosait entre +20 % et 30 % ». « L'intensification des échanges avec les puissances émergentes que sont le Brésil, l a Chine et l'Inde réduit par ailleurs la dépendance de l'Afrique vis-à-vis des marchés de l'OCDE », soulignent les 8 é Perspectives économiques pour l'Afrique ajoutant « que le rapprochement économique entre l'Afrique et la Chine a replacé le continent sur la scène du commerce mondial ». Attendons donc la fin de l'année pour avoir une idée plus précise des réalités des échanges maritimes africains. À en croire l'interview de Rodolphe Saadé, d.g. de CMA CGM et président de Delmas parue dans le n° 2530 de Jeune Afrique (5-11 juillet 2009), CMA CGM fonde de grands espoirs sur l'Afrique qui devrait générer 25 % à 30 % du chiffre d'affaires du groupe d'ici à cinq ans. « Certes Mærsk est le premier transporteur maritime en Afrique mais nous ne sommes plus très loin derrière eux ».