JMM : Pourquoi les agents des terminaux de marchandises de Fos ont créé leur syndicat ?
Robert Cret : Nous avons voulu anticiper et prendre notre destin en main sans attendre le basculement des agents vers les entreprises de manutention. La loi va nous contraindre à composer avec des structures syndicales différentes à compter du 1er janvier 2010. Lorsque les agents du port seront détachés, le syndicat général n'existera plus. Demain, des agents rejoindront Eurofos, Carfos et d'autres Intramar à l'Est. Le 23 mars s'est tenue l'assemblée générale constitutive. Nous avons voté les statuts, présenté nos orientations politiques et engagé les démarches administratives. Lors du congrès des 16 et 17 juin, la Fédération Nationale CGT des Ports et Docks a officiellement pris acte de la création du syndicat. À présent, nous allons expliquer notre démarche, rassurer et mettre en place un calendrier.
JMM : Quel est votre positionnement par rapport aux Bassins Est ? Le leader CGT des bassins Est, Pascal Galeote, n'a plus votre soutien dans son combat contre le détachement des agents vers les sociétés de manutention ?
R. C. : Historiquement, tout a été construit à Marseille. Fos a pris de l'ampleur par la suite jusqu'à ce que les choses s'inversent. Nous avons des intérêts divergents avec les bassins Est et nous risquons d'avoir des positions difficilement conciliables. 80 km séparent les deux bassins et nous avons toujours souffert de cet éloignement. À Marseille, le périmètre du port n'évoluera plus alors que Fos s'agrandit avec Fos 2 XL. Nous pouvons nous rassembler sur des sujets communs avec la CGT des bassins Est comme les dockers l'ont toujours fait pour défendre des causes communes.
À Marseille, le conflit est délibérément réduit au levage et si Pascal Galeote avait besoin d'appuis, il serait en mesure de mobiliser les agents du pétrole. Sa stratégie consiste à circonscrire le conflit au levage. C'est difficile pour lui comme ça l'a été pour son prédécesseur Raymond Maldacena.
JMM : Comment se fait-il que vous entreteniez des relations étroites avec les dockers des bassins Ouest alors qu'à Marseille les relations sont plutôt tendues entre dockers et agents ?
R. C. : Nous sommes proches des dockers de Fos car on se connaît tous en dehors du port depuis des décennies. Nous avons été à l'école ensemble. Fos, Port-Saint-Louis du Rhône sont des villages. À Fos, l'intérêt général a toujours primé, malgré les tensions et parfois les intérêts divergents. Lors de la réforme de 1992 des dockers, nous sommes restés unis au sein du syndicat CGT. Notre intérêt n'est pas d'être divisé. Nos adversaires ce sont les patrons, la direction du port et le gouvernement. Nous allons travailler avec les dockers afin de voir comment nous allons nous départager le travail et travailler en harmonie afin de mettre en place le commandement unique.
JMM : Où en êtes-vous des négociations à proprement parler avec les sociétés de manutention dans le cadre de la loi sur la réforme des ports ?
R. C. : Nous avons commencé à nous rencontrer et à discuter des grands principes. Il n'y a pas d'opposition de fond mais nous ne sommes pas encore entrés dans le vif du sujet. Les manutentionnaires et le port ont jusqu'au 3 juillet pour discuter du nombre de portiques publics qui seront transférés et de la fixation des prix. Une fois qu'ils tomberont d'accord sur les outillages, s'ouvriront des discussions sur les modalités de travail jusqu'à mi 2010 pour une application effective en 2011. À Marseille, les discussions portent seulement sur le transfert des matériels publics alors qu'à Fos, le GPMM a signé des conventions d'exploitation avec CMA CGM et MSC. Nous nous inscrivons pleinement dans le projet stratégique et sommes ouverts à des solutions pragmatiques et techniques. On peut trouver une solution à Fos qui soit différente de celle de Marseille.