Depuis le début de l'année, les mauvaises nouvelles s'accumulent pour les bassins Est. Le départ de l'exportateur Agrexco et de 200 000 t de fruits et primeurs israéliens vers l'Italie avant de rebondir à Sète plombe une plate-forme qui, il y a 15 ans encore, était un des plus importantes d'Europe. Les grèves à répétition des grutiers des bassins de Marseille qui se refusent à être, dans l'immédiat, transférés dans le privé, sont en train de couler la branche des conteneurs. La liquidation de l'Union Naval de Marseille que le groupe espagnol Boluda avait installée dans les formes marseillaises deux ans auparavant, enfonce la filière de la réparation navale lourde. Dernière information, après avoir été à deux doigts de lancer une autoroute de la mer à Marseille, Grandi Navi Veloci (GNV) vient de s'amarrer sur le port de Sète pour ouvrir un service Ropax sur Tanger et Alger à l'automne.
Les bassins Est se vident de leur substance et sont directement menacés par les ports secondaires voisins. Marseille n'est même plus le premier port de la desserte pour les passagers en partance pour la Corse, Toulon et Nice ont fait mieux en 2008. Comment s'étonner après cela que l'on persiste à croire que la croisière s'amusera encore longtemps malgré la crise.
Des comportements kamikazes
Sur les symptômes, tout le monde est d'accord. L'UPE 13 « dénonce le démantèlement progressif des activités portuaires », le « gâchis » ou le « massacre » portuaire. Des termes que pourraient reprendre mot pour mot la CGT. Dans le diagnostic, les deux parties s'affrontent. L'Union patronale accuse « les comportements de kamikazes » des personnels CGT du port. Le syndicat majoritaire évoque, lui, la dérive de longue date des bassins Est laissés à l'appétit à court terme des intérêts privés. Du grand classique sur le théâtre social.
Toutefois la thérapie pour remédier à la situation semble rapprocher les antagonismes : le développement des trafics du bassin Est. Une fausse perspective ? On remarquera que cette volonté est régulièrement affichée depuis 20 ans par les dirigeants portuaires. Les plans de redynamisation se sont succédé. Sans effet. La disparition de milliers d'emplois a accompagné l'hémorragie continue des trafics et des parts de marché. Au point que Marseille ne menace pas de devenir un port secondaire comme le craint l'UPE 13, mais l'est, d'ores et déjà.
La réforme portuaire va-t-elle apporter la transfusion indispensable ? Les entrepreneurs et la direction du GPMM l'affirment. À condition de dépasser les antagonismes, ajoutent-ils. Là, se situe le point d'achoppement. Y aura-t-il un jour du nouveau à l'Est ?
Robert Villena