Journal de la Marine Marchande : Dans la période actuelle de crise, les trafics des ports français accusent un repli général. Le Grand port maritime de Marseille suit-il cette tendance ?
Jean-Claude Terrier : Globalement, le trafic cumulé des cinq premiers mois affiche une baisse de 14 % à 34,57 Mt. Pour le seul mois de mai, Marseille a subi un repli de 22 %, soit une diminution bien plus importante que les mois précédents. En effet, en mai 2008, le trafic avait connu un rebond lié à des reports d'escale.
L'analyse par courants montre des sorts différents. Dans les marchandises diverses, le trafic cumulé des cinq premiers affiche une perte de 13 %. En mai, les diverses ont malgré tout augmenté de 15%. En mai 2008, les diverses avaient accusé un repli important en raison de mouvements sociaux sur les terminaux.
Sur les vracs liquides, nous affichions une hausse de 1 % à fin avril mais en mai, il nous a manqué plus d'un million de tonnes sur le brut et nous sommes revenus en négatif à -4 % sur les hydrocarbures et -23 % sur les autres vracs liquides. Ces baisses ne signifient pas une perte de parts de marché mais une baisse conjoncturelle globale des ports méditerranéens.
Enfin, les vracs solides sont en chute. Une tendance qui s'explique par la réduction d'activité chez Arcelor. La campagne céréalière a été plutôt bonne.
JMM : Le projet stratégique a été adopté le 3 avril par le conseil de surveillance. Après ce vote, le temps de la négociation avec les partenaires sociaux et les opérateurs s'est ouvert. Comment se déroulent ces entretiens ?
J-C. T : Le conseil de surveillance a en effet adopté le projet stratégique le 3 avril. Nous sommes dans la phase de négociation de gré à gré avec les manutentionnaires. Nous avons recueilli des marques d'intérêt des manutentionnaires. Nous discutons sur le nombre d'outils à céder, leur valorisation. Sur ce point, nous avons nos expertises, les manutentionnaires disposent de leur propre évaluation. À l'issue, la commission nationale d'évaluation sera saisie, conformément à la loi, et disposera d'un délai d'un mois, renouvelable une fois de plus d'un mois si le port l'accepte, pour donner son avis.Nous disposons d'un délai de trois mois après l'adoption du projet stratégique pour soumettre nos propositions à la commission nationale d'évaluation, soit jusqu'au 3 juillet. Il nous semble que nous présenterons notre projet quelques jours plus tôt. L'avis de cette commission est important vis-à-vis de Bruxelles.
La valorisation de ces outils est un point essentiel de la négociation. De plus, dans la valeur de l'outil entre aussi les opérations de maintenance.
Si nous ne sommes pas d'accord dans la phase de gré à gré, alors nous passerons dans la phase d'appels à projets.
JMM : Outre le transfert de l'outillage, vous avez, avec Fos 3XL et Fos 4XL, des projets d'agrandissement de vos terminaux à conteneurs. Quel est le calendrier pour ces projets ?
J-C.T : Fos 2XL suit son calendrier. Nous livrerons les terrains et les quais en décembre. Les investisseurs n'ont émis aucun signe évident de ne pas faire. Maintenant, nous ne sommes pas opposés à revoir les conditions de la montée en puissance de ce terminal. Le démarrage est toujours prévu en 2010. Le port n'a pas à gagner sa vie sur des pénalités. Nous avons des réalités économiques à prendre en compte.
Quant aux projets de Fos 3XL et Fos 4XL, le calendrier nous reporte à plus long terme. Nous aurons déjà des potentialités importantes avec Fos 2XL avant de le saturer, ce qui nous laisse le temps d'anticiper sur les deux autres projets. Quant à l'appel d'offres, il a fait l'objet de nombreuses marques d'intérêt qui ont, bien entendu, attiré l'attention des grands groupes de manutention.
JMM : Socialement, la situation marseillaise a surtout été marquée par des divergences de vues entre les différentes composantes de la place portuaire. Qu'en est-il aujourd'hui ?
J-C.T : Nos relations avec les partenaires sociaux continuent. Nous les informons et nous continuons de proposer des solutions pour appliquer localement l'accord-cadre national. Nous avons des points de divergence avec l'organisation syndicale majoritaire, notamment sur les bassins est. Le sujet est difficile. Globalement, cette réforme signifie que nous conserverons, au sein du GPMM, quelque 1 000 à 1 500 personnes. Quant à la maintenance, nous n'avons pas vocation à entretenir des engins qui ne nous appartiendrons plus. Nous ne sommes pas, dans le cadre du plan stratégique, dans une optique de création d'une filiale pour cette activité de maintenance. Nous réfléchissons avec les partenaires à des solutions qui pourraient être différentes selon les sites.
JMM : La place portuaire a parfois des divergences de vue avec l'établissement portuaire. Elle demande à réduire les effectifs. Comment abordez-vous ce sujet ?
J-C.T : Nous vivons avec la place portuaire dans des relations de confiance que nous voulons installer dans la durée. Maintenant, il est vrai que nous avons parfois des divergences de vue mais j'encourage chacun à balayer devant sa maison. Nous devons aborder un point d'ordre collectif : le coût du passage portuaire. Quels sont les postes les plus onéreux. Nous pensons lancer, prochainement, une étude sur ce sujet pour aboutir, sereinement, à des solutions et retrouver notre compétitivité.
JMM : La réparation navale occupe une large place dans le port. La forme 10 est actuellement sous le coup d'une procédure judiciaire. Les formes 8 et 9 doivent faire l'objet d'une concession. Quel est l'état d'avancement de ces dossiers ?
J-C.T : En premier lieu sur la forme 10, le Conseil d'État a rendu, le 11 juin, une décision sur la validité de la procédure d'appel à projets lancée par le port. Nous nous en réjouissons. Nous allons donc pouvoir reprendre les négociations avec le lauréat. Sur les deux autres formes, les 8 et 9, nous lançons, cette fin de mois, un appel à projets. Nous avons, avant même cet appel à projets, des marques d'intérêt que nous qualifierons de professionnelle sur ce dossier.
JMM : Le port demeure parmi les seuls ports mondiaux à pouvoir se prévaloir de la quadrimodalité, mer, fer, fleuve et pipe-line. Quels sont les grandes lignes, dans le cadre du projet stratégique, des projets pour le développement des transports massifiés ?
J-C.T : Nous avons déjà plusieurs projets. Nous prévoyons, dans le cadre de Fos 2XL, le percement du canal pour relier les quais au canal. Nous envisageons aussi de réaliser des postes d'attenante pour les barges. Sur le ferroviaire, nous manquons plus de marchandises et d'opérateurs que d'infrastructures.