Le 1er rendez-vous de l'assurance transports : une « gigantesque » réussite

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Représentants d'assureurs coque, machine et/ou facultés, de courtiers d'assurance, de commissaires d'avaries accompagnés d'avocats spécialisés et autres parties concernées ont répondu présents à l'invitation de la Fédération française des sociétés d'assurances et du Comité d'Études et de Services des Assureurs Maritimes et Transports, CESAM. Invités, les P & I Clubs, mutuelles constituées par les armateurs pour couvrir leurs responsabilités, manquaient à l'appel.

« Il n'y a pas de réelle limite technique à la taille des navires », affirmait Jean-François Segrétain, responsable BV pour l'Europe du Sud et l'Amérique du Nord. Il peut y avoir des limites liées au tirant d'eau. Ainsi le détroit de Malacca ne permet-il pas de dépasser les 21 m, soit environ 18 000 EVP pour une coque de 400 m de long pour 60 de large. Il peut avoir des limitations géométriques dans les ports, voire des difficultés d'évacuation des conteneurs vers l'hinterland, mais techniquement, on sait faire de très gros navires de charge même si ces derniers doivent résoudre certaines difficultés comme une certaine « souplesse » de la coque ; difficultés sur lesquelles la communication est rare. Pour les très gros paquebots (8 000 passagers et membres d'équipage), l'idée irréaliste de pouvoir procéder à leur évacuation (en moins de 30 minutes comme pour les ferries) a été abandonnée . Ils doivent résister à l'avarie majeure (au moins à certaines d'elles-mêmes) et être capables de revenir par leurs propres moyens à quai.

La taille n'est pas un facteur discriminant en droit maritime, notait Me Scapel mais elle agit comme une sorte de « révélateur » des risques de plus en plus coûteux auxquels doivent faire face le transporteur et ses préposés, l'assureur corps et facultés, les sauveteurs, l'Etat côtier, etc., sans oublier le chargeur qui, volontairement ou non, aurait fait une fausse déclaration relative au poids ou à la vraie nature dangereuse de sa marchandise.

Il existe un consensus pour estimer qu'un porte-conteneurs géant chargé représente une valeur comprise entre un et 1,5 Md$. Or en France, au moins, la loi de 18 juin 1966 précise qu'un chargeur dont la marchandise a été endommagée au cours du transport maritime par la faute d'un autre chargeur ou le vice propre de la marchandise de celui-ci, peut agir en responsabilité contre ce dernier. Un arrêt du 16 janvier 2007 confirme ce point. Dès lors, le chargeur d'un conteneur qui déclenche un incendie détruisant toute la cargaison d'un porte-conteneurs (Hyundai-Fortune par exemple), peut se retrouver dans une situation délicate, d'autant que l'assurance faculté exclut les dommages aux tiers, rappelait Me Scapel.

des assureurs

Entre 1 et 1,5 Md$ pour un 13 000 EVP ; combien pour un grand terminal à conteneurs à Rotterdam ou Hambourg ? Et pour un paquebot avec 5 000 passagers américains et 3 000 membres d'équipage ? Probablement le même ordre de grandeur. Cela commence à inquiéter les assureurs corps. D'autant que deux représentantes de la réassurance, Swiss RE et Munich RE, leur ont rappelé que le probablement durcissement des règles de prudence dans l'assurance et la réassurance (projet de directive Solvabilité II) allait amener en toute logique de nouveaux arbitrages. L'idée de base est de lier, en 2012, le niveau minimal des fonds propres des assureurs aux risques auxquels ils sont exposés. Ils devront donc les mesurer le plus exactement possible afin d'éviter une surcouverture ; premier problème. Deuxième difficulté, la réassurance qui sera soumise à la même directive : examiné sur plusieurs années, le secteur maritime a une faible rentabilité. Il pourrait donc être tentant d'allouer les ressources de la réassurance à d'autres secteurs plus rentables. Et sans réassurance, pas d'assurance (et fin probable du rendez-vous de Cannes).

Pour résoudre une partie du premier problème, Patrice Gilbert, directeur général du CESAM, a de nouveau présenté son projet de banque mondiale de données permettant de savoir à tout instant où se trouve chaque conteneur dans le monde (JMM du 20/3/2009 ; p. 12). Les 380 représentants ont su cacher leur enthousiasme. En coulisse, le décryptage serait le suivant : les assureurs français sont convaincus de la pertinence de ce projet mais ils ne veulent trop le faire savoir de crainte d'avoir à le financer en grande partie. Un jeu subtil serait en train de se jouer pour partager au moins les coûts d'un premier groupe de travail chargé de réfléchir à la faisabilité du projet. D'ici à 2012, il n'y a pas trop de temps. Un sujet qui pourrait être abordé de nouveau les 4 et 5 mai 2010, toujours à Cannes, lors du 2e rendez-vous de l'assurance transports.

Toujours pas de système d'urgence de remorque

Commandant l'Abeille-Bourbon, Charles Claden a évoqué, à Cannes, les nombreuses difficultés des sauveteurs lorsqu'ils interviennent sur un navire en graves difficultés : les premières informations disponibles sont parcellaires et plus ou moins justes ; les interférences des diverses parties concernées sont de plus en plus nombreuses, notamment de la part des assureurs coque dont les intérêts ne convergent pas nécessairement avec ceux des assureurs facultés ; etc. En outre, le temps joue contre le navire en difficulté. Pour rendre les choses encore un peu plus compliquées, peu de navires et encore moins les très gros navires sont équipés de système de prise de remorque d'urgence, a rappelé Charles Claden. Depuis l'échouement du Braer sur l'une des îles des Shetland en janvier 1993, certaines catégories de pétroliers ont l'obligation d'être équipés de ce type de système mais aucun porte-conteneurs, quelle que soit sa taille. Et pourtant, non négocié, un tel dispositif coûte environ 36 000 $ par navire, a précisé Charles Claden. Sur une base volontaire, CMA CGM a décidé d'équiper ses 8 500 EVP et plus, de ce dispositif.

En cas d'accident majeur, un juge français pourrait fort bien considérer qu'un armateur a fait preuve d'une certaine négligence en n'équipant pas son navire de ce dispositif et a, en cela, contribué à l'aggravation des dommages, estime un juriste spécialisé. Nous reviendrons sur ce point car peut-être entrons-nous dans une nouvelle ère : celle où le simple respect des normes, minimales, de l'OMI ne suffit plus.

Certains navires à passagers dont la coque est en alliage d'aluminium, laissent perplexe les sauveteurs tant qu'à leur capacité de résistance au remorquage par mer formée. Un point de vue partagé par le président des pilotes français.

Prêchant pour sa paroisse, Charles Claden demande, que les navires soient conçus dès le début pour être remorqués ; que des grues de grande portée soient, comme les remorqueurs de haute mer,mises à disposition sur le littoral afin de pouvoir agir le plus rapidement possible. Enfin, une meilleure rémunération et une immunité juridique seraient les bienvenues.

«Help us to help you», concluait-il.

Ils étaient là

Venus d'Afrique, d'Europe, du Moyen-Orient, de Singapour mais principalement de France, les 380 participants ont permis à la Fédération française des sociétés d'assurance et au CESAM de réussir brillament leur premier rendez-vous de l'assurance transports.

S'il était curieux d'entendre des intervenants francophones s'exprimer en anglais face à un auditoire largement francophone, cela s'explique par la volonté des organisateurs d'ouvrir leur rendez-vous au «grand international» explique Alain-Michel de La Buharaye, responsable des relations extérieures du CESAM. Il fallait donc dès le début envoyer un message clair au monde anglosaxon.

Selon CMA CGM, sur le marché Extrême-Orient-Europe, le coût par slot d'un 8 500 EVP est fixé à un indice 100. Il passe à 92 pour un 11 000 EVP et à 85 pour un 13 000 EVP.

Qui peut résister à cela, mis à part Evergreen ?

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