par Étienne Bernet
Les éditions Babouji MDV Maîtres du Vent ont publié un ouvrage intitulé Les Cap-Hornières, sur les femmes de capitaines à bord de voiliers long-courriers.
Pendant longtemps, une femme sur un navire était considérée comme portant malheur, au risque de susciter rivalités et jalousies parmi l'équipage, sans compter le langage qu'il aurait fallu châtier en sa présence. Pourtant au XVIIe siècle en France, les officiers de la Marine royale sont autorisés à emmener leurs épouses en campagne. Par contre, il n'en est pas question pour les longs voyages d'exploration aux siècles suivants. Mais deux passagères clandestines font le tour du monde et entrent dans l'Histoire : Jeanne Barret, compagne du naturaliste Philibert Commerson membre de l'expédition Bougainville (1766 -1773), et Rose-Marie Pinon de Freycinet, épouse du capitaine de frégate Claude de Freycinet chargé de mener une expédition scientifique (1817-1820). Bien entendu, il y en a eu d'autres. Par la suite, la promiscuité et le comportement des femmes sur des bâtiments aux équipages nombreux incitent le ministère de la Marine à interdire leur présence à bord (1848).
Quant aux navires de commerce au long cours, il n'est pas rare que le capitaine, souvent co-armateur, embarque son épouse. Au XIXe siècle après les guerres napoléoniennes, le commerce maritime reprend et l'embarquement des femmes va de soi. Ces « cap-hornières », uniques femmes à bord pendant des voyages de plusieurs mois, n'ont d'autre fonction que celle d'épouse du capitaine et mère de ses enfants. Certaines accouchent en effet à bord. Tolérées comme passagères, elles adoucissent l'épreuve du voyage par leur présence - car la vie de l'équipage est dure - et calment l'angoisse et même la panique dans les moments de grandes difficultés.
C'est à ces jeunes épouses, souvent en voyage de noces, que s'intéresse Étienne Bernet, spécialiste de la grande pêche au temps de la marine à voile. Il dresse le portrait de quarante-cinq d'entre elles qui totalisent quatre-vingts embarquements entre 1897 et 1921, à partir de témoignages, de récits de voyages et de documents photographiques. L'une d'elles, qui est allée jusqu'en Australie en 1909, résume ainsi la situation : « Toujours correcte et discrète dans sa tenue, polie et aimable avec tous, la femme du capitaine ne peut se laisser aller à aucune familiarité ; de son tact dépend parfois l'ordre et la bonne entente de tous».
par Étienne Bernet
Editions Babouji MDV Maîtres du Vent
128 pages/21 ¤¤
ISBN : 978-2-35261-063-2
Les Cap-Hornières