Tout est changement, événements fortuits et exception dans cette année transmanche. 2008 a été la première année du fonctionnement d’Eurostar à grande vitesse jusqu’à Londres. Mais aussi celle d’un nouvel incendie, survenu le 11 septembre dans le tunnel. P&O Ferries n’a pas pu profiter de la saison touristique en raison de l’accident du Pride-of-Canterbury. Un sinistre qui a sérieusement amputé ses capacités en fret. Frappé par la hausse vertigineuse des soutes en milieu d’année, SpeedFerries et son modèle fragile n’a pas survécu et a jeté l’éponge début novembre. Enfin, SeaFrance a souffert d’une grève des officiers meurtrière en début d’année, et d’une mise en service très tardive du SeaFrance-Molière, son troisième navire moderne. Enfin, la récession s’est déclarée en Grande-Bretagne vers la fin du mois de juin, et a touché tous les acteurs au dernier trimestre, marqué par l’effondrement de la Livre face à l’Euro.
Eurostar a transporté 9,11 millions de passagers en 2008, ce qui en fait le « marketmaker », le patron des volumes et des prix sur la route courte des passagers. Les navettes, à raison de 2,3 passagers par voiture et 50 par autocars, ont vraisemblablement transbordé de 7 à 7,5 millions de passagers. Le tunnel détient donc de l’ordre de 55 % du marché des passagers, mode aérien non compris. Ce n’est pas le cas du transbordement de camions et remorques de fret, dominé à 65 % par la mer. Eurotunnel réserve ses navettes à une clientèle en mesure de payer davantage pour un gain de temps certain, lorsque l’ouvrage est pleinement opérationnel. Les ferries restent un moyen de transbordement de fret massif.
En mer, l’année a néanmoins été grise. Seule Norfolkline gagne du terrain sur ses concurrents. P&O Ferries, malgré une flotte vieillissante, reste maîtresse de la route maritime avec six navires de 85 à 120 unités de capacité en fret, et cinq unités rarement saturées de passagers.
L’année 2009 débute tout autrement, avec une donne concurrentielle renouvelée dans un bas de cycle conjoncturel très brutal. La flotte P&O Ferries est au complet, mais ancienne. SeaFrance fonctionnera vraisemblablement à trois navires récents et une unité de réserve. Norfolkline pourrait pour la première fois connaître un recul, sinon une stagnation. Et LD Lines vient défendre les couleurs boulonnaise avec d’abord deux départs/jour dès à présent, puis quatre départs supplémentaires au 1er juillet. Il est probable que malgré des pertes inévitables, aucun concurrent ne lâchera prise.