« En tant que professionnels, nous avons laissé se développer une situation qui fait que les compagnies maritimes ne sont médiatisées que lorsque se produit une catastrophe. Dans ces conditions, on ne peut reprocher à l’opinion publique la perception négative qu’elle a du maritime. Mais cette perception est à l’origine de nombreux de nos problèmes », estime Mike Salthouse, un directeur du Club. Ce dernier souligne que l’opinion publique pousse souvent sa classe politique à pénaliser les armateurs et leurs équipages dès qu’il se passe quelque chose de négatif alors que chaque individu dépend de plus en plus du transport maritime dans sa vie quotidienne. Cela est dû à l’opacité et à l’autosatisfaction (complacency) qui est la règle dans la profession, estime Mike Salthouse.
« L’incapacité des transporteurs maritimes à communiquer la valeur qu’ils apportent vient de leur perception dépassée et malencontreuse (misguided) de qui sont leurs véritables clients. Ces derniers ne sont pas uniquement l’une des parties au contrat de transport. Au bout de la chaîne, le coût de transport est payé par le consommateur du produit transporté. Il doit donc être également considéré comme un client car c’est lui qui paie », explique, sans langue de bois, le représentant du P & I Club.
« Armateurs, affréteurs, P & I, sociétés de classification, chantiers navals, et tous les autres agents économiques du secteur, nous devons tous faire notre autopromotion en expliquant à chacun ce que nous faisons pour tous », poursuit Mike Salthouse. Il appelle l’industrie maritime à tirer avantages des initiatives des médias en matière de reportages sur le maritime et en particulier de celle de la BBC. Depuis septembre, l’émission « The Box » se propose de suivre durant un an, les aventures d’un conteneur peint aux couleurs de la BBC chargé au Royaume-Uni en Eastbound (voir encadré).
« Une telle opportunité d’expliquer au travers d’un grand média, la nature des marchandises transportées, le type de navire utilisé et même de présenter les transporteurs n’est pas si fréquente. Les interviews des équipages sont également au programme. Les caméras doivent être bien accueillies à bord afin de présenter les conditions de travail des navigants », poursuit le présentant du P & I Club.
« Si nous continuons à ne pas prendre en compte le client final, le métier de marin deviendra de plus en plus impopulaire; ce qui conduira à accroître les difficultés de recrutement; cela ne sera pas sans conséquence sur le nombre des accidents. Le législateur sera ainsi encore plus enclin à augmenter la pression juridique sur le transporteur en augmentant le niveau d’indemnisation. Encore plus préoccupant, cela renforcera la tendance actuelle à considérer que le transporteur maritime doit toujours plus participer à l’indemnisation des victimes, quel que soit son degré réel de responsabilité dans le sinistre. Ainsi le coût des sinistres pris en charge par les P & I continueront à augmenter », prévient Mike Salthouse.
Bref, un petit clap vaut mieux qu’une grande claque. Cela n’aura sans doute pas échapper à Louis Dreyfus Armateurs, à MSC ou à Zodiac Maritime Agencies (qui exploitait le MSC-Napoli). Les trois disposent de représentants au conseil du NEP & IC, selon le site internet de ce dernier.
Expériences françaises
Le shipping est international, voila pourquoi les « bonnes » pratiques se diffusent si facilement: le "concept" de la série britannique ressemble étrangement à celui qui a lié durant treize semaines les porte-conteneurs de la CMA CGM à l’émission Thalassa entre le 28 septembre et le 28 décembre 2007.
L’émission française a notamment permis à Jacques Saadé d’exprimer tout le bien qu’il pensait de l’extrême souplesse dont fait preuve le registre britannique (JMM du 23-11-2007).
Dans un autre registre, celui de la « médiatisation » grand public, le risque de confusion entre communication et information n’est pas négligeable, si l’on en juge par l’article paru dans Le Monde daté du 3 janvier consacré au « Grand chambardement en Méditerranée ». Quatre fois, le mot docker est utilisé pour expliquer les problèmes au Pirée, d’abord, en Méditerranée, et pour finir, à Marseille.
Visiblement, l’envoyé spécial à Malte a rencontré beaucoup de personnalités du monde armatorial, portuaire et scientifique mais n’a jamais entendu parler des grands manutentionnaires, asiatiques (Hutchison, PSA, etc.) ou non, qui « maillent » le monde portuaire et sont en concurrence frontale avec les grands transporteurs conteneurisés. Dans un prochain article peut-être, consacré à Rotterdam, par exemple.
The BBC News Box
Le site internet de BBC News explique que le concept de l’émission The Box consiste à présenter aux téléspectateurs, aux auditeurs et aux internautes les différentes facettes du commerce international et de la mondialisation en suivant un 40’ dry dans son tour du monde maritime. Équipé d’un GPS afin de pouvoir être suivi en temps réel, ce conteneur aux couleurs de BBC News a embarqué à Southampton en septembre pour Shanghai avec un chargement de Wisky Chivas Rigal. À chaque étape, un journaliste explique qui est le chargeur, ce que représente, pour son activité, la grande exportation; l’importance de son chiffre d’affaires export; etc. Ce programme télé, radio et internet doit durer un an.
Le coût de l’émission est très raisonnable, souligne BBC News, car il s’agit d’un vrai conteneur. Le média britannique remercie le Container Shipping Information Service (CSIS) et la NYK pour leur aide. La compagnie japonaise ayant fourni le conteneur.
Les internautes sont invités à faire parvenir des photos du BBC Unit peint en orange vif.