Social: un équilibre encore fragile

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Après les grèves du printemps, tous les trafics tardent à revenir.

L’action est toute récente. Elle s’est déroulée le 24 octobre à l’entrée du Havre. Cet après-midi-là, le personnel CGT du Grand port maritime est dans la rue. Mais, c’est une première, les troupes du secrétaire général de la CGT, Patrick Deshayes, ont rejoint le personnel en grève de Renault Sandouville pour monter un barrage filtrant à une heure de pointe. Devant micros et caméras, le leader de la CGT l’explique clairement: l’action du jour poursuit un double objectif. Le personnel veut soutenir les salariés de Renault, frappés par un plan de mille suppressions de postes dans l’usine du haut de gamme de la marque, mais aussi marquer les esprits à quelques jours de la signature de l’accord-cadre de la réforme portuaire. « On veut montrer que nous sommes là et qu’il va falloir compter avec nous dans les négociations au plan local. Nous n’avons pas voulu cette réforme ni de cette politique. Il ne va pas falloir se mettre en travers de notre route », souligne Patrick Deshayes. À la suite de cette action, la CGT s’est réunie en assemblée générale le 27 octobre. L’objectif: « Montrer que tous les travailleurs portuaires sont derrière leur syndicat, qu’ils lui donnent un mandat pour aller négocier au niveau local avec le port et les entreprises de manutention », note Patrick Deshayes. La réforme portuaire entre aujourd’hui dans l’une de ses dernières phases. Celle où la négociation va venir au niveau de chaque port. Mais avant d’en arriver à ce stade, il a fallu passer des heures difficiles. D’un côté comme de l’autre. Depuis le mois d’avril dernier et jusqu’à la mi-juillet, de nombreuses manifestations et mouvements de grève ont paralysé les terminaux. « Ce n’est pas de la relance, c’est de la casse sociale », soulignent alors les dirigeants de la CGT du port du Havre qui s’opposent, avec force, au transfert du personnel de conduite et de maintenance dans le secteur privé. Pendant trois mois, plusieurs actions spectaculaires vont être organisées. La CGT brûle des cercueils en guise de réforme, jette du haut du pont de Normandie des mannequins symbolisant « tous ceux qui soutiennent la politique de Sarkozy » et reçoit parfois le renfort des agents et dockers du port de Rouen. Le port du Havre est régulièrement en grève, portiques levés. Aux actions sur le terrain s’ajoutent aussi la suppression des services de nuit et la grève des heures supplémentaires.

Arrêter une grève

Face à cette situation, les représentants des entreprises tentent de réagir. À plusieurs reprises, Christian Leroux, le président de la puissante Union maritime et portuaire, dénonce ces mouvements. « Il faut savoir arrêter une grève », dit-il en juillet en citant l’ancien leader communiste, Maurice Thorez! Mais le mal est fait. Au début de l’été, les représentants des acteurs portuaires veulent taper sur point sur la table. Alors que les discussions battent leur plein à Paris, les décideurs havrais dressent le bilan. Terrible. Après trente et un jours de grève, le port affiche des pertes colossales: 78 M€ de manque à gagner, 191 escales annulées et transférées vers le nord de l’Europe, 130 000 conteneurs non traités, un trafic fluvial qui plonge de plus de moitié… Autre constat, signé Christian Paschetta, le président de la Générale de manutention portuaire (GMP) et de l’Union des industries de la manutention: sur les six premiers mois 2008, son entreprise a traité 380 000 conteneurs. Soit 55 000 de moins que sur les six derniers mois de 2007! Quelques jours plus tard, la CGT décide d’alléger son mouvement en organisant une grève hebdomadaire de quatre heures chaque vendredi ou samedi selon les semaines.

MSC revient avec la quasi totalité de ses trafics

« Aujourd’hui, confie Christian de Tinguy, le dirigeant de Terminaux de Normandie, les cadences de travail sont bonnes sur les portiques si l’on s’organise bien et les trafics sont plutôt revenus ». À quelques exceptions près néanmoins. Mærsk, qui fut le plus rapide à partir dès l’annonce des premiers mouvements de grève, n’a pas encore ramené tous ses trafics au Havre. Selon une estimation des acteurs portuaires, le numéro un mondial n’aurait remis sur les lignes havraises que la moitié de son trafic habituel, par mesure de prudence et dans l’attente d’un retour complet à la normale. Car l’ouverture des négociations au plan local, à compter de la mi-novembre, va marquer une nouvelle étape. Autre exemple: MSC. L’armateur helvético-italien, servi sur les terminaux de Bougainville, aurait aujourd’hui remis la quasi-totalité de ses trafics au Havre.

Après une première partie de l’année 2008 très difficile, le port du Havre retrouve peu à peu une tendance à la croissance. « Nous avions perdu beaucoup de flux de conteneurs jusqu’à l’allégement des mouvements de grève », soulignait récemment Jean-Pierre Lecomte, le président du conseil d’administration. Résultat: le trafic a progressé de 8 % environ en septembre 2008 par rapport à septembre 2007. Demeure une incertitude toutefois: la baisse des flux asiatiques. Mais Jean-Pierre Lecomte veut se montrer « confiant ». « Le port du Havre est sur une stratégie de fidélisation avec ses clients, explique-t-il. Si le marché asiatique baisse globalement, la part du Havre devrait rester au moins équivalente à ce qu’elle est aujourd’hui ».

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