Le projet tient en haleine l’ensemble des acteurs du fret régional: une plate-forme multimodale adossée aux ports publics sur la Moselle pourrait voir le jour dans les années futures. Elle constituerait un point d’appui idéal pour relancer un trafic de conteneurs sur la rivière à grand gabarit. Cette dernière voit transiter chaque année environ 9 Mt à la frontière franco-allemande d’Apach. 10 M€ ont été inscrits au contrat de projet État-Région 2007-2013 pour accompagner sa réalisation. Par ailleurs, l’Établissement public foncier lorrain (EPFL) a été missionné pour étudier les disponibilités foncières le long de la Moselle.
« Une étude d’opportunité socio-économique a récemment conclu à l’intérêt d’une connexion fluvial-route, car le rail-route existe déjà à Athus », explique Fabrice Deniau, chargé de mission infrastructures au conseil régional de Lorraine. Implantée en Wallonie, au point de rencontre des frontières belge, française et luxembourgeoise, la plate-forme bimodale d’Athus relie Amsterdam, Rotterdam et Zeebrugge à leur hinterland industriel (150 000 mouvements d’EVP par an). En Lorraine, la future plate-forme multimodale aurait la particularité d’être bipolaire avec une plate-forme principale au nord de Metz et une plate-forme satellite plus au sud, à proximité de Nancy. En effet, en raison du tirant d’air disponible sous les ponts, l’accès à la partie sud de la Moselle à grand gabarit ne peut se faire qu’avec deux couches.
En Moselle, deux sites répondent aux caractéristiques requises pour accueillir la plate-forme principale: une centaine d’ha de réserve foncière, avec la possibilité d’accueillir des trains allant jusqu’à 1 000 m de long. Il s’agit du port de Thionville-Illange et du nouveau port de Metz, deux infrastructures gérées par la Chambre du commerce et de l’industrie de Moselle. Chacun présente des atouts et des inconvénients. Thionville-Illange dispose d’équipements portuaires de bon niveau, mais ses accès routiers et ferroviaires doivent être revus. Par ailleurs, la plate-forme a déjà une forte activité avec ArcelorMittal. Port céréalier par excellence, le nouveau port de Metz bénéficie d’un bon raccordement routier et ferroviaire, mais des aménagements portuaires demeurent nécessaires.
En ce qui concerne la plate-forme secondaire, le port de Nancy-Frouard et le site de Gondreville à proximité de Toul, à l’est de Nancy ont été retenus. Bien que le promoteur en immobilier logistique Gazeley se soit engagé dans la commercialisation d’un parc logistique de 77 ha à Gondreville, Nancy-Frouard semble bénéficier de nombreux atouts en terme d’équipement. En effet, aucune installation portuaire n’est actuellement en place à Gondreville.
Un comité de pilotage associant les collectivités territoriales, l’État, VNF et RFF devrait arbitrer entre les différents sites cet automne. « Dans l’esprit des compagnies maritimes, des opérateurs portuaires et des commissionnaires de transport, la Moselle n’est pas une rivière conteneurisable. Mais nous avons la chance que les ports de la mer du Nord soient encombrés au niveau des accès routiers. Toutefois, nous devons conduire une démarche commerciale en rencontrant les responsables portuaires avec un équipement à promouvoir », souligne Jean-Philippe Morétau, responsable de la division nord-est de VNF. Les trois opérateurs historiques sur la Moselle, CFNR, TransEst et HTAG sont-ils prêts à accepter de voir arriver une nouvelle concurrence dans leur chasse gardée? Les logisticiens sont-ils prêts à recourir au report modal?
Avec ces deux points d’appui, le développement d’une ligne conteneur sur la Moselle aurait davantage de chance d’aboutir. En 1999, la CFNR avait initié une telle ligne sur la Moselle. Enthousiaste, la Chambre de commerce et de l’industrie de la Moselle avait investi dans une plate-forme conteneurisée sur le port de Metz, sans portique fixe, mais avec des outils de manutention mobiles. Le chargeur Ikea qui dispose à Metz d’un entrepôt central intermodal pour la livraison de tous ses magasins d’Europe du Sud (Portugal, Espagne, France) avait fait part de son intérêt. Mais après avoir atteint les 4 000-5 000 EVP en 1999-2000, l’expérience a tourné court, faute de rentabilité.