Pendant que Mærsk annonce du retrait de capacité entre l’Europe et l’Extrême-Orient (voir p. 35), Jacques Saadé fait part de ses inquiétudes dans un entretien paru dans Le Figaro du 2 juillet.
Les transporteurs des conteneurs sont donc confrontés à deux phénomènes: la hausse du coût du combustible et un ralentissement de la demande de transport.
Selon le président de CMA CGM, le combustible représente environ 60 % du coût d’un voyage. « Il est vrai que nous répercutons en grande partie cette hausse sur le client mais cela va devenir difficile » regrette Jacques Saadé ajoutant qu’à partir d’octobre « les armateurs européens n’auront plus le droit de discuter des tarifs pour des questions de concurrence. Ce sera chacun pour soi ».
La fin du système conférentiel programmé pour le 18 octobre devrait poser en effet une grave difficulté à toutes les compagnies desservant l’Europe. Durant des années, il n’y avait pas ou peu de concurrence sur les surcharges, THC comprises. Les armateurs membres de la conférence et les indépendants appliquaient les mêmes avec, selon les cas, un léger décalage dans le temps.
Seul le taux de base, devenu minoritaire, faisait l’objet d’une concurrence. À partir du 18 octobre, l’intégralité des recettes liées au transport des conteneurs sera variable et entrera dans le champ de la concurrence. Au moment même où la demande de transport ralentit.
En 2007, les navires CMA CGM bénéficiaient d’un taux de remplissage de 100 % entre l’Europe et l’Asie, contre 94 % aujourd’hui, constate Jacques Saadé. Ce qui entraîne une chute des taux de fret. Dans le sens Asie-Europe, le taux est « passé de 1 500 à 1 300 $ par conteneur » (probablement par 40′; ndlr JMM). Mécaniquement, le chiffre d’affaires baisse. Mais dans le même temps, « nous réceptionnons de nouveaux navires plus grands qui nous donneront un prix de revient à l’unité en forte amélioration »" ajoute le président du groupe marseillais. Mais ces plus grands navires auront un coefficient de remplissage encore plus dégradé, donc l’effet d’échelle jouera de moins en moins. « Nous voyons aujourd’hui sortir d’Asie des bateaux qui ne sont pas pleins. C’est une crise latente (…). Je ne vois pas d’embellie avant fin 2009 ». Message que les chargeurs et les commissionnaires de transport vont fort vite comprendre pour spéculer à la baisse.
Concernant l’intérêt que CMA CGM porterait au rachat d’Hapag-Lloyd, « nous ne sommes pas acquéreurs. »
Nous leur proposons une rémunération plus attractive
Concernant la réforme portuaire, le président du groupe CMA-CGM ne comprend pas la résistance des personnels des ports autonomes car « nous leur proposons de travailler avec des outils plus modernes et une rémunération plus attractive ».
Toujours très favorable au benchmarking, Jacques Saadé rappelle que son terminal maltais réalise un volume comparable à celui du Havre et de Marseille réunis.
En outre, « le nombre de grues dans les ports français est nettement insuffisant pour pouvoir débarquer un bateau de manière rapide. À Shanghaï, un navire est opéré à une cadence de 190 mouvements par heure, soit deux fois plus qu’au Havre et même quatre fois plus qu’à Marseille-Fos ». L’importance des escales dans ces ports n’est toutefois pas précisée.