L’idée générale était de vérifier par l’expérimentation que le matériel était bien adapté aux caractéristiques techniques du navire. En particulier, la longueur des deux « chutes » (ou tubes) télescopiques devait être la bonne: trop courte, les passagers terminent dans le vide; trop longue, ils « finissent » entortillés. Conçu et fabriqué par RFD, basé en Irlande du Nord, ce système dénommé Marin-Ark fait partie des quelques dispositifs disponibles sur le marché. Certains ferries de SeaFrance sont équipés du VEC, Viking Evacuation Chute. « Les deux systèmes nous paraissent également fiables, avec une mise en œuvre facile », explique le commandant Gosselin, désigné pour la sécurité et la sûreté. Il suffit d’appuyer sur un bouton pour déclencher le déploiement des chutes, puis le gonflage automatique des radeaux.
Le Marin-Ark peut être équipé de deux à quatre radeaux identiques d’une capacité unitaire de 106 à 109 personnes. Ainsi, selon le nombre de radeaux choisis, 212 à 430 personnes peuvent être évacuées en moins de 30 minutes pour respecter les dispositions de la convention Solas. Elles « amerrissent » directement dans un radeau, puis passent « à sec » (ou presque) dans celui d’à côté. Pour éviter les mauvaises surprises, les radeaux RFD sont parfaitement symétriques dans le plan horizontal: en clair, il n’y a ni endroit, ni envers. Quelle que soit la façon dont ils se gonflent, ils sont toujours immédiatement utilisables.
Le 20 juin dernier, les trois radeaux qui devaient accueillir les passagers « tombant » de 16 m se sont effectivement gonflés en moins de trois minutes, après le déploiement des deux chutes. La vingtaine de membres d’équipage qui a testé le système, s’est, à l’évidence, bien « amusée », d’autant plus que le ferry était à quai avec un vent faible et sans clapot.
Ce test a cependant montré que remorquer un radeau même peu chargé et dans une zone très protégée, avec un canot doté d’un moteur hors-bord de 50 CV, n’a rien d’évident. En situation réelle, avec un peu de clapot et un radeau chargé, il faut souhaiter que le vent souffle du bon côté, celui qui éloigne du ferry.
Et la nuit: l’expérience de stabilité
La nuit du 20 juin a été longue à bord du SeaFrance-Molière car il était question de mener à bien « l’expérience de stabilité ». Haute technologie ou pas, tout navire neuf ou ayant subi de grosses interventions doit procéder à la détermination la plus exacte possible de son centre de gravité. Pour ce faire, un pendule à ailettes baignant dans une cuve d’huile pour amortir les oscillations a été installé dans le pont garage. Le navire étant à lège, et après avoir tenu le compte exact des poids « parasites »
Le premier acte du Molière débutera le 30 juin prochain avec deux à trois jours d’essais de prise de poste à quai à Calais et à Douvres. Le plus grand nombre d’officiers de passerelle devra ainsi faire entrer et sortir le ferry des différents postes qu’il est susceptible d’occuper, afin de se mettre « les manœuvres dans l’œil », un pilote portuaire étant à bord. Le ferry mesure 203,30 m hors tout pour 25 m de large. Il est maintenant équipé de trois propulseurs d’étrave.
Pour gagner du temps, les six commandants du Molière ont effectué un stage d’une journée sur le simulateur de pilotage de Douvres. Les caractéristiques physiques du ferry ont été chargées dans la mémoire du simulateur. Les commandants ont pu ainsi s’essayer aux manœuvres d’accostage avant que ne raisonnent les trois coups du brigadier.
Toujours en travaux, le SeaFrance-Molière abrite provisoirement des chariots élévateurs, des bouteilles de gaz, et autres bennes à déchets.