« L’année 2007 a été marquée par une forte évolution du fonctionnement d’Armateurs de France, notamment au niveau des équipes, pour renouer des liens avec les adhérents, les pouvoirs publics et les institutions internationales », a commencé Eudes Riblier, son président. En interne, l’arrivée d’Anne-Sophie Avé au poste de déléguée générale en avril, a coïncidé avec une refonte de la structure. Sans apporter de grands changements, elle a surtout mis « du liant, fixé un cap, développé le sens du travail collectif et du service à nos adhérents », précise-t-elle. Et pour les mois à venir de nouvelles modifications sont encore à prévoir. Pour l’année à venir, elle souhaite modifier « des petits points de réorganisation pour améliorer encore la lisibilité de nos services, faciliter le travail coopératif et valoriser chacun dans sa contribution individuelle à la réussite collective de nos missions ».
L’an passé, Armateurs de France a mis en place des comités de pilotage portant sur trois thèmes: le portuaire, l’environnement et la formation. Des structures qui doivent donner « une plus grande souplesse dans l’élaboration des positions concertées ». Concernant les places portuaires, le comité de pilotage est présidé par Raymond Vidil. Un sujet d’actualité avec le plan de relance des ports. Et Eudes Riblier s’est montré favorable à ces changements. « Les ports sont les points d’entrée pour la logistique. Il y a un intérêt à avoir des ports qui attirent des trafics, des emplois. Nous souhaitons que les ports français passent du statut de maillon faible à celui de maillon fiable. » Le second comité de pilotage, présidé par Patrick Decavèle, traite des questions environnementales. Sur ce sujet, les armateurs reconnaissent que leurs qualités en la matière ne feront pas tout. « Nous avons notre part de responsabilité dans l’émission de CO2, de soufre et d’azote. Nous devons voir comment nous pouvons faire de nouveaux efforts et être démonstratifs pour apporter de nouvelles alternatives au développement durable », a indiqué le président d’Armateurs de France. Et l’organisation a déposé son nouveau slogan, « pour faire du vert, il faut du bleu », sous-entendu, pour être écologique il faut du maritime. Seul point, le vert de l’écologie se fait par le mariage du bleu et du jaune. Cette dernière composante n’a pas été abordée.
Le troisième comité de pilotage vise les questions touchant à la formation et l’emploi, sous la présidence de Robert de Lambilly. Des questions majeures, a précisé le président. « après des années de récession, le métier de navigants se développe. Nous devons relancer la machine. Même si nous avons en mains tous les éléments pour relancer l’attrait vers nos métiers, l’inversion de tendance ne se décrète pas ». Et le sujet sur les écoles de la marine marchande est revenu sur le devant de la scène. Eudes Riblier a soutenu son idée de voir les quatre écoles devenir une grande école, qu’il appellerait « académie de marine », dont les locaux seraient répartis sur deux sites. Ainsi des quatre sites actuels (Le Havre, Saint-Malo, Nantes et Marseille), seuls deux seraient sauvés. Il propose aussi que cette nouvelle formule de formation maritime s’adapte avec des cycles courts et d’autres plus longs. Le constat mondial selon lequel la pénurie de navigants est aujourd’hui une réalité touche aussi la France. Les 10 000 navigants, dont 3 000 officiers, ne suffisent plus. « Notre besoin serait d’augmenter de moitié les promotions des écoles. Pour se faire, il serait nécessaire de tripler le nombre de candidats pour avoir une vraie sélection. » Pour « rehausser le prestige de cette formation, a indiqué Dominique Bussereau, le secrétaire d’État aux Transports, lors du dîner qui a suivi, les élèves se verront décerner le titre d’ingénieur, au terme de leurs études. » Une annonce qui ne réjouit pas tous les armateurs qui craignent que ce titre alimente l’hémorragie des diplômés qui quittent le secteur après leur formation.
Parallèlement à ces questions de formation et d’emploi, la direction d’Armateurs de France a ouvert un chantier pour la réécriture de la convention collective des personnels navigants et sédentaires. De premiers contacts ont été pris avec les partenaires sociaux sur ce sujet. L’ouverture de ce chantier ne signifie pas pour autant que les discussions au fond aient démarré. « Notre objectif, a souligné Anne-Sophie Avé, n’est pas de toucher au fond, mais de s’adapter aux conditions actuelles de vie. » Armateurs de France s’est donné un an pour aboutir à la nouvelle rédaction de ces textes.
À côté de ces comités de pilotage, l’organisation patronale a aussi resserré les liens avec les institutions nationales et internationales. Tant à l’OMI qu’à l’ICS (International Chamber of Shipping) qu’à l’Ecsa (European community of Shipowners association), Armateurs de France veut y défendre les intérêts de ses adhérents. Outre les postes occupés par les membres de l’organisation française, Philippe Louis-Dreyfus à la présidence de l’Ecsa et Patrick Decavèle à la vice-présidence de l’ICS, Armateurs de France s’appuie sur des experts des compagnies maritimes pour fournir des avis éclairés. Une politique qu’Armateurs de France a décliné sur les institutions nationales. « L’État a changé de braquet. Nous sentons une vraie volonté de changer les choses. Nous espérons qu’elle se traduise dans les faits. »
Ce dossier des relations avec les organisations internationales a aussi été l’occasion de soulever la question de la présidence française à l’Union européenne à partir du 1er juillet. Avec les mois de juillet et d’août qui sont peu actifs, Armateurs de France craint que cette présidence soit rapide. Parmi les dossiers qu’Armateurs de France souhaite voir traiter, celui du troisième paquet Erika, « un peu déficelé », selon les termes d’Eudes Riblier, prend une place de première importance. Dans ce dossier, deux textes ne font pas l’unanimité et notamment celui sur la responsabilité de l’État du pavillon. « Par ce biais, nous pouvons nous débarrasser des armateurs voyous et des États voyous. » La France est attendue sur ce sujet, selon Armateurs de France. Quant à donner une définition de ces États, le président pense « à tous ces États qui vendent des titres de navigation sans avoir une administration de contrôle. La France doit être un vrai porte-parole contre ces nations ». Et pour faire avancer le dossier, les possibilités sont nombreuses. Soit au travers des directives européennes soit par l’OMI qui dispose déjà d’un arsenal juridique avec la convention de 2004 qui rend les obligations opposables aux tiers. Une autre alternative aurait été de porter ces questions devant les tribunaux. Dans le procès Erika, il était difficilement concevable juridiquement qu’un État soit jugé par un tribunal correctionnel. « Un renvoi devant la Cour internationale de justice aurait pu être requis. Voir, devant la Cour de Hambourg. Rien n’a été fait », regrette Anne-Sophie Avé.