Sentence 1140 du 22 mai 2007

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Un navire de charge, affrété au voyage via une chaîne de trois intermédiaires a effectué quatre rotations identiques avec le même type de cargaison ayant fait chacune l’objet d’un récapitulatif d’affrètement se fondant sur même une charte-partie de référence. À l’issue des voyages, les surestaries sont restées impayées. Le réceptionnaire des quatre cargaisons, dénia la qualité d’affréteur malgré les déclarations du dernier intermédiaire affirmant n’avoir agi que comme courtier pour le compte de celui-ci.

L’armateur, demandeur à l’arbitrage, réclame la condamnation du réceptionnaire au règlement des surestaries, soit en sa qualité d’affréteur, soit en sa qualité de mandant du dernier intermédiaire. Alternativement que ce soit le dernier intermédiaire qui soit reconnu mandataire apparent ou, alternativement encore, qu’il soit reconnu affréteur et condamné dans les mêmes termes.

Le dernier intermédiaire, défaillant à l’instance, n’a produit aucune défense. Le réceptionnaire, quant à lui, rejette la compétence de la Chambre, dénonce l’existence de contrats valides et d’une clause compromissoire régulière, alternativement demande qu’il lui soit donné acte qu’il n’était pas l’affréteur. L’arbitre unique, s’agissant d’affrètement maritime, matière internationale s’il en est, tint compte des usages du commerce international pour apprécier les données du différend. La loi française, lex fori, s’appliquant, quant à elle, à la procédure. En premier lieu l’arbitre releva que les transports en cause étaient une réalité non mise en doute, leur matérialité légitimant a posteriori l’existence des contrats. Il constata ensuite l’accord sans réserve des parties recueilli par le courtier intermédiaire sur la base des quatre récapitulatifs d’affrètement, se référant à une même charte-partie de référence dont deux clauses renvoyaient explicitement à la compétence de la Chambre et à l’application du droit français.

L’arbitre rejeta la prétention soutenant que l’apposition de tampon ou de signature manuscrite, ou l’approbation formelle ou séparée de la clause d’arbitrage de la charte-partie de référence puisse être, au moment de la négociation, une condition impérative et/ou suspensive.

En conséquence, l’arbitre se déclara compétent.

Sur trois intermédiaires, deux étaient des courtiers d’affrètement, la qualité du 3e (ci-après ‘Y’) étant controversée, il convenait de l’établir. ‘Y’ a négocié, préalablement à l’affrètement du navire, puis conclu, un contrat avec le réceptionnaire pour des prestations plus larges que le simple transport maritime et à un prix à la tonne sans commune mesure avec celui du fret maritime. ‘Y’ a offert une prestation de bout en bout pour les quatre enlèvements, choisissant le transporteur maritime et les autres intermédiaires (consignataire, manutentionnaire, camionnage, etc.). ‘Y’ a ensuite présenté le réceptionnaire dans les négociations d’affrètement comme « operator », terme sans signification propre en l’espèce, tout en laissant les autres courtiers et l’armateur comprendre qu’il s’agirait de l’affréteur. L’arbitre conclut que ‘Y’ s’était entremis dans la négociation d’affrètement en étant, en fait, directement intéressé comme affréteur ou, de toute manière, comme cocontractant, sans en avoir avisé auparavant, par négligence, incompétence ou délibérément, les parties concernées. Il s’agit d’un comportement inadmissible et gravement fautif.

Au sujet du courtier de l’armateur et du courtier intermédiaire, l’arbitre observa qu’un courtier n’était pas responsable de l’exécution des contrats conclus par son entremise, mais qu’il restait responsable des fautes professionnelles commises dans l’exécution de sa mission et devait prendre soin d’éviter toute présentation erronée des faits. Il lui appartenait d’employer des termes clairs et sans équivoque, des termes qui ne sont pas obscurs, ni contradictoires. Il lui appartenait également de se tenir documenté sur la moralité et la solvabilité des parties avec lesquelles il était envisagé de faire affaire et de renseigner sa cliente sur la crédibilité de sa future cocontractante.

Concernant la négociation d’affrètement, l’arbitre, se fondant notamment sur la publication du BIMCO « Check before fixing », regretta que l’armateur et son courtier n’aient pas été plus vigilants dans le contrôle de la contrepartie.

Conclusions

Après avoir vérifié que l’imputabilité de l’apparence ne trouvait pas son origine dans les actes du réceptionnaire, que la compétence apparente de représentation de ‘Y’ était établie, ainsi que la possibilité pour l’armateur de connaître la réalité de la situation de ‘Y’, l’arbitre conclut que ‘Y’ ne bénéficiait pas d’un mandat apparent et, plus généralement, affirma que la contrepartie de l’armateur dans les quatre affrètements successifs était ‘Y’ qui avait ici qualité d’affréteur et assumera les responsabilités en découlant.

L’arbitre donna acte au réceptionnaire qu’il n’était pas l’affréteur du navire.

‘Y’ fut donc condamné au règlement des surestaries pour le montant demandé par l’armateur et aux intérêts de droit, ainsi qu’aux frais d’arbitrage et à une somme au titre de l’art. 700 du NCPC. Enfin, l’arbitre prononça l’exécution provisoire de la sentence.

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