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« Attention aux dégâts collatéraux »

Le 22 janvier, le bureau de l’Association française des capitaines de navires diffusait le communiqué suivant.

« Le dommage à l’environnement, voilà une nouvelle notion du droit qui arrive à point nommé après le Grenelle de l’environnement. Qui ne pourrait s’en réjouir? Déjà, les communes frappées par la marée noire, comme les associations écologiques échafaudent leurs projets sur les dommages-intérêts attribués. Des années d’attente ont focalisé l’attention sur cette seule problématique, et des éléments primordiaux des enquêtes sont passés en arrière plan, voire complètement oubliés. Pourtant, il faut bien se soucier de la jurisprudence qui s’établit, et des conséquences qui s’ensuivront. Les progrès réalisés depuis le naufrage de l’Erika ne sauraient exonérer de responsabilités alors engagées. Cela pourrait, dans ce cas, endommager gravement les efforts entrepris depuis. Ainsi, le tribunal correctionnel de Paris a délaissé deux mises en causes primordiales, celles des responsables des contrôles de l’État du pavillon (Malte), et de l’État du port (la France) pour le dernier appareillage de l’Erika, tout en maintenant celle des officiers du centre opérationnel de la Marine à Brest, responsables de la gestion en temps réel de l’Action de l’État en Mer. Ces États sont responsables du contrôle de la sécurité du navire, et leurs représentants sont habilités à le bloquer à quai tant que les réparations indispensables ne sont pas réalisées. Une enquête diligentée par le Tribunal de commerce de Dunkerque expose d’une manière irréfutable les carences particulièrement graves de la société de classification qui a reçu délégation de l’État du pavillon pour la délivrance des titres de navigation de l’Erika. Elle a été effectuée par des experts dont la compétence et le sérieux ne sauraient être mis en doute. Leur rapport d’expertise judiciaire peut être consulté pour l’essentiel sur le site internet de l’Afcan. Le tribunal correctionnel de Paris n’a pas admis que le vetting prouvait une recherche de sécurité supérieure à la simple application des règlements internationaux. Pourtant, ce contrôle, initié par les sociétés pétrolières à la suite de la marée noire causée par le naufrage de l’Amoco-Cadiz est volontaire, systématique, et destiné à pallier les insuffisances constatées des règlements internationaux ».

Que doit-on conclure de tout cela en droit français?, s’interroge l’Afcan. « Les juges ne parlent pas de préjudice, mais avec la prise en compte du dommage à l’environnement, prolongement juridique logique du Grenelle de l’environnement, la responsabilité des donneurs d’ordre est enfin évaluée, ainsi que les éventuelles pressions sur l’action du capitaine.

Les contrôles de l’État du pavillon et de l’État du port sont comme d’habitude considérés absents de la chaîne des responsabilités, perdant ainsi une bonne partie de leur crédibilité.

Le contrôle volontaire de sécurité "vetting" devient pénalement dangereux au départ d’un port français, ce qui réduira l’usage systématique de ce type de contrôle.

Dès qu’il a été sauvé du naufrage, le capitaine de l’Erika, présumé coupable, a été aussitôt jeté en prison […] en l’absence de tout jugement, l’Afcan[…] a donc lieu d’être satisfaite de la relaxe prononcée pour le capitaine de l’Erika. Toutefois, pour le procureur de la République, cela implique la disparition de l’habituelle culpabilité automatique du capitaine.

Après la condamnation de l’armateur de l’Amoco-Cadiz, les compagnies pétrolières se sont empressées de se débarrasser de leur branche "armement de navires pétroliers", il y a tout lieu de penser qu’elles se débarrasseront prochainement de leur branche "affrètement de navires pétroliers" en délocalisant la propriété de la cargaison au profit de sociétés écrans inaccessibles, et en achetant le pétrole une fois livré au port de destination. C’est aussi valable pour tout produit dangereux transporté en vrac.

Voilà de quoi inquiéter sérieusement les communes du littoral et les associations écologiques. […] ».

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