La question du démantèlement des navires en fin de vie a été au cœur des débats et de prises de position ces derniers mois. Le périple de l’ex-Clemenceau a permis de révéler aux yeux de l’opinion publique mondiale les conditions dangereuses et polluantes dans lesquelles s’effectue la déconstruction de nombreux navires poubelles sur les plages de l’Asie du Sud. "Les problématiques qui sous-tendent aujourd’hui l’exigence minimale, à l’échelle mondiale, d’un démantèlement assurant à la fois la protection et la santé des travailleurs et de l’environnement demeurent complexes", analyse-t-on à Brest. "Parce qu’ils détiennent l’essentiel de la flotte marchande, les pays économiquement développés se doivent de montrer l’exemple et de ne plus se contenter de fermer les yeux sur des pratiques qui assimilent bien souvent les pays du Sud à la poubelle du Nord."
Selon le Livre vert, ce sont 200 à 600 navires en fin de vie, ainsi que l’ensemble des matières dangereuses qu’ils contiennent, qui sont traités, dont plus des 2/3 dans des conditions sanitaires, sociales et environnementales déplorables. Les quelques conventions internationales encadrant cette industrie (convention de Bâle sur le traitement des déchets dangereux, convention Marpol) sont souvent contraignantes ou contournées du fait des interprétations entourant la notion de déchets.
UNE COURSE D’OBSTACLES
Or, dans un avenir proche, le nombre de navires en fin de vie est amené à augmenter considérablement, du fait notamment de l’entrée en vigueur, à compter de 2010, de l’interdiction de circulation des pétroliers à simple coque. Près de 800 unités seraient ainsi concernées. Certes, l’OMI prépare une réglementation universelle et contraignante sur le recyclage des navires selon des méthodes sûres et écologiquement saines. Mais la perspective d’un éventuel accord ne devant pas intervenir avant 2010, pour une entrée en vigueur quelques années plus tard, l’Union européenne, et en son sein la France, réfléchit à la manière d’assurer la couverture des besoins durant cette période transitoire.
C’est dans ce contexte que Brest se place. "Regroupant plus de la moitié du potentiel français de chercheurs et d’ingénieurs travaillant dans le domaine océanique et rassemblant tous les instituts spécialisés dans la recherche marine, la métropole brestoise se positionne comme l’une des capitales européennes des sciences et technologies maritimes", souligne-t-on à Brest Métropole Océane.
Mais la mise en place d’une telle filière ne s’improvise pas: les retombées sur l’emploi restent difficilement quantifiables; la mise à disposition d’une partie des équipements de réparation navale existants (civils ou militaires) soulève des problèmes; des contraintes de type Seveso sont à prendre en compte; et l’ex-mission interministérielle sur le démantèlement des navires préconise de s’appuyer sur des chantiers déjà existants, sans avoir recours à une subvention publique. "Les obstacles sont donc réels", admettent les Brestois qui, mettant en avant leurs "indéniables atouts", veulent "se projeter dans l’avenir".