Des pièces d’avions aux colis lourds

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C’est un chemin peu ordinaire qu’empruntent les ailes et le fuselage de l’Airbus A380. Trop volumineuses pour être transportées par les avions de fret Beluga, ces pièces voyagent sur le roulier Ville-de-Bordeaux, depuis les centres de production (Allemagne, Espagne, France, Royaume-Uni) jusqu’à la zone portuaire de Pauillac, près de Bordeaux. Elles sont ensuite acheminées par barges sur l’estuaire de la Gironde et la Garonne jusqu’à Langon, 95 km plus loin. C’est là qu’un convoi exceptionnel les prend en charge pour les conduire vers la chaîne d’assemblage final à Toulouse. Construites en 2004 par les chantiers De Hoop aux Pays-Bas, gérées par Socatra pour le compte d’Airbus, les barges Breuil et Brion (75 × 13,80 m) répondent à ce défi. Depuis trois ans, elles livrent en quatre voyages, les trois sections de fuselage, les deux demi-voilures et l’empennage horizontal, nécessaires à la construction d’un A380.

Sur sa partie fluviale, le transport de ces éléments relève de la prouesse. Il a fallu faire siennes les contraintes de marée, des crues ou des franchissements d’obstacles comme le Pont de Pierre à Bordeaux. "Il a été un élément déterminant dans la conception des barges", souligne Philippe Prieur, ingénieur en armement chez Socatra. En effet, le pont construit entre 1810 et 1822 à Bordeaux avec ses 17 arches, a imposé les caractéristiques de largeur, de tirant d’air et de tirant d’eau. Pour permettre le passage des éléments de l’A380, les barges sont équipées de deux plateformes élévatrices (70 t de charge en mouvement, 200 t en position verrouillée). Celles-ci sont positionnées en position basse, soit à 1,2 m au-dessus de la quille pour le transport des éléments du fuselage.

Le Pont de Pierre impose également le respect des horaires, car son franchissement ne peut se faire qu’à marée basse avec des conditions strictes de courant, de vent, de hauteur d’eau et de débit. L’ensemble de ces paramètres est transmis en temps réel à la capitainerie du port de Bordeaux ainsi qu’aux barges. Au final, le temps de passage peut varier de quelques minutes à plusieurs dizaines de minutes.

Les exigences au niveau de la manutention

Enfin, d’importants aménagements ont été réalisés aux deux extrémités du trajet pour respecter les exigences de manutention et de transport des pièces de l’avion. Lors des opérations de chargement à Pauillac, l’arrière du navire est posé avec une contrainte de quelques dizaines de tonnes sur le ponton de transfert. Une opération effectuée par ballastage. "Cela permet lors du transfert des colis d’éviter tout mouvement d’assiette et de conserver un angle constant pendant toute l’opération", poursuit Philippe Prieur. Le déchargement à Langon s’effectue dans un bassin élévateur dans des conditions similaires. Par ailleurs, "lors du transport, les paramètres de navigation, de propulsion et des accélérations dans les trois plans sont enregistrés".

Diversifier l’activité

Atout technique supplémentaire, les Breuil et Brion peuvent être mis en condition "mer" en positionnant les plateformes en position ro-ro, en étanchant ces dernières avec un joint gonflable, ainsi qu’en installant des rehausses de ventilation. C’est ainsi que les deux barges ont participé à l’allègement du Rokia-Delmas échoué en octobre 2006 sur les côtes de l’Ile de Ré. Début février 2007, le Breuil a également été affrété par la société SDV LI Projets industriels pour transporter un tunnelier entre Langon et Pauillac.

Toutefois, Socatra et Airbus sont à la recherche de nouvelles opportunités de fret. Plusieurs études ont été menées pour acheminer des coques de voilier, transporter des colis lourds, une cuve de stockage de gaz, des éléments d’éolienne, etc. "Nous recherchons des trafics complémentaires pour développer l’activité et amortir au maximum le coût de cet outil. Nous pouvons faire du conteneur, du bois, etc. Nous sommes autant intéressés par des trafics réguliers que par des voyages au spot", remarque Daniel Bozzoni, en charge de la gestion de la flotte chez Socatra.

Les Breuil et Brion, deux barges au service de l’environnement

Afin de respecter les normes environnementales, les barges sont équipées d’une propulsion diesel électrique avec des moteurs de dernière génération. Ceux-ci sont conçus selon les nouvelles normes de rejet des gaz d’échappement et installés dans un compartiment machine insonorisé ce qui limite les nuisances sonores. L’étrave des barges ainsi que les hélices de propulsion de type contre-rotative ont été étudiées pour éviter tout déplacement d’eau et empêcher de ce fait les vagues sur les berges de la Garonne.

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