Les produits pétroliers raffinés sont reçus à l’appontement pétrolier situé dans le prolongement vers le sud du môle d’escale. C’est une zone implantée loin de la côte et particulièrement protégée aujourd’hui par trois contrôles successifs, le premier à l’entrée du port autonome, le second à l’entrée du môle d’escale et le troisième à l’entrée de l’appontement pétrolier lui-même par le personnel d’une société de gardiennage payée par les opérateurs locaux.
L’appontement comprend deux postes, celui de l’ouest fait 350 m avec une souille à − 16 m et le second, à l’est, 300 m avec une souille à − 12 m. Le port peut donc recevoir des pétroliers de forte capacité. Trois oléoducs (de 24, 16 et 12 pouces) acheminent le pétrole vers les dépôts. Au déchargement, le rendement va de 400 à 2 000 m3/h en fonction des navires et des oléoducs utilisés.
Deux dépôts pétroliers sont présents sur le port, leur capacité totale est de 453 000 m3. Le plus important est celui de Picoty, une entreprise indépendante, dont le siège social est situé à La Souterraine dans la Creuse; le second est SDLP (Société du dépôt de La Pallice), filiale de Total. Ces deux dépôts alimentent l’hinterland de La Rochelle limité à 100 km au nord et au sud, mais qui se prolonge à l’est jusqu’à Limoges (250 km). Au nord, le port pétrolier de Donges et, au sud, celui de Bassens constituent une concurrence directe, ce qui explique la configuration de l’hinterland.
Biocarburant, une obligation nouvelle
"Nos trafics sont stables pour l’année 2007, explique Olivier Bourdut, directeur du dépôt Picoty. La seule nouveauté pour nous est l’obligation d’incorporer des biocarburants dans les proportions édictées par le gouvernement, 5 % cette année et 7 % l’an prochain. Pour répondre à cette exigence, nous allons nous doter de 40 000 m3 de capacité de stockage en plus. Nous pourrons y recevoir l’ester méthylique d’huile végétale (EMHV) qui sert d’additif dans le gasoil et l’éthanol qui est l’additif pour l’essence sans plomb. Nous investissons en même temps pour modifier les dispositions de chargement des camions pour répondre à ce nouveau besoin." Le dossier des cuves supplémentaires devrait aboutir au deuxième semestre 2008.
Les approvisionnements en EMHV et éthanol arrivent désormais par mer chez Picoty, par navires de 2 500 à 3 000 t. Picoty est partenaire dans le projet d’usines de production d’agrocarburants de la Sica Atlantique (voir encadré p. 28). Mais la future usine ne produira d’abord qu’un pilote de 10 000 t alors que le besoin du dépôt est déjà de 70 000 t pour 2008.
Chez SDLP, Bernard Rabot, le chef de dépôt, constate une baisse des entrées de 5 % depuis le début de l’année. "L’hiver doux et le prix élevé des carburants paraissent être les raisons principales de cette baisse. Ce sont d’ailleurs principalement les fuels qui ont fléchi (− 20 %). Dans le même temps, les gasoils augmentaient. Chez nous, les entrées d’essence sans plomb sont très modestes." Les additifs aux hydrocarbures arrivent par camions pour le moment. Contrairement à Picoty qui achète ces produits, SDLP assure uniquement une prestation de service de stockage et n’est pas propriétaire de la marchandise. "Nous stockons pour le compte de nos clients, explique Bernard Rabot. Le pétrole est acheté par des traders et nous savons souvent au dernier moment qu’un bateau va arriver pour être déchargé. Ce trafic s’est stabilisé depuis quatre ou cinq ans." Les installations actuelles de SDLP sont suffisantes et l’entreprise n’a pas de projet d’agrandissements dans l’immédiat.
Limité par son hinterland, le trafic pétrolier actuel est bloqué aux alentours des 2,5 Mt et aucune évolution importante n’est prévue, car il correspond aux besoins de consommation de la région.
Huiles minérales ou engrais liquides
D’autres produits liquides sont opérés par des filiales de la Sica Atlantique, Sisp et Stel. "Sisp existe depuis 1930, explique Loys de Tarragon, chargé de ce secteur à la Sica. Cette société importait des huiles minérales pour Cofran. Nous avons repris la Sisp en 1993 quand Cofran s’est retiré. La Stel stocke des engrais liquides et Stocks Atlantiques des produits inflammables. Nous sommes donc sur trois marchés: les liquides pour l’agriculture (solution azotée, par exemple), les produits destinés à l’agroalimentaire (huiles végétales, vinasses, dérivés de canne à sucre) et les produits pétrochimiques (pétrole lampant, base pour les huiles minérales, éthanol, etc.)." Avec une capacité de stockage de 70 000 m3, les filiales de la Sica Atlantique font transiter 200 000 m3 par an. C’est uniquement de la prestation de service, le groupe n’étant pas propriétaire de la marchandise.
Un ancien dépôt de 8 000 m3 qui servait à stocker de l’huile pour l’armée a été confié en location au groupe par le port autonome. Tous ces produits passent par le quai Modéré Lombard où se trouvent les canalisations adéquates servant au transit des produits. "Quand nous investissons 1 € sur ces installations, 50 cts servent à l’amélioration de la sécurité et à la protection de l’environnement", précise Loys de Tarragon. La construction de nouvelles capacités de stockage est à l’étude.
Des agrocarburants produits à La Pallice en 2008
La Sica Atlantique s’est lancée dans un projet de construction d’une usine de production d’agrocarburants qui aura, quand elle sera mise en route, des incidences sur les trafics portuaires. Pour monter ce projet, la Sica Atlantique s’est associée à un certain nombre de partenaires. Elle a créé un holding, HAI (Holding Atlantic Invest) dans laquelle se retrouve 40 organismes stockeurs de céréales et oléagineux et où la Sica Atlantique a 50 % des parts. Une société a été créée pour construire et faire fonctionner l’usine, Bionergy Pilot où HAI entre pour 51 %, Sofiprotéol (filière diester) pour 34 % et le dépôt pétrolier Picoty pour 15 %. “Nous avons obtenu l’agrément de l’État pour une première unité pilote de 10 000 t avant de pouvoir produire 50 000 t de plus quand nous aurons terminé l’industrialisation du process, annonce Agnès Buisson, chef de projet à Bionergy. Notre originalité est de produire un agrocarburant directement à partir de la graine de colza sans trituration et sans semi-raffinage. Nous produisons de l’ester éthylique et non de l’ester méthylique comme dans le cas du diester.”
La construction de l’usine pilote va commencer début 2008 sur un terrain situé de l’autre côté de la rue, en face des silos de la Sica Atlantique. L’idée est d’alimenter l’usine par bandes porteuses depuis les silos.
L’agrocarburant, une fois produit, repartira par pipe-line vers les cuves du partenaire Picoty, situé, lui aussi, à proximité. Cette activité va générer des flux. Les oléagineux proviendront de l’hinterland. Mais en fonction des coûts de matières premières et des récoltes, ils pourront arriver aussi, éventuellement, par voie maritime. D’autres produits comme l’éthanol entrent dans la composition de l’agrocarburant. Une partie pourrait provenir des distilleries de Cognac. La fabrication de l’ester éthylique engendrera des sous-produits, tourteaux et glycérine. Les premiers peuvent servir à l’alimentation animale ou à la production d’énergie, les seconds à l’industrie des cosmétiques.
L’usine pilote commencera à produire en 2008.
L’investissement est de 14 M€, dont 6 M€ de subventions publiques (région, département, Europe). L’unité pilote emploiera 25 personnes. Quand la production atteindra les 60 000 t annuelles (en 2010), les flux générés deviendront importants et auront des répercussions sur l’activité du port en termes de matières premières, de coproduits et d’agrocarburants.
Y.G.