Dans les années soixante, l’une des plus grandes zones industrialo-portuaires d’Europe émergeait des marécages entre Port-Saint-Louis du Rhône et Fos-sur-Mer. Le chantier né du "séisme", comme on l’appelait alors, avait remodelé un territoire plus vaste que Paris. En même temps que la gestion des installations commerciales, le PAM se voyait confier la responsabilité d’un espace naturel unique que se partageaient le cheval blanc, le taureau noir de Camargue, les flamants roses venus d’Afrique, et des nuées vrombissantes de moustiques. Le port de Fos devenait en même temps le dépositaire de l’écosystème d’où il avait été tiré.
Un équilibre remis en cause
Pendant longtemps, Fos a participé du mythe du démiurge aménageur. La cohabitation entre nature sauvage et installations industrielles avait ses images. La photo des chevaux blancs de Camargue paissant à l’ombre des hauts-fourneaux sidérurgiques faisait partie de l’album. Freiné par les différents chocs pétroliers, le développement industriel est resté contenu pour l’essentiel dans ses frontières de départ. Près d’un demi-siècle plus tard et la conscience écologique aidant, il a suffi de quelques grands projets pour que le cadre de la coexistence entre les activités humaines et de l’équilibre soit remis en cause.
La réalisation du nouveau terminal méthanier GDF2 et ses trois dépôts de 39 m de hauteur, le projet de l’usine d’incinération des déchets urbains de la communauté marseillaise ont allumé le contre-feu des écologistes de tous poils. Aux yeux des populations riveraines, le développement de l’activité économique a d’un coup moins pesé face à la défense du cadre de vie et de l’environnement.
Environnement: une politique lisible
Après six années de réflexions et d’études menées avec des spécialistes de l’aménagement et de l’environnement, le PAM a rendu officiel le 1er juin dernier son Plan d’aménagement et de développement durable pour la zone industrielle de Fos. Ce document d’une centaine de pages, répondant au nom barbare de PADDZIF, se propose de recadrer un partage "équitable" entre l’industrie et l’environnement. La tâche était d’autant plus urgente que la zone industrielle de Fos connaît un élan de renouveau, une vague de projets sans précédent, notamment dans le secteur logistique, qui s’étend sur les 10-15 ans à venir.
Le schéma directeur du PAM peut se résumer ainsi: un cœur industriel et une couronne agri-environnementale. Connaissant les besoins et les enjeux des territoires inoccupés à préserver, l’établissement leur a attribué un Plan de gestion des espaces naturels (PGEN). D’une certaine façon, ce PGEN donne un statut proche de celui d’un Parc naturel régional à la "zone verte" du PAM. "Cela va nous permettre d’être beaucoup plus efficaces et de mieux coordonner nos actions avec celle des autres organismes. Et le cas échéant, d’être éligible aux subventions", souligne Renaud Spazzi, directeur de l’Aménagement, des Travaux et des Projets au PAM qui a conduit ce plan.
Le PAM s’est donc doté d’une politique environnementale lisible. Lors de sa présentation au CA du 1er juin, les représentants de l’industrie ont plutôt grincé des dents et regretté "que l’on abandonne autant de place à la nature". Élus, populations riveraines et associations écologistes ont plutôt apprécié. D’autant que le PADDZIF a reçu plusieurs agréments qui lui confèrent une légitimité, dont celui de la Directive territoriale de l’aménagement (DTA).
La carte de la ZIP de Fos
L’ensemble de la Zone industrielle et portuaire de Fos représente un territoire de 15 500 ha, dont une surface terrestre de 8 500 ha et une surface en eau de 7 000 ha. L’industrie occupe 4 700 ha et les espaces naturels et agricoles 3 800 ha.