La majorité de la douzaine de ports métropolitains intervenant sur le créneau des exportations de céréales a connu pendant la campagne 2006-2007 une diminution de son tonnage. Les volumes disponibles moins importants à l’exportation sont à l’origine de cette baisse. Suivant les ports, les diminutions peuvent être importantes, comme c’est le cas pour Dunkerque et Nantes. Mais les deux ports "leaders" du secteur, Rouen et La Rochelle-Pallice, s’en tirent plutôt bien avec 4 à 5 % de contraction, des niveaux inférieurs à la baisse globale des volumes enregistrée au plan national. Avec 610 000 t expédiées pendant cette campagne, Dunkerque enregistre un résultat très médiocre. Par rapport à la campagne 2005-2006 (1,137 Mt), le port du Nord connaît une baisse de 46 %. Le blé est à l’origine de cette situation, ce dernier voyant ses tonnages se contracter des deux tiers, alors que l’orge (près de 300 000 t) progressait de 57 %. Les expéditions vers les pays de l’Union européenne ne représentent que 15,5 % (95 000 t) alors qu’elles représentaient plus de 30 % l’année précédente (350 300 t). Les pays tiers pèsent 84,4 %: ils incluent notamment des tonnages importants d’orge fourragère pour l’Arabie saoudite (un niveau très supérieur aux deux récentes campagnes).
Le port de Rouen, premier port européen exportateur de céréales, a réalisé une campagne en diminution. Avec 5,45 Mt, elle marque une contraction de 5,07 % par rapport à la précédente. "Cette campagne avait mal débuté, avec seulement 2,3 Mt expédiés au premier semestre. Le second semestre a permis de charger 3,2 Mt, explique un spécialiste rouennais du secteur. L’essentiel des tonnages a été exporté entre décembre et mars." Le blé (4,6 Mt) enregistre une baisse de 4,4 %; les pays de l’UE ont réceptionné 572 100 t (− 34,9 %) et les pays tiers 4 Mt (+ 2,5 %). Pour l’orge, dont le volume global a diminué de 8,1 % à 852 900 t, les destinations de l’UE ont pesé 446 800 t (− 10,4 %) et celles des pays tiers 406 200 t (− 5,5 %).
Globalement, les tonnages expédiés sur pays tiers ont progressé de 1,7 % (4,43 Mt) tandis que les ventes sur l’UE diminuaient de 29 % (978 400 t). Il faut souligner l’importance du Maghreb comme destination des céréales rouennaises: blé et orge confondus, les trois pays nord-africains ont totalisé 2,6 Mt, soit 47,8 % du total rouennais. Sur ce tonnage, l’Algérie a représenté 1,95 Mt (40,4 % des sorties rouennaises).
En Seine fluviale, les exportations céréalières réalisées sur cette campagne font apparaître un résultat légèrement positif, avec 156 400 t expédiées depuis les silos de Bonnières et de Limay, les céréales chargées dans cette zone – du blé pour la presque totalité – ont pris principalement le chemin des Îles britanniques (150 000 t), le solde étant ventilé entre le Danemark, le Portugal et la Suède. Le port de Caen est le seul port de la façade Nord-Ouest à enregistrer une progression de ses volumes à l’exportation, soit 385 000 t (+ 3,8 %). La progression est le fait du blé dont les volumes augmentent de 11,6 %. Quatre pays représentent l’essentiel des destinations, l’Italie au premier rang (193 000 t) devant l’Espagne, l’Algérie et la Tunisie. À noter que le silo de Caen, exploité par le groupe Agrial, a bénéficié en début de campagne d’une importante opération de rénovation: 1,1 M€ a été investi dans ce processus qui comportait notamment la remise en état complète du portique de chargement (400 tonnes/heure).
Nantes/Saint-Nazaire figure également au nombre des ports ayant connu une chute de leur activité céréalière. Avec 775 300 t, le port de la Basse-Loire voit son tonnage céréalier perdre 41 % (1,32 Mt en 2005-2006). Les volumes de blé ont été amputés de près de 40 %, tandis que ceux du maïs perdaient 71 %. Seule l’orge connaît une croissance de 37 % (69 300 t).
Nantes/Saint-Nazaire, où les destinations européennes sont majoritaires depuis plusieurs campagnes, voit les exportations vers l’UE totaliser 561 000 t (72,3 % du total), avec, à souligner, de forts tonnages vers le Portugal (37,9 % du trafic total). Les destinations "pays tiers" pèsent 214 400 t (27,6 %), Algérie et Inde arrivant en tête.
Le port charentais de Tonnay-Charente a enregistré une campagne un peu moins bonne que celle de 2005-2006 en baisse de 6 % à 231 300 t. Orienté essentiellement vers les destinations européennes, le trafic de Tonnay-Charente a enregistré une diminution du blé (− 8,4 %) et du maïs (− 12,2 %). Il compte en outre 13 000 t d’orge.
En Méditerranée, le principal port céréalier d’exportation demeure Port-La-Nouvelle où la société Silos du Sud a expédié par voie maritime 695 300 t (+ 7,5 %). Le port méridional expédie principalement du blé dur (environ 600 000 t pour cette campagne) et un peu de blé tendre (80 000 t).
Trois pays de destination constituent l’essentiel des tonnages, l’Algérie, l’Italie et la Grèce. Par ailleurs, Silos du Sud expédie des tonnages d’orge par camions vers l’Espagne, la campagne 2006-2007 étant en baisse par rapport à la précédente.
À Sète, le trafic céréalier connaît une nouvelle contraction. Pour l’année 2006-2007, le silo sétois a chargé 74 200 t de céréales (− 46 %). Il s’agit majoritairement de blé à destination de l’Italie et de la Grèce. À cela s’ajoute un peu d’orge (7 500 t) pour l’Italie. En trafic fluviomaritime, le port d’Arles a réalisé 55 700 t (blé, orge et maïs à destination de l’Italie).
Enfin, sur le site de Marseille-Fos, le trafic céréalier s’est élevé à 633 100 t, en baisse de 28 % par rapport à 2005-2006. Ces trafics sont traités sur la plate-forme des Tellines, située sur la zone industrialo-portuaire de Fos. L’essentiel des tonnages prend le chemin des pays voisins, Italie et Grèce, et dans une moindre mesure, s’achemine vers l’Espagne, Malte et l’Algérie. Il faut rappeler que le conseil d’administration du port autonome de Marseille a approuvé le 30 mars dernier une opération d’investissement de 10 M€ au bénéfice de ce terminal céréalier. "Cet investissement permettra d’adapter les outillages aux perspectives de croissance du terminal qui devrait multiplier son trafic par trois avant 2015 (1,5 Mt de céréales contre 500 000 t actuellement)", explique le port autonome. Par ailleurs, l’AIT (Association d’investissement des Tellines, réunissant les CCI du bassin Rhône-Saône et la Compagnie nationale du Rhône), titulaire depuis 1996 d’une convention d’occupation du terminal céréalier, s’est engagée à construire un second silo vertical d’une capacité de 60 000 t pour un investissement de 12 M€. Ce silo pourrait être opérationnel en 2009.
Bernard Villette: “Rouen a bien résisté à la baisse des volumes”
La campagne céréalière 2006-2007 s’est achevée pour Rouen avec des volumes expédiés de 5 % inférieurs à ceux de la campagne 2005-2006. Bernard Villette, président de la Bourse de commerce de Rouen, président du Comptoir Agricole Villette, revient sur son déroulement.
B. Villette: juin 2006 a été marqué d’un temps chaud et sec qui a influencé le niveau de la moisson de l’été 2006. Nous avons eu au final une quantité moindre que l’année précédente, mais présentant des qualités physiques et techniques comme on n’en avait jamais vu (humidité, poids spécifique, protéines, Hagberg, W, etc.). C’est là le résultat d’une politique constante de valorisation des qualités meunières. Celles-ci représentent aujourd’hui 90 % des semis.
Au niveau de l’exportation, tout a été vendu, sans problème. Il ne reste aujourd’hui que le stock minimum, soit environ 2 Mt. Au niveau de l’intervention, Bruxelles a également vendu tout son stock, à l’exception de quelques quantités de maïs situées en Hongrie. Les prix ont joué un rôle important au cours de cette campagne. Le blé a débuté avec du rendu Rouen aux alentours de 120 €. Il est monté jusqu’à 160 € en octobre avant de se stabiliser entre janvier et juin dans les 140/150 €. Les taux de fret ont, pour leur part, beaucoup augmenté depuis début 2007. Une cargaison typique rouennaise de 25 000 t de blé sur l’Algérie coûtait 20 à 25 $ la tonne de transport; il faut en compter 10 de plus aujourd’hui (à mi-juillet). Mais tous les exportateurs subissent cette hausse de la même manière…
Côté mer Noire, la concurrence n’a pas été trop vive pour cette campagne 2006-2007. Certes, la France a peu vendu en Égypte, ce dernier s’étant notamment fourni en mer Noire. L’Italie et la Tunisie ont également acheté sur cette origine. Mais nos deux principaux marchés, l’Algérie et le Maroc, sont restés de très gros clients. La France a fourni près de 90 % du marché algérien.
En matière de pré-acheminements, il faut souligner les développements en transport fluvial, réalisés la plupart du temps au détriment de la voie ferrée. En combinant transport routier d’approche et transport fluvial sur la distance, Rouen a récupéré quelques marchés plus éloignés, élargissant un peu son arrière-pays.
Globalement, pour cette campagne 2006-2007, Rouen a bien résisté à la baisse des volumes.