L’été dernier, la situation était pourtant alarmante avec deux mois d’inactivité. La société BCTC, qui sous-traite les activités du terminal à conteneurs avait dû licencier la moitié de ses employés, en attendant une meilleure conjoncture et la direction du port craignait de perdre son contrat de transbordement avec la société MSC. Quant aux dommages liés à la guerre, Hassan Qoraytem, le directeur de l’autorité portuaire les chiffre à 10 M$.
Mais la situation s’est redressée d’une manière presque inespérée. Dès la fin du blocus, en septembre, les navires qui se massaient derrière la ligne des eaux territoriales ont afflué au Liban, où la population attendait avec impatience la reprise des importations. C’est cette demande constante qui explique qu’en chiffres comparés, le trafic des importations n’a baissé que de 5 % en 2006 par rapport à 2005. Pourtant, le blocage politique que traverse à présent le pays et la stagnation économique qu’il induit devraient empêcher l’augmentation des importations en 2007.
LE PARI DE MSC
Les très bonnes surprises sont venues du transbordement. Facteur déterminant, la compagnie MSC qui avait choisi le Beyrouth pour ses activités régionales de transbordement n’est pas revenue sur sa décision et a même renouvelé son contrat avec les autorités du port, pour trois ans. Analyse du directeur du port, sobre et souriant: "MSC a parié sur Beyrouth et a décidé de maintenir ce pays, au vu de nos services et de nos prix compétitifs." Dans le courant de l’hiver, un autre acteur, qui était en pourparlers avec les mêmes autorités depuis des mois, est entré sur scène: la CMA CGM. Ce choix de s’installer à Beyrouth semble confirmé par le début des travaux, en plein centre-ville du siège beyrouthin de Merit Corporation, la société mère de la CMA CGM.
Les chiffres sont explicites: le trafic du port de Beyrouth en janvier 2007 est supérieur de 60 % à celui de janvier 2006. Depuis janvier, le trafic conteneurisé atteint 80 000 boîtes. À ce rythme, sauf en cas d’aggravation de la situation politique, l’activité du port de Beyrouth frisera le million de conteneurs pour cette année. Le chiffre paraît à peine croyable, quand le trafic de Beyrouth en 2003 n’était que de 300 000 EVP et que l’an dernier, les autorités portuaires se frottaient les mains d’un trafic qui promettait d’atteindre les 600 000 EVP.
Cette véritable explosion du trafic menace même d’engorgement le port de Beyrouth. En effet, le terminal à conteneurs, inauguré en 2005, a une capacité de 500 000 EVP. Pour le moment, les autorités portuaires autorisent les navires de transbordement à venir accoster en dehors de l’enceinte de ce terminal et à utiliser leurs propres grues. Cette solution suscite le mécontentement des importateurs: les livraisons sont retardées par les activités de transbordement qui bénéficient d’une priorité d’accostage. Les travaux d’extension du terminal à conteneurs et d’élargissement des quais adjacents, prévus depuis l’an dernier, sont imminents. La société allemande Salhorne, a entamé l’étude de faisabilité pour les travaux nécessaires. Un cinquième portique de quai et ses deux grues de parc ont été livrés cet été. Leur mise en fonctionnement a été retardée et ces équipements sont opérationnels depuis le début de l’année. Une sixième unité du même type doit être livrée avant la fin de l’année.
Le nouveau terminal à conteneurs du port de Tripoli, qui doit alléger l’activité du trafic beyrouthin n’est pas encore achevé. Optimiste, le ministre des Transports, Mohammed Safad, estime que ce nouveau terminal pourra entrer en activité avant la fin de l’année, échéances qui seront sans doute retardées par las troubles politiques que connaît à présent le Nord du pays.
UNE MISE EN CONFORMITE AU CODE ISPS
Les autorités du port de Beyrouth ont confié une étude à la compagnie anglaise Hudson-Trident afin de se mettre en conformité avec le nouveau code de sécurité ISPS. Dans son rapport, Hudson-Trident met l’accent sur la nécessité de mieux protéger l’accès du port par la mer. À court terme, trois rangs de grillage doivent être mis en place sur les accès latéraux du terminal à conteneurs. Ensuite, des caméras devront être installées au-dessus de ces grillages. D’ici deux ans, Hudson-Trident préconise l’emploi de radars GTS et EIS déclenchant une alarme en cas d’intrusion, afin de mieux contrôler l’accès du port par voie maritime. De son côté, le port n’a pas attendu ce rapport pour lancer un appel d’offres pour l’installation de caméras sur les quatre entrées terrestres du port.
Enfin, le projet de zone franche logistique est presque abouti. Les huit compagnies, qui ont loué un emplacement sur les 30 000 m2 de la zone franche, terminent la construction des hangars. Son inauguration s’est déroulée le 14 juin. Les marchandises destinées au transit seront exemptées de droits de douane, ce qui devrait renforcer le Liban dans son rôle de redistributeur régional. Tablant sur les efforts internationaux de redressement de la situation en Irak et sur une régulation des relations avec la Syrie, le ministère des Transports envisage même de créer des cales sèches un peu partout dans le pays, pour soulager les ports et emmagasiner les marchandises de transit. Au Liban, l’optimisme est un sport national.
Les chiffres clés du trafic en 2006
Avec un trafic général de 4,22 Mt, le port de Beyrouth affiche en 2006 une baisse de 250 000 t par rapport à l’année précédente. Cet infléchissement s’explique largement par les deux mois de blocus qu’a connu le port suite à la guerre de juillet 2006 et à une reprise des activités perturbée jusqu’à la fin de l’année. Dans ce bilan, la part des entrées est largement majoritaire, puisqu’elle représente 3,5 Mt, soit plus de 80 % du trafic. Le trafic des conteneurs poursuit sa progression avec un total avoisinant les 600 000 EVP, soit une augmentation de plus de 27 % par rapport à 2005. Le transbordement représente quant à lui 255 000 EVP, un bond considérable face aux 76 250 EVP de 2005 (année de lancement des activités de transbordement pour le port de Beyrouth). On remarque déjà qu’en mai 2007, les activités de transbordement sont proches de ce chiffre, avec un total cumulé de 214 000 EVP. Le trafic strictement dédié aux conteneurs représente 1,8 Mt des entrées, dont la moitié en transbordement. Avec 400 000 t au départ de Beyrouth, il représente près de 60 % des marchandises quittant le port. Les marchandises diverses atteignent un tiers des entrées du port, avec un peu plus d’un million de tonnes et 40 % des sorties, avec un tonnage de 280 000 t. Et si aucun vraquier ne quitte le port de Beyrouth, les entrées de vrac dépassent les 500 000 t, soit 15 % des marchandises arrivant par voie maritime. Enfin, les importations de fuel se maintiennent à environ 100 000 t, soit 3 % des entrées.