Cette dernière journée fut occupée par la défense de la société de classification italienne Rina. Trois avocats se sont succédé: Mes Le Berre, Engelsen et Metzner.
Me Frédérique Le Berre a rappelé que la convention internationale CLC 92 sur les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures ne visait que le propriétaire du navire. Ainsi, l’action en réparation ne peut être intentée, en cas de faute inexcusable, que contre les affréteurs, armateurs, pilotes ou leurs préposés, ce qui n’est pas le cas de la société de classification signataire, avec le propriétaire de l’Erika, d’un contrat de prestation de service. En examinant la jurisprudence américaine et celle d’autres États, elle a également estimé que le préjudice écologique invoqué devait correspondre au coût de la remise en état d’un lieu donné.
De son côté, Me Engelsen est revenu sur la visite d’Augusta et le reproche adressé à M. Alga, responsable de l’inspection, d’avoir laissé le navire reprendre la mer, malgré son état. Il a fait observer que, selon la convention Solas, la visite annuelle ne consiste qu’en une visite générale de la structure alors que la visite spéciale, tous les cinq ans, repose sur une inspection complète. Il a reconnu que M. Alga avait observé de la rouille, mais sur des éléments de renfort et non sur les structures.
UNE FAUTE REPOUSSÉE SUR LE COMMANDANT MATHUR
Selon lui, la corrosion n’avait rien d’anormal sur un navire de cet âge. Elle ne pouvait à elle seule causer le naufrage. Passant en revue les différentes analyses et conclusions des experts qui se sont succédé, il a estimé qu’aucune n’était convaincante et a exposé de nouveau la thèse du Rina sur l’oxydation de la zone de la marque de "remorquage" qui se serait transformée en fissure après le départ de Dunkerque.
Il a dénoncé le comportement inadapté du commandant Mathur et accusé le comité d’experts de Dunkerque d’avoir distordu la vérité, caché des pièces et refusé des compléments d’expertise.
Il a souligné, en conclusion, que les infractions de pollution et de mise en danger de la vie d’autrui manquaient de fondements techniques, demandant en conséquence la relaxe pour son client Gianpierro Ponasso, le directeur du Rina.
Me Olivier Metzner, lui, est revenu sur l’immunité dont jouirait le Rina en tant que délégataire de l’État de Malte, pour ce qui concerne la certification du navire (et non pour la classification qui est elle une activité privée). Puis il a fait remarquer que le Rina, société par actions n’existait que depuis le 1er août 1999, en conséquence, tous les actes commis avant cette date étaient le fait du registre italien. "J’accepte la continuité au civil, mais pas au pénal", a-t-il souligné. "Une poursuite ne peut être menée contre une société qui n’existait pas encore."
En ce qui concerne le chef de "mise en danger de la vie d’autrui" constitué en présence d’une "violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement" selon l’article 223-1 du Code pénal, Me Metzner a déclaré ne pas savoir quel texte concernant la classification était visé par la prévention. Il a réclamé en conséquence la relaxe pour le Rina et son directeur, Gianpierro Ponasso.